Les agents de la circulation, jusqu'à présent relativement épargnés, sont devenus depuis deux semaines la cible d'Al-Qaïda à Bagdad, et ces attaques créent des embouteillages effroyables.

Lundi, une bombe qui visait le siège de la police chargée du trafic à Ghazaliya, dans l'ouest de la capitale, a tué un membre de cette unité et un passant, alors que dix autres personnes, dont sept policiers, ont été blessées.

Ces incidents surviennent à trois semaines de la date fixée pour achever la réduction drastique de la présence militaire américaine. Au 1er septembre, il ne restera plus que 50.000 soldats, et tous auront quitté l'Irak fin 2011.

Depuis le début du mois, au moins cinq policiers de la circulation ont péri et 27 ont été blessés dans des attaques. «La stratégie des terroristes est écoeurante, car nous rendons service à la population en régulant le trafic», a affirmé le lieutenant Ahmad Ali, qui gère le flot de voitures au carrefour Karama, dans le centre de Bagdad.

«Ces attaques sont menées par Al-Qaïda qui s'en prend à tous ceux qui représentent l'État avec l'intention de le faire tomber», a ajouté ce père de deux jeunes filles.

Alors que depuis l'invasion conduite par les États-Unis en 2003, près de 10 000 policiers et soldats ont été tués par les insurgés sunnites qui les considèrent comme des «suppôts» de l'occupation et du pouvoir dirigé par les chiites, les agents de la circulation avaient été jusqu'à présent ménagés.

D'ailleurs, contrairement à leurs collègues, ils ne portent ni gilet pare-balles, ni casque et ne sont armés que de pistolet.

Ces tirs et explosions contre eux ont un effet désastreux sur la circulation déjà chaotique en temps normal.

Ainsi, les journalistes de l'AFP ont noté que ces policiers, régulant d'ordinaire le trafic et verbalisant les chauffeurs qui ne sont pas en règle, ne sont plus au carrefour mais cachés derrière des murs de protection ou agglutinés près des points de contrôle de la police et de l'armée.

Certains d'entre eux se sont armés ces derniers jours de kalachnikovs comme au pire moment de la guerre confessionnelle, quand Al-Qaïda contrôlait une partie de la capitale.

Interrogé sur la possibilité qu'ils soient la cible d'une nouvelle campagne des insurgés, le commandant de l'armée de terre, le général Ali Gheidan a indiqué lundi lors d'une conférence de presse: «Comme la majorité d'entre eux ne sont pas armés, ils sont des cibles faciles pour les terroristes».

«De 2005 à 2008, ils étaient armés mais après la stabilisation du pays, nous les avons autorisés à ne porter qu'une arme de poing. Aujourd'hui nous pensons les armer à nouveau avec des pistolets-mitrailleurs», a-t-il ajouté.

Ces simples policiers, qui gagnent mensuellement environ 650.000 dinars (550 dollars), ont été les témoins de toutes les convulsions de ce pays.

Ce sont les seuls agents d'autorité qui portent le même vêtement bleu et blanc qu'à l'époque de Saddam Hussein, mais dans les quatre années qui ont suivi l'invasion, la majorité d'entre eux n'avaient pas d'uniformes et faisait leur travail avec des habits dépareillés.

Beaucoup se cachaient le visage et jusqu'en 2008, aucun d'eux n'osait sermonner un automobiliste ayant commis une infraction.

«Ces policiers restent sous le soleil du matin au soir pour réguler la circulation. Les prendre pour cible est criminel et inhumain», a affirmé Razak Mehdi, un fonctionnaire de 58 ans à la retraite.

Le premier ministre sortant Nouri al-Maliki, qui se bat pour obtenir un second mandat, nie que la situation sécuritaire ait empiré. «Il y a seulement quelque failles de temps à autre, ici et là, mais les groupes armés ne pourront pas faire revenir le pays en arrière», a-t-il dit dimanche à Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan, faisant allusion aux années de sang de 2006 et 2007.