Après plusieurs jours de tirs de roquettes incessants, Beersheva, la grande cité israélienne aux portes du désert du Néguev, ressemble à une ville fantôme. La plupart des quelque 200 000 résidants de la ville restent confinés chez eux toute la journée. Malgré tout, ils approuvent la décision du gouvernement de Benyamin Nétanyahou de mener une offensive contre les militants extrémistes de la bande de Gaza, située à une quarantaine de kilomètres de leur ville.

«Nous ne sommes pas des héros. C'est effrayant, mais nous devons continuer», a expliqué Richard Atwan, 60 ans, attablé devant un café dans le centre commercial de la ville, pratiquement vide dimanche. «Nous sommes préparés à souffrir maintenant pour que l'avenir soit meilleur.»

Quelques minutes auparavant, une sirène l'avait contraint à se réfugier avec une dizaine d'autres personnes dans un abri antibombe rapidement saturé. Les résidants ont tous retenu leur souffle en entendant les premières explosions. La première sortie de Richard Atwan depuis le début de l'opération Pilier de défense, mercredi dernier, a rapidement pris fin sur un appel téléphonique. «C'est mon fils. La roquette a atterri près de notre maison, il vient me chercher», a-t-il expliqué.

En cinq jours, plus de 550 roquettes ont frappé le territoire israélien, certaines touchant pour la première fois les deux plus grandes villes du pays, Jérusalem et Tel Aviv. Trois Israéliens ont été tués et une soixantaine d'autres blessés dans ces tirs.

En représailles, l'armée israélienne a lancé l'opération Pilier de défense, au cours de laquelle des centaines de frappes aériennes ont été menées contre des militants et des infrastructures du Hamas dans la bande de Gaza. Au moins 96 Palestiniens ont été tués, dont une majorité de civils, et 840 autres ont été blessés, selon des responsables de la santé de la bande de Gaza.

La majorité des tirs de roquettes palestiniennes contre Israël ont visé le sud du pays, où un million de personnes vivent dans la crainte des roquettes depuis une dizaine d'années. Les attaques fréquentes ont entraîné quelques décès, mais surtout un stress continu pour les résidants de cette partie du pays, notamment les enfants traumatisés par les sirènes et les explosions.

Il y a quatre ans, Beersheva avait déjà été touchée par une quarantaine de roquettes en trois semaines, au cours de violences entre Israël et les militants du Hamas. Pendant la seule journée de samedi, une quarantaine de roquettes ont visé la ville, mais sans faire de victime grâce au bouclier antimissile Dôme de fer, qui a neutralisé la moitié des projectiles.

Dans la salle de guerre située sous l'hôtel de ville, le maire Ruvik Danilovich observe les tirs de roquettes sur des cartes interactives projetées sur des écrans géants. Le maire supervise les opérations de soutien à ses concitoyens, et notamment la mission de la police et de l'armée visant à rassurer les résidants. En quelques jours, le maire Danilovich s'est transformé en général.

«Nous avons tout le temps devant nous pour régler ça. Et cela se poursuivra jusqu'à ce que l'autre partie comprenne qu'il ne peut plus y avoir d'attaque contre nos villes», affirme M. Danilovich. «Nous sommes victimes de terrorisme, de crimes contre l'humanité. Nous sommes des gens innocents qui n'ont fait de mal à personne et qui sont attaqués sans raison.»

Une position partagée par les résidants de sa ville, qui soutiennent l'offensive de l'armée dans la bande de Gaza. Les roquettes tirées dimanche sur Beersheva ont fait deux blessés légers et entraîné la fermeture des rares boutiques encore ouvertes, par crainte des tirs ou par manque de clients.

«Nous ne voulons pas encore d'un cessez-le-feu. Nous continuerons de tout supporter jusqu'à ce que finalement ça s'arrête et pour de bon», affirme Eden Lankri, une vendeuse de 21 ans dans l'un des rares magasins de vêtements de la ville encore ouvert. «Si nous arrêtons maintenant, ce sera vain. Il faut qu'il y ait des résultats cette fois», a déclaré la jeune femme, dont le petit ami vient d'être rappelé sous les drapeaux.