L'armée américaine a remis jeudi aux autorités irakiennes son dernier centre de détention de prisonniers, Camp Cropper, près de l'aéroport de Bagdad, mettant fin à l'un des aspects les plus controversés de son occupation de l'Irak.

Ce transfert, qui s'inscrit dans le cadre du retrait du contingent américain, a été présenté par l'armée comme une «étape monumentale» dans le processus de stabilisation de l'Irak, six ans après le scandale des sévices commis par des militaires américains dans la sinistre prison d'Abou Ghraïb.

«C'est le début d'une nouvelle ère», a déclaré le général Jerry Cannon, responsable adjoint des opérations américaines de détention en Irak.

Une ère où «tous les éléments du système judiciaire irakien sont capables de remplir leur rôle pour assurer la sécurité des Irakiens», a-t-il assuré devant un parterre d'une centaine de responsables irakiens et américains invités à une cérémonie dans un hangar de Camp Cropper.

Peu après, le général Cannon a symboliquement remis au ministre irakien de la Justice, Dara Noureddine Dara, une énorme clé aux couleurs du drapeau irakien pour marquer la passation de pouvoir.

Camp Cropper avait été ouvert immédiatement après l'invasion du pays en 2003, dans le but d'enfermer les dignitaires de l'ancien régime. Son plus célèbre prisonnier fut l'ex-dictateur Saddam Hussein, qui y séjourna pendant trois ans jusqu'à son exécution en décembre 2006.

Mais avec la montée des violences, Camp Cropper a rapidement été agrandi pour accueillir des dizaines de milliers de prisonniers soupçonnés de commettre des attentats contre les forces américaines et irakiennes ou d'être impliqués dans la guerre entre chiites et sunnites. Le pic avait été atteint à la mi-2007 avec 26 000 détenus.

Les forces américaines, qui doivent avoir quitté l'Irak à la fin 2011, ont progressivement transféré leurs prisonniers aux autorités irakiennes, dans un processus présenté comme une autre illustration de la stabilisation du pays.

«Le succès ne se mesure pas seulement à l'aune des gains en matière de sécurité, mais il est également fonction des aptitudes des ministères» irakiens, a déclaré jeudi le général Cannon.

Outre le centre de détention, décrit par le général comme un établissement «moderne, fonctionnel et bien construit», l'Irak a également reçu la garde d'environ 1 500 de ses détenus.

Dara Noureddine Dara a fait part de sa volonté de faire de Camp Cropper, rebaptisé «Prison al-Karkh», un centre de détention modèle.

«L'époque des mauvais traitements et des sévices est révolue. Nous enquêterons et limogerons quiconque commettra un acte répréhensible», a promis le ministre.

«J'espère que le soutien américain se poursuivra pour que nos prisons égalent les prisons américaines pour ce qui est de l'attention et du respect de l'être humain», a-t-il dit.

L'armée américaine a toutefois conservé «à la demande du gouvernement irakien» la surveillance de 200 prisonniers dans un secteur ultrasécurisé, parmi lesquels huit anciens hauts-dirigeants de l'ancien régime, dont deux demi-frères de Saddam Hussein.

Interrogé par les journalistes, Dara Noureddine Dara n'a donné aucune explication au maintien de détenus sous surveillance américaine.

Mercredi, l'ancien vice-premier ministre irakien Tarek Aziz avait été, lui, transféré dans une prison irakienne avec 25 autres dignitaires de l'ancien régime, suscitant des craintes de l'avocat de M. Aziz sur la santé et la sécurité de ce dernier.

Ce transfert tourne l'un des pages les plus sombres de l'occupation américaine, l'armée ayant été mainte fois critiquée par les organisations de défense de droits de l'Homme pour maintenir en détention des prisonniers sans jugement.