Des services secrets étrangers sont «derrière» l'attaque suicide qui a fait 21 morts (dont deux Canadiens) vendredi soir à Kaboul, a affirmé dimanche le Conseil de sécurité nationale afghan, présidé par le président Hamid Karzaï, une accusation semblant viser le Pakistan voisin.

«De telles attaques aussi complexes et sophistiquées ne peuvent être seulement l'oeuvre des talibans», a déclaré la présidence afghane dans un communiqué diffusé à l'issue d'une réunion du Conseil de sécurité nationale afghan (NSC).

Le NSC a estimé qu'il ne faisait «aucun doute que des services de renseignement étrangers (...) sont derrière de telles attaques», ajoute le communiqué, semblant faire référence aux puissants services secrets pakistanais (ISI).

Kaboul accuse régulièrement le Pakistan, qui fut le premier soutien des talibans lorsqu'ils étaient au pouvoir (1996-2001) et où nombre d'entre eux ont trouvé refuge après la chute de leur régime, de soutenir depuis leur rébellion pour défendre ses intérêts stratégiques dans la région, ce qu'Islamabad a toujours nié.

Vendredi soir, un commando-suicide a mené une expédition meurtrière contre «La Taverne du Liban», un restaurant du centre-ville prisé par la communauté expatriée, tuant 21 personnes, dont 13 étrangers.

Peu après 19h00 (9h30, heure de Montréal), un kamikaze s'est fait exploser devant les portes blindées de l'établissement. Profitant de la confusion provoquée par la puissante détonation, qui a résonné dans tout le centre de Kaboul, deux assaillants armés ont réussi à s'introduire dans le restaurant et ont ouvert le feu sur les clients, avant d'être eux-mêmes abattus par les forces spéciales afghanes.

Plusieurs survivants ont décrit des scènes d'une rare violence, des victimes ayant cherché à se cacher derrière le mobilier du restaurant pour tenter d'échapper, en vain, au carnage.

«Il y avait du sang partout, sur les tables, les chaises. Les assaillants ont dû tirer à bout portant», a raconté Atiqullah, un des chefs du restaurant.

Parmi les victimes figurent notamment trois Américains, deux Britanniques, deux Canadiens et deux Libanais: un représentant du Fonds monétaire international (FMI) et le patron du restaurant, abattu par les assaillants alors qu'il tentait de se défendre.

Une Danoise, membre de la force de police de l'UE (EUPOL) et un responsable russe de l'ONU ont également été tués.

L'attaque, revendiquée par les talibans, a été condamnée unanimement par la communauté internationale, qui a dénoncé un acte de violence «épouvantable» et «injustifiable».

Dimanche, une centaine de personnes ont défilé dans les rues de Kaboul en scandant «Non au terrorisme!».

«Nous voulons rendre hommage aux victimes, et montrer que les Afghans resteront unis face à ces attaques», a déclaré à l'AFP une des participantes, Lailee Rahimi, une travailleuse humanitaire.

Présent dans le défilé, le porte-parole du ministère de l'Intérieur afghan, Sediq Sediqqi, a indiqué qu'une enquête était menée pour tenter de comprendre comment le commando taliban a réussi à déjouer la vigilance des nombreux points de garde quadrillant la capitale afghane.

Trois responsables de la police chargés de la sécurité du quartier où se trouve la Taverne du Liban, Wazir Akbar Khan, ont été suspendus dans les heures qui ont suivi l'attaque.

«Ils seront interrogés pour savoir comment cette attaque a pu arriver», a dit M. Sediqqi. «Il n'est pas impossible qu'il y ait eu des manquements, mais nous devons attendre le résultat de l'enquête. Si des erreurs ont été commises, nous en ferons en sorte qu'elles ne se reproduisent pas».

L'attaque contre La Taverne du Liban est la plus meurtrière commise en Afghanistan contre des civils étrangers depuis la chute du régime taliban en 2001.

Elle intervient dans un contexte de violences persistantes alors que l'Otan doit retirer ses troupes du pays d'ici à la fin de l'année. Ce retrait doit s'effectuer de surcroît dans un contexte politique sensible, une élection présidentielle étant prévue le 5 avril.

Photo Massoud Hossaini, AP

Dimanche, une centaine de personnes ont défilé dans les rues de Kaboul en scandant «Non au terrorisme!».