Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a annoncé dimanche qu'il s'opposerait à l'adoption d'un projet de loi qui accorderait aux rabbins orthodoxes un plus grand contrôle sur les conversions sur le territoire israélien.

Cette proposition, qui a ranimé un vieux débat sur l'identité juive et la conversion, s'était attirée les foudres de groupes progressifs de juifs expatriés, dont le soutien est essentiel pour Israël.

La semaine dernière, un comité parlementaire israélien avait donné son accord préliminaire à ce projet de loi.

Israël ne reconnaît que partiellement les conversions effectuées par des rabbins non-orthodoxes sur son sol. Pourtant, la même conversion, effectuée à l'étranger, est pleinement reconnue par les autorités de l'État juif et donne automatiquement accès à la citoyenneté israélienne. Le projet de loi proposé donnerait au grand rabbin d'Israël toute autorité juridique concernant les dossiers de conversion.

M. Nétanyahou a affirmé à son cabinet, dimanche, qu'il craignait que cette loi puisse créer une fissure dans le monde juif. Il a aussi mentionné que si un compromis ne pouvait pas être trouvé, il devra demander à ses partenaires de coalition de rejeter cette mesure législative. Celle-ci devra être approuvée à l'occasion de trois votes distincts à la Knesset avant de devenir loi.

Ce sont les immigrants convertis à l'étranger qui pourraient être les plus touchés par ce changement. Ceux-ci pourraient voir la citoyenneté israélienne leur être refusée.

Le projet de loi atteint des cordes particulièrement sensibles pour les courants conservateurs. Ces deux mouvances du judaïsme sont très présentes à l'étranger, mais marginales en Israël où les rabbins orthodoxes dominent la pratique religieuse.

Même s'ils demeurent des fervents partisans d'Israël, les courants conservateurs craignent l'augmentation du pouvoir de l'establishment orthodoxe dans l'État juif. Ils affirment notamment que le projet de loi pourrait porter atteinte à tous les rabbins non-orthodoxes à travers le monde.

Le directeur d'un centre d'action religieux juif situé à Washington, le rabbin David Saperstein, a affirmé que la proposition, si elle était adoptée, créerait «une crise de premier plan».

«Ce serait une attaque énorme contre l'unité des Juifs et le principe de liberté religieuse en Israël», a soutenu le rabbin, qui s'est rendu à Israël pour s'opposer au projet de loi. «La communauté juive des États-Unis demeurera très impliquée en Israël, mais l'adoption de ce projet de loi enverra un message de rejet de nos rabbins et de notre mouvement de la part d'Israël. Cela rendra notre travail beaucoup plus difficile.»

Sur les 13 millions de Juifs dans le monde, environ la moitié habite en Israël. La plus grande partie des autres est concentrée en Amérique du Nord.

Le scepticisme des autorités israéliennes concernant la crédibilité des conversions effectuées à l'étranger serait l'une des principales causes des conflits grandissant entre Israël et le reste du monde juif.

Le directeur d'un organisme qui aide les israéliens à naviguer dans la bureaucratie religieuse, le rabbin orthodoxe Seth Farber, a affirmé être en faveur de la réforme des conversions. Toutefois, la relation entre Israël et sa diaspora serait, selon lui, encore plus importante.

«Nous devons trouver une méthode pour solutionner ce problème sans créer trop de conséquences. Il ne faut pas s'aliéner 85 pour cent des Juifs américains.», a-t-il commenté.

Le projet de loi a aussi fait réagir un groupe de sénateurs américains de confession juive, qui ont fait parvenir une lettre de protestation à l'ambassadeur d'Israël, aux États-Unis, selon le Jerusalem Post.