L'organe des Nations unies responsable d'aider les réfugiés palestiniens au Moyen-Orient est en crise. Son directeur au Liban craint le pire si l'organisme devait sabrer les programmes d'aide à la population. Déjà, la semaine dernière, des Palestiniens du camp de Nahr el Bared, détruit en 2007 lors d'affrontements armés, ont fait entendre leurs voix. Et ce n'est pas la dernière fois, promettent-ils.

Trois ans jour pour jour après les combats qui ont détruit le camp palestinien de Nahr el Bared, des dizaines de personnes ont manifesté pour dénoncer les conditions de vie des réfugiés. La manifestation principale a eu lieu la semaine dernière devant les bureaux de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA) à Beyrouth. D'autres rassemblements étaient prévus simultanément dans les 12 camps palestiniens du Liban.

 

«Les manifestations ont commencé jeudi et sont prévues pour trois jours, mais nous allons continuer jusqu'à ce que nos voix soient entendues», assure Milad Gharib, militant originaire de Nahr el Bared, rencontré sur place. Déjà, une coalition d'organismes a annoncé l'organisation d'une grande marche à la fin juin dans plusieurs villes du pays pour défendre les droits des Palestiniens au Liban.

Les quelque 27 000 réfugiés évacués de Nahr el Bared, dans le nord du pays, n'ont toujours pas regagné le camp, détruit par les affrontements entre l'armée libanaise et le groupe terroriste Fatah el Islam en 2007. L'armée contrôle toujours l'accès à Nahr el Bared, au grand dam de la population. Traditionnellement, le Liban ne s'ingère pas dans les affaires des camps palestiniens sur son territoire.

Il manque toujours 209 millions de dollars à l'UNRWA pour reconstruire la totalité des bâtiments. Quelque 2500 personnes pourraient retourner vivre dans le camp d'ici la fin de l'année. Les autres continueront de s'entasser dans le camp voisin de Beddawi ou dans des appartements environnants.

L'UNRWA craint l'escalade des tensions si les conditions ne changent pas.

«Les gens souffrent. Ils sont en colère. Envoyer un message de non-assistance va se tourner contre nous tous», estime le directeur de l'UNRWA au Liban, Salvatore Lombardo.

L'UNRWA traverse une crise financière de grande envergure. «Nous avons un besoin général de 140 millions de dollars pour l'année. Si nous n'obtenons pas 90 millions au minimum, nous devrons réduire les dépenses», précise M. Lombardo.

Trois choix s'imposeront alors à l'organisme: licencier du personnel, sabrer les services ou l'aide à la population, au Liban, en Cisjordanie, dans la bande de Gaza, en Jordanie et en Syrie. «Au Liban, ce serait une source de désordre civil important. Les gens n'ont plus rien à perdre», craint-il.

Aide du Canada

Le principal donateur de l'UNRWA est la Commission européenne. La crise en Europe touche beaucoup l'organisme, qui anticipe la baisse des dons. Et la dévaluation de l'euro pèse lourd sur les budgets de l'UNRWA, calculés en dollars.

«Il y a aussi des pays qui donnaient beaucoup et qui ont arrêté. Le Canada est un cas d'espèce. Avant, il nous donnait de 10 à 15 millions par année. Mais l'an passé, il s'est mis à contribuer seulement dans des programmes spécifiques», précise M. Lombardo, tout en saluant un don récent du Canada pour la reconstruction de Nahr el Bared.

Cette stratégie fait partie de la nouvelle orientation du gouvernement conservateur de cibler des points précis pour ses dons, comme la justice, l'aide alimentaire et les services aux enfants.

«C'est sûr qu'on préfère que les gens ne donnent pas sur un aspect spécifique. Ça nous donne plus de flexibilité. On est quand même ravi de recevoir l'argent», note M. Lombardo.

* * *

 

Réfugiés palestiniens au Liban

> Environ 422 000 réfugiés (quelque 10% de la population libanaise)

> 12 camps

> Plusieurs professions leur sont refusées, notamment la médecine ou le droit

> Ils n'ont pas le droit d'être propriétaires