Il y a 20 ans, lors de la poignée de mains historique entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat sur la pelouse de la Maison Blanche, la paix semblait enfin à portée. Mais l'espoir soulevé par les accords d'Oslo s'est évanoui, au désarroi des Palestiniens qui attendent toujours leur État.

Le processus lancé par la signature de la Déclaration de principes le 13 septembre 1993, en présence du premier ministre israélien et du chef de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), tous deux disparus, s'est enlisé face à la poursuite de la colonisation israélienne et aux violences des deux côtés.

Par étapes successives, il devait aboutir, en commençant par l'autonomie de Gaza et Jéricho (Cisjordanie) en 1994, sous la responsabilité de l'Autorité palestinienne naissante, à la résolution avant la fin de la décennie d'un des plus anciens conflits au monde.

À présent, plus de deux tiers des Israéliens et des Palestiniens (68 et 69%) jugent faibles ou nulles les chances de création dans les cinq ans d'un État palestinien à côté d'Israël, selon un sondage réalisé en juin.

«Le fait que, 20 ans après la signature des accords d'Oslo, nous nous trouvions devant un échafaudage au lieu d'une structure achevée est décevant», reconnaît l'ancien ministre israélien Yossi Beilin, un des architectes de ces accords, qui met en garde contre le risque d'un démantèlement de l'Autorité palestinienne, si «dans les prochains mois, toutes les tentatives pour parvenir à un règlement échouent».

«La reconnaissance mutuelle existant entre Israël et l'OLP est restée intacte», assure-t-il néanmoins dans une tribune publiée par le quotidien Haaretz. «Aujourd'hui, Israël et les Palestiniens coordonnent les opérations dans tous les domaines, en particulier celui de la sécurité, c'est le changement majeur apporté par les accords d'Oslo».

Les Palestiniens dressent un bilan encore plus sombre.

«Nous avons obtenu le retour de la direction palestinienne dans les Territoires palestiniens ainsi que de près de 300 000 familles, et l'édification d'institutions et d'un système administratif palestiniens», résume Hanane Achraoui, membre du Comité exécutif de l'OLP.

«Mais nous avons beaucoup perdu, en termes de terres, de ressources et de capacités, et Israël nous a imposé une infrastructure et séparés en enclaves isolées par les colonies», déplore-t-elle.

«Plus d'accord intérimaire»

Hassan Abdou, un politologue de Gaza, gouverné depuis 2007 par le mouvement islamiste Hamas, rappelle qu'«Oslo était un accord intérimaire, l'Autorité palestinienne étant considérée comme une étape transitoire vers un Etat. Mais l'occupation a remis cela en cause».

L'analyste Hani al-Masri, basé en Cisjordanie, dont l'Autorité gouverne les zones autonomes, se montre encore plus sévère.

«Vingt ans après les accords d'Oslo, il est clair que ces négociations n'ont rien apporté, l'occupation s'est approfondie, les colonies se sont étendues. Et le pire, c'est que la partie palestinienne est revenue aux négociations sous la même forme et la même méthode», dit-il, en référence à la reprise des pourparlers en août sous l'égide des États-Unis.

Yossi Beilin plaide pour une implication accrue d'une «tierce partie (les Américains aussi bien que les Européens)», considérant que «lorsque les dirigeants des deux parties jugent le statu quo tolérable, une tierce partie est nécessaire pour les ramener à la réalité».

Le négociateur palestinien Nabil Chaath réclame lui aussi un changement radical de méthode, bien qu'il crédite Oslo du mérite de la «créativité».

«Quand Oslo a démarré, il y avait une bonne chance de succès, avec deux camps de la paix forts, palestinien et israélien, et deux dirigeants déterminés à ce que ça marche», souligne-t-il. «Le problème fondamental d'Oslo c'est qu'il n'a pas été appliqué, ou seulement de manière très sélective».

Face au «déséquilibre des forces qui rend les accords inapplicables», ce vétéran du processus du paix exige «une implication internationale avec un engagement à surveiller le respect des accords et prendre des mesures en cas de violation par une des parties, plus d'impunité pour Israël, et par conséquent un arbitrage contraignant».

Les Palestiniens ne veulent plus entendre parler d'accords par étapes du type Oslo. «Ne rien remettre à l'avenir, plus d'accord intérimaire, nous avons appris notre leçon», affirme Nabil Chaath.