Les bras tatoués de signes religieux, le soldat Joshua Joe embarque dans le cockpit de son Husky, perché à plus de 2 mètres du sol. Sa mission est simple: trouver les bombes cachées sur les routes du Sud afghan avant qu'elles ne sautent sous son convoi.

Muni d'un sonar pour sonder le sol et d'un bras mécanique pour creuser, le Husky est le véhicule de tête du convoi, chargé de déminer les routes, que les talibans ont truffées de leur arme de prédilection: les bombes artisanales, fatales à près de 80% des soldats étrangers tués en Afghanistan.

«Le véhicule est fait pour essuyer des explosions, et l'armée ne trouve guère de gens pour les conduire», explique le soldat première classe Joe.

Les ingénieurs «antibombes» de la 174 Mobility augmentation Company (Mac) de la garde nationale américaine, basés en Caroline du sud, opèrent dans ce que le commandant de la Task force Thor, le major Robert Moore, considère comme «le champ de bataille le plus intense» d'Afghanistan, le sud de Kandahar.

La province, qui abrite la ville éponyme, ancienne capitale du régime des talibans (1996-2001), est l'un des principaux bastions de leur insurrection qui n'a cessé de s'étendre ces dernières années, infligeant des pertes de plus en plus lourdes aux quelque 150 000 soldats étrangers déployés dans le pays.

«Depuis janvier, nous avons trouvé 175 bombes et avons été frappés par 75. Et nous avons été victimes de 75 embuscades en 20 jours», explique le major Moore. «Cela leur prend 30 minutes pour poser une bombe efficace. Ils le font depuis 30 ans, certains ont grandi en le faisant», dit-il à propos des insurgés.

«Je ne peux pas trouver toutes les bombes», reconnaît le première classe Joe. «Un jour, j'étais mal car j'avais peur d'en avoir laissé une sur la route. Mais mon véhicule aurait sauté si j'y étais retourné», explique-t-il.

Dans cette unité de réservistes servent aussi les Husband père et fils, Chandler, 46 ans, et son fils CJ, 22 ans.

«Je devais aller en Irak mais j'ai demandé à être envoyé en Afghanistan, car ma femme Tracey s'inquiétait de savoir notre fils là-bas et m'a dit qu'elle se sentirait mieux si j'y allais avec lui», raconte Chandler Husband.

«Mais maintenant que je patrouille dans la même unité que CJ, elle s'inquiète encore plus», sourit le grand homme maigre, lunettes rondes et moustache épaisse.

«C'est bon d'avoir son père avec soi ici. J'ai quelqu'un à qui parler, quelqu'un à qui je peux faire confiance», reconnaît CJ. «C'est ma première mission. On passe notre journée à chercher des bombes, c'est très stressant. Mais on est juste deux hommes en uniforme, il n'y a plus ni père ni fils».

«C'est dur de réprimer mon sentiment paternel mais je dois le faire», explique Chandler senior, adossé à son blindé, son holster en bandoulière.

«Sauter sur une bombe, j'y pense tout le temps», admet Joshua Joe avant de prendre la route. «Je prie avant, pendant et après la mission. Ce boulot m'a fait devenir très croyant», ajoute-t-il en montrant fièrement ses tatouages, dont le texte entier du «Notre Père» inscrit sur son avant-bras droit et une croix en souvenir de sa grand-mère sur le bras gauche.

«Je ne suis pas suicidaire. Je dois juste trouver les bombes avant qu'elles ne nous trouvent», résume-t-il.

«La bombe artisanale est une arme terrible», dit le major Moore. «Nous trouvons et détruisons en moyenne un tiers de celles qui sont posées».

«Vous ne pouvez pas les voir, ni les combattre. Elles sont les chasseurs furtifs des pauvres», précise un officier de l'OTAN sur la base de Kandahar.

«C'est mon second déploiement ici mais, après, c'est fini», dit Joe alors que son véhicule s'avance en tête du convoi pour une nouvelle patrouille le long de la rivière Arghandab, une zone truffée de bombes.

Photo: AFP

Joshua Joe, démineur en Afghanistan.