Le polonium, mis en cause par des experts suisses dans un éventuel empoisonnement du dirigeant historique palestinien Yasser Arafat, est une substance radioactive extrêmement toxique avec laquelle a été empoisonné en 2006 Alexandre Litvinenko, un ex-espion russe devenu opposant au président Vladimir Poutine.

Les analyses des échantillons prélevés par un laboratoire suisse sur la dépouille de Yasser Arafat, décédé le 11 novembre 2004 dans un hôpital militaire français, «soutiennent modérément l'hypothèse que la mort a été la conséquence d'un empoisonnement au polonium-210», selon une copie du rapport diffusée mercredi par la chaîne qatarie Al-Jazeera.

«Nous avons mesuré des activités de polonium-210 dans les os et les tissus qui étaient jusqu'à 20 fois supérieures aux références de la littérature» médicale, écrivent les 10 médecins et praticiens, pour la plupart de l'Institut de radiophysique de Lausanne.

Déjà à la mi-octobre, dans un article diffusé par la revue médicale britannique The Lancet, des experts de cet institut ayant analysé les effets personnels d'Arafat avaient confirmé la «possibilité» d'un empoisonnement par substance radioactive.

Elément chimique naturel présent dans la pechblende (minerai d'uranium), le polonium, découvert en 1898 par Marie Curie, est utilisé comme source de rayonnement Alpha dans la recherche et en médecine, mais aussi comme source de chauffage dans les engins spatiaux.

Il reste toutefois très rare, avec un milliardième de gramme de polonium au maximum dans dix grammes d'uranium. Sa production nécessite un réacteur nucléaire et est estimée à moins de 100 grammes par an à l'échelle mondiale, en grande majorité d'origine russe.

Soluble, très toxique à des doses infimes par inhalation ou ingestion, le polonium est un élément particulièrement dangereux, dont la manipulation exige un équipement spécial et des procédures strictes. A lui seul, il suffit à provoquer des cancers par inhalation chez les animaux de laboratoire.

En novembre 2006, la mort à Londres d'Alexandre Litvinenko, empoisonné à 43 ans au polonium et première victime connue d'un «assassinat radiologique» selon des experts, avait provoqué une crise diplomatique entre le Royaume-Uni et la Russie.

Transfuge des services secrets russes réfugié à Londres, il était décédé trois semaines après avoir pris le thé avec un autre ex-agent russe. Son foie et sa moelle osseuse avaient été atteints par de fortes doses de radiations et il avait perdu ses cheveux en quelques jours.

Dans le cas de Yasser Arafat, il n'y a jamais eu d'informations médicales claires sur les raisons de sa mort. Nombre de Palestiniens accusent Israël, qui a toujours nié, de l'avoir empoisonné.

Yasser Arafat avait été admis à l'hôpital près de Paris fin octobre après avoir souffert de douleurs abdominales sans fièvre dans son QG de Ramallah, où il vivait confiné depuis décembre 2001, encerclé par l'armée israélienne.

En juillet 2012, un documentaire d'Al-Jazeera a révélé la présence de quantités anormales de polonium sur ses effets personnels confiés par sa veuve à la chaîne qatarie qui les a fait analyser par le laboratoire suisse.

Fin novembre 2012, une soixantaine de prélèvements ont été effectués sur sa dépouille à Ramallah et répartis pour analyse entre trois équipes d'enquêteurs, suisse, française et russe.