Une rencontre devrait avoir lieu aujourd'hui au Caire entre le président palestinien et chef du Fatah, Mahmoud Abbas, et le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Meshaal. Alors que les deux leaders doivent discuter des détails de leur réconciliation signée en mai, La Presse s'est rendue à Hébron en Cisjordanie, où les partis islamistes semblent connaître un regain de popularité et de visibilité.

Depuis l'âge de 12 ans, Lama Khater participe à des activités politiques organisées par des mouvements islamiques en Cisjordanie. Aujourd'hui âgée de 34 ans, l'écrivaine et spécialiste des médias soutient le Hamas et se joint toutes les deux semaines aux manifestations organisées depuis quelques mois à Hébron pour dénoncer les arrestations politiques contre ses membres.

«Depuis quatre ans, la plupart des activités du Hamas étaient clandestines, dit la jeune femme, le visage encadré par un voile vert pâle. Il ne faut pas oublier que les étudiants étaient ciblés, de même que les ONG et les mosquées.»

Elle accuse Israël et l'Autorité palestinienne d'avoir livré une guerre au mouvement. Le Hamas, considéré comme un groupe terroriste par la plupart des pays occidentaux, ne reconnaît pas l'État hébreu et a appelé à sa destruction. En prenant le pouvoir dans la bande de Gaza en 2007, le mouvement islamiste s'est aussi aliéné le Fatah, parti rival du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Les deux partis rivaux ont conclu une entente de réconciliation en mai dernier, mais tardent à mettre sur pied un gouvernement de transition et à fixer une date pour la tenue d'élections. Mahmoud Abbas devait rencontrer le chef politique du Hamas Khaled Meshaal aujourd'hui au Caire pour discuter de la question.

En attendant, le Hamas, déjà populaire à Hébron, ville la plus populeuse de Cisjordanie, connaît un nouveau souffle depuis la libération en octobre de centaine de prisonniers en échange du soldat israélien Gilad Shalit, qui était détenu depuis plus de quatre ans par le groupe dans la bande de Gaza.

«Après la libération des prisonniers, une barrière de peur a été brisée, soutient Lama Khater. Les gens sont sortis dans les rues, en osant transporter des drapeaux du Hamas. Les rafles de l'Autorité palestinienne ont aussi diminué.»

Le vice-directeur du bureau régional du Fatah à Hébron admet que son parti a du mal à concurrencer avec les factions islamistes, dans une ville connue pour son conservatisme religieux. Mais il balaie les accusations dirigées contre l'Autorité palestinienne et le Fatah de vouloir étouffer le Hamas.

«Le Hamas n'a pas été tué par l'Autorité palestinienne, dit Lafi Ghait. Mais le Hamas doit adhérer à la loi. Il ne peut y avoir deux autorités différentes. Même si nous sommes contre les arrestations politiques.»

Il croit aussi que les moyens dont dispose le Hamas contribuent à sa popularité. «Nous (le Fatah) essayons d'aider tout le monde, souligne-t-il. Mais malheureusement, nous ne disposons pas des mêmes ressources financières que le Hamas.»

Mais le Hamas n'est pas le seul groupe à bénéficier d'un large soutien à Hébron, et certains croient que le Parti de libération islamique est encore plus populaire. Ce mouvement, considéré comme radical, est présent dans plusieurs pays et prône un retour du califat dans les nations musulmanes. Même si le groupe s'oppose officiellement à la lutte armée, il s'est prononcé contre l'existence d'Israël et est hostile à l'Autorité palestinienne, qu'il ne reconnaît pas.

«La libération des prisonniers a aidé le Hamas dans la ville d'Hébron, mais le printemps arabe et la victoire des peuples arabes dans la région ont aussi aidé le Parti de libération islamique», croit Mohammed Dana, analyste à Radio-Hébron.

Même si le Parti de libération islamique refuse de se présenter aux élections, il prédit une victoire d'un parti islamiste à Hébron si un scrutin avait lieu prochainement, à tous les niveaux.