Trois anciens insurgés ont gravi avec fracas les marches du palais du gouverneur de Kandahar, dimanche, à la recherche d'un représentant pour se plaindre du programme de réconciliation afghan.

Lorsqu'ils étaient des combattants, ces trois hommes tourmentaient les forces alliées. Maintenant, ils sont un cauchemar pour un gouvernement dysfonctionnel qui peine à satisfaire une vague d'insurgés ayant renoncé aux armes.

Le trio semblait sortir de nulle part et a encerclé le maire de Kandahar, qui quittait alors le palais.

Le mollah Azizullah, un religieux qui fabriquait des bombes, a entraîné Ghulam Hayder Hamidi sur le côté pour lui faire part de ses doléances.

M. Azizullah, qui vit depuis près de huit mois dans une maison secrète à Kandahar avec 14 autres anciens insurgés, soutient que le gouvernement afghan a, au cours de la fin de semaine, mis un terme sans avertissement aux allocations qu'il versait pour acheter de la nourriture.

«Si je n'ai pas de nourriture, comment puis-je demander à d'autres de se tourner vers le programme de réconciliation?» a demandé M. Azizullah, qui a affirmé avoir parlé à environ 200 combattants actifs dans le sud de l'Afghanistan, qui se disent prêts à déposer leurs armes.

«Vous ne nous donnez d'autre choix que de nous joindre de nouveau aux talibans.»

L'ancien insurgé a assuré qu'il ne s'agissait pas d'une fausse menace. Cependant, des officiers croient qu'en retournant chez les insurgés, M. Azizullah signerait son propre ordre d'exécution.

Cette année, quelque 5000 talibans ont accepté de déposer leurs armes, un ralliement qui pourrait indiquer que la stratégie contre-insurrectionnelle de l'OTAN a commencé à porter ses fruits.

Mais gagner la guerre et gagner la paix sont deux victoires tout à fait distinctes.

Le programme de réconciliation du gouvernement afghan manque lamentablement d'argent et croule sous le poids de la bureaucratie.

Les insurgés qui acceptent de renoncer à leur lutte pour des promesses d'amnistie, d'argent et de nouveau départ avec un nouvel emploi sont souvent très vite désillusionnés.

Âgé de 23 ans, Graan, qui vivait avec une arme à ses côtés, s'est rendu avec M. Azizullah. Il dit qu'ils ont reçu un versement forfaitaire qui devait leur servir jusqu'à l'automne.

«Je suis prêt à retourner (aux côtés des talibans), a-t-il assuré. Au moins, nous aurions à manger.»

Howard Coombs, le conseiller spécial du commandant de la force opérationnelle canadienne, a expliqué que l'OTAN se trouvait à un point tournant à Kandahar, où les opérations militaires entreprises l'été dernier ont permis de considérablement réduire la capacité de frappe des talibans.

«En ce moment, nous sommes assurément à la croisée des chemins, a-t-il affirmé. Plus il y aura de gens pour la réintégration et la réconciliation, mieux ce sera.»

Le programme de réconciliation a le potentiel pour éliminer progressivement le conflit, au moment même où le Canada s'apprête à abandonner les missions de combat et où les États-Unis examinent les différentes possibilités pour retirer des troupes.