Le président afghan Hamid Karzaï a invité les talibans à parler directement à son gouvernement, tout en demandant au Pakistan de faciliter les négociations de paix après dix années de guerre en Afghanistan.

«Dans le but de réaliser les objectifs du processus de paix, j'invite la direction des talibans à engager des discussions directes avec le gouvernement afghan», a déclaré M. Karzaï dans un communiqué.

«Tout en soulignant l'importance du soutien du Pakistan dans le processus de paix, je demande au gouvernement frère du Pakistan de soutenir et de faciliter nos efforts de négociations directes» avec les insurgés, a-t-il poursuivi.

Les talibans, chassés du pouvoir à la fin 2001 par une coalition menée par les États-Unis, poursuivent depuis dix ans une guérilla contre les armées occidentales et afghane. Début janvier, ils ont annoncé leur intention d'ouvrir un bureau au Qatar pour discuter avec les États-Unis.

Le gouvernement afghan a donné son accord pour l'installation de cette représentation hors d'Afghanistan, tout en ne cachant pas sa crainte d'être mis à l'écart des négociations. Washington a à plusieurs reprises rassuré les autorités afghanes quant à leur présence dans ces discussions.

La position de Kaboul semble, de fait, particulièrement délicate, Hamid Karzaï multipliant les déclarations contradictoires.

Dans une interview à la chaîne australienne SBS diffusée mardi, le chef d'État afghan affirme ainsi parler «chaque jour» aux insurgés. «Nous leur parlions il y a quelques jours à peine quelque part dans la région», observe-t-il lors d'un entretien qui s'est tenu la semaine passée.

Jeudi dernier, ce même Hamid Karzaï, en affirmant qu'«il y a eu des contacts entre le gouvernement afghan et les talibans», a provoqué l'ire des insurgés, qui ont «rejeté fortement» les déclarations du président afghan.

Dans leurs diverses prises de parole, souvent publiées sur leur site «Voice of Jihad» (la voix du djihad), les rebelles qualifient généralement Kaboul d'«administration fantoche», de «marionnette» «sans pouvoir», de «larbin» ou de «dupe».

Mi-février, un porte-parole des rebelles, Zabiullah Mujahid, avait observé, dans une réponse écrite à CNN, que rencontrer les autorités afghanes «ne serait pas avantageux pour résoudre» la question afghane.

«La question est de savoir qui a le pouvoir de prendre une décision et qui ne l'a pas» et «tous dans le monde savent que ceux qui ont l'autorité par opposition aux (talibans) est l'Amérique», avait-il ajouté.

Déterminé à tourner la page de 2011, désastreuse pour son image avec, entre autres, la découverte qu'Oussama ben Laden s'était caché pendant plusieurs années chez lui avant d'y être tué en mai par un commando américain, le Pakistan semble déterminé à jouer un rôle dans le processus de paix en Afghanistan, profitant de l'ouverture diplomatique annoncée par les talibans.

Islamabad considère comme vitale la présence de régimes amis chez ses voisins iranien et afghan en raison de ce qu'il considère comme une menace permanente sur sa frontière avec son rival de toujours, l'Inde. Mais il est régulièrement accusé par Washington et Kaboul de soutenir les talibans afghans.