L'hélicoptère américain rempli de forces spéciales qui s'est écrasé samedi en Afghanistan a été abattu par un tir de roquette dans un piège tendu par les talibans selon une source gouvernementale afghane, le Pentagone se contentant d'évoquer un «incident exceptionnel».

Les 38 occupants du Chinook, un hélicoptère lourd de transport relativement lent, ont été tués. Celui-ci transportait 30 Américains --25 membres des forces spéciales et cinq membres d'équipage--, sept membres des forces spéciales afghanes et un traducteur civil, selon la force de l'OTAN en Afghanistan.

Selon un responsable gouvernemental afghan s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, l'hélicoptère est tombé dans un piège tendu par les talibans, une affirmation qualifiée de «spéculation» tant que l'enquête n'aura pas été diligentée, selon le porte-parole du Pentagone, le colonel David Lapan.

Ce crash est l'incident le plus meurtrier pour la coalition occidentale depuis le début du conflit afghan il y a bientôt dix ans. Il porte un coup terrible aux forces spéciales américaines, placées au coeur de la stratégie des Etats-Unis en Afghanistan, où elles mènent chaque nuit de nombreux raids.

La plupart des victimes sont des Navy Seals provenant de la même unité d'élite qui a éliminé Oussama Ben Laden début mai au Pakistan.

L'OTAN et le Pentagone ont reconnu lundi que l'appareil avait vraisemblablement été abattu par un tir de roquette RPG, même si une enquête doit déterminer les circonstances exactes du drame.

La coalition a expliqué dans un communiqué que des troupes au sol qui venaient d'entamer une opération de recherche d'un chef taliban local dans la vallée de Tangi, dans la province du Wardak (centre), avaient été prises à partie par des insurgés et conduites à appeler des renforts.

«Ces renforts arrivaient sur la zone quand le (hélicoptère) CH-47 s'est écrasé, tuant tous les membres à bord», affirme l'Otan, qui a évoqué la possibilité que l'appareil «ait été touché par une roquette tirée par des insurgés».

«A ce stade, on pense que c'est un RPG», une roquette qui a frappé l'appareil, a également convenu le colonel Lapan.

«Ces choses font partie du combat, nous subissons des pertes, les talibans subissent des pertes. Cet incident isolé ne constitue aucunement un tournant ou une tendance», a-t-il soutenu.

Pour Jeffrey Dressler, un analyste de l'Institut pour l'étude de la guerre, un centre de réflexion de Washington, ce n'est rien de plus qu'un «coup de chance» des insurgés.

Le drame ne change rien à l'engagement américain en Afghanistan, ont réaffirmé le président Barack Obama et le secrétaire à la Défense Leon Panetta.   «Nous allons continuer et réussir», a promis M. Obama dans une allocution à la Maison Blanche tandis que M. Panetta a évoqué la «détermination inflexible» des États-Unis.

Des missiles anti-aériens Stinger avaient bien été livrés aux Moudjahidine dans les années 1980 mais les talibans, qui ont affirmé dès samedi avoir abattu l'hélicoptère, ne sont pas réputés pour posséder de l'armement anti-aérien bien qu'ils aient déjà réussi à abattre des hélicoptères grâce à des lance-roquettes antichars.

Les Américains disposent de centaines d'hélicoptères en Afghanistan. Avant cet incident, ils avaient perdu 149 hommes dans des chutes d'hélicoptères, dont 38 à la suite de tirs ennemis, en 10 ans de conflit dans le pays selon le Pentagone.

Selon le responsable afghan sous couvert d'anonymat, l'hélicoptère «est tombé dans un piège tendu par un chef local des talibans, Qari Tahir».

Qari Tahir «a donné de fausses informations aux Américains, en leur disant qu'il y avait une réunion de huit insurgés talibans dans un complexe de maisons. Il savait quel itinéraire suivraient les hélicoptères et a pris position avec ses hommes de chaque côté de la vallée», a expliqué cette source à l'AFP.

L'appareil, qui a été abattu alors qu'il arrivait sur place, avait été appelé en renfort par les troupes américaines qui avaient donné l'assaut au complexe et s'étaient retrouvées confrontées à une trentaine de talibans, et non huit comme l'indiquait le faux renseignement, selon cette source.

La source gouvernementale afghane a également soutenu qu'«au moins quatre ressortissants pakistanais» dont elle pense «qu'ils appartiennent à l'ISI», les services secrets pakistanais, avaient participé à l'attaque aux côtés des insurgés. Kaboul accuse régulièrement l'ISI de soutenir les rebelles.

Les dépouilles doivent être rapatriées mardi aux États-Unis sur la base aérienne de Dover, au Delaware, où attendront les familles, en dehors de la présence des médias.