Les huit candidats à la présidentielle iranienne passent vendredi leur premier grand oral lors d'un débat télévisé, sur fond de campagne électorale étroitement surveillée et dominée par la crise économique due aux sanctions internationales.

Une semaine après son démarrage officiel, la campagne reste terne et les candidats, sept conservateurs et un réformateur, se cantonnent à de brèves visites en province ou aux émissions des médias officiels, alors que près de 50,5 millions d'électeurs sont appelés aux urnes le 14 juin.

Les autorités ont interdit les rassemblements de rue et dans les principales villes du pays, peu d'affiches de campagne étaient visibles.

«Il n'y a pas beaucoup de commandes d'affiches ou de banderoles pour l'instant», a dit à l'AFP Ali, un imprimeur de Machhad (nord-est). «C'est probablement dû au nombre de candidats, a-t-il ajouté. Plusieurs devraient se retirer de la course et ils ne veulent pas dépenser leur argent».

Les candidats devraient répondre vendredi à tour de rôle aux questions d'un commentateur, un débat suivi par deux autres, prévus les 4 et 7 juin.

En 2009, la télévision avait organisé pour la première fois des face-à-face entre les candidats. Les discussions avaient été houleuses, notamment entre Mahmoud Ahmadinejad, qui se présentait pour un second mandat, et les deux réformateurs Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, aujourd'hui en résidence surveillée.

Les manifestations de leurs partisans après la réélection controversée de M. Ahmadinejad avaient provoqué l'une des plus graves crises qu'a connues le régime, qui avait sévèrement réprimé la contestation.

Sept conservateurs, dont plusieurs proches du Guide suprême l'ayatollah Ali Khamenei et deux modérés, et un seul réformateur se présentent à la présidentielle, sur fond de grave crise économique.

Soupçonné de chercher à fabriquer l'arme atomique sous couvert de son programme nucléaire civil, Téhéran est sous le coup de plusieurs sanctions de l'ONU, renforcées depuis l'été 2012 par un embargo bancaire et pétrolier de l'Union européenne et des États-Unis.

Les exportations de brut ont plongé et Téhéran ne peut plus rapatrier ses pétrodollars, ce qui a provoqué une sévère crise économique marquée par une inflation officielle de plus de 30 % et par un effondrement des investissements étrangers.

Les candidats ont promis de résoudre la crise économique, mais sont restés vagues sur les moyens qu'ils comptent employer.

Censure

Ali Akbar Velayati, ancien chef de la diplomatie, a promis de contrôler l'inflation en 100 jours. Mohammad Bagher Ghalibaf, actuel maire de Téhéran, veut ramener la stabilité économique «en deux ans». Saïd Jalili, chargé des négociations sur le nucléaire et l'un des favoris en raison de sa proximité avec le Guide, veut mettre en place une «économie de résistance».

Sur la question du nucléaire, les candidats font front commun sur le droit «légitime» de l'Iran à l'énergie atomique civile. Mais les tactiques diffèrent sur les négociations avec les grandes puissances du groupe 5+1 (Chine, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne) pour réduire l'impact des sanctions.

Les échanges pourraient être rudes à ce propos entre M. Jalili, dont l'intransigeance dans les discussions est saluée par les ultraconservateurs, et Hassan Rohani, négociateur nucléaire entre 2003 et 2005.

M. Rohani, un conservateur modéré et le seul candidat issu du clergé, a notamment été critiqué pour avoir signé en 2003 un moratoire des activités nucléaires de l'Iran, qui sont sous l'autorité directe du Guide.

Pour éviter tout dérapage, l'ayatollah Khamenei a rappelé mercredi que «les candidats devraient s'abstenir de salir leurs concurrents et les réalités sociales afin d'attirer les électeurs».

Les médias ont déjà rapporté des accusations de censure. Une partie d'un discours télévisé de Mohsen Rezaie, conservateur et ancien commandant des Gardiens de la révolution, aurait été coupé au montage. Il évoquait un homme, dont trois fils avaient été tués pendant la guerre Iran-Irak (1980-88), se disant acculé au suicide par la crise économique. Un commentaire de M. Rezaïe sur les «discriminations ethniques» en Iran aurait également été censuré.