Après plus de huit mois d'impasse politique, le premier ministre irakien Nouri al-Maliki a officiellement accepté jeudi de former le prochain gouvernement, à la demande du président Jalal Talabani.

D'entrée, le premier ministre irakien a appelé à l'unité l'ensemble des factions politiques, après l'accord péniblement conclu pour mettre un terme à l'incertitude qui régnait depuis les législatives du 7 mars.

«Je sais et vous savez bien que la responsabilité que j'endosse n'est pas une tâche facile, particulièrement dans les circonstances actuelles que traverse notre pays», a souligné Nouri al-Maliki. Il dispose de trente jours pour former son équipe gouvernementale destinée à rester au pouvoir jusqu'au départ des forces américaines.

Ce gouvernement doit inclure toutes les grandes composantes des factions irakiennes, dont les Kurdes, les partis politiques chiites et l'alliance soutenue par la minorité sunnite, qui estimait que le pouvoir devait lui revenir.

Or cette coalition, Iraqiya, de l'ancien premier ministre Iyad Allaoui, avait obtenu 91 sièges aux législatives de mars, contre 89 pour celle de Nouri al-Maliki. En dépit de sa courte avance numérique, Iraqiya n'a pas réussi à trouver de partenaires pour s'assurer la majorité parlementaire de 163 sièges.

Personnalité politique controversée sortie de l'ombre pour diriger le gouvernement en 2006, le chiite Nouri al-Maliki a appelé les Irakiens et les représentants de la classe politique à le soutenir et à agir «pour surmonter toutes les divergences».

«J'en appelle au grand peuple d'Irak dans toutes ses composantes religieuses et ethniques, et j'appelle mes frères politiciens à travailler pour surmonter toutes les différences et mettre nos divergences derrière nous», a-t-il ajouté.

Au cours d'une interview à l'AP, l'ambassadeur américain en Irak James Jeffrey a souligné qu'al-Maliki avait «une longue liste de tâches» pour les 30 jours à venir, notamment pour former un gouvernement qui devrait être approuvé par une majorité parlementaire. «Il est en position de force, mais ce n'est pas fini et ce sont les 325 parlementaires qui auront le dernier mot».

Un accord de partage de pouvoir a fini par être conclu dans la nuit du 10 au 11 novembre dernier, débloquant la situation. Le chiite Nouri al-Maliki est resté premier ministre, le Kurde Jalal Talabani a été élu président, la coalition d'Iyad Allaoui soutenue par la minorité sunnite devant se contenter de la présidence du Parlement.

La demande formulée par Jalal Talabani jeudi était largement une formalité: il avait déjà demandé publiquement à Nouri al-Maliki de former le prochain gouvernement, au moment de son élection. Jalal Talabani disposait de 15 jours pour présenter officiellement sa requête, ce qui a donné plus de temps au premier ministre pour se préparer.

Cependant, al-Maliki doit attribuer des rôles substantiels pour chacune des factions au risque de les voir quitter son gouvernement, ce qui pourrait déstabiliser la fragile et jeune démocratie irakienne. Pendant que les pourparlers politiques s'enlisaient, la violence a resurgi et les difficultés économiques perdurent.

Les postes qu'al-Maliki va attribuer au parti concurrent Iraqiya d'Iyad Allaoui vont être très observés: si les sunnites, minoritaires dans la population, pensent qu'ils sont écartés des ministères-clé et donc d'un rôle majeur dans le gouvernement, la violence entre sunnites et chiites pourrait resurgir.

Bien qu'Allaoui soit chiite, sa coalition à majorité sunnite ne bénéficie pas d'une bonne opinion dans la classe politique irakienne qui entretient toujours du ressentiment contre les sunnites, qui ont dirigé le pays sous Saddam Hussein, et craint leur retour au pouvoir.