Le début lundi d'un décompte controversé des voix à Bagdad et l'invalidation attendue cette semaine d'élus soupçonnés de liens avec le parti Baas risque de replonger l'Irak dans une zone de turbulences.

«Nous allons revoir aujourd'hui 600 urnes et passer à 800 les prochains jours si tout se passe bien. Nous pensons terminer le décompte des 11 000 urnes d'ici 11 à 15 jours», a affirmé un responsable de la commission électorale Qassem al-Abboudi.

Les urnes ont été disposées sur des tables dans deux salles d'un grand hôtel de la «zone verte», secteur ultra-protégé de la capitale irakienne où 312 personnes ont été désignées pour ce recomptage.

Des observateurs de l'Union européenne, des Nations unies, de l'ambassade des États-Unis et de la Ligue arabe sont présents, selon un journaliste de l'AFP sur place.

«Le décompte a commencé ce matin et se fait de manière très professionnelle. Les électeurs ont ainsi une nouvelle assurance que leur vote sera respecté. Il est important aussi que les plaintes déposées soient prises en compte», a affirmé à la presse le représentant de l'ONU en Irak Ad Melkert.

«Nous espérons que les résultats définitifs soient publiés le plus tôt possible mais nous demandons aussi à chacun d'être patient car, au lieu de se presser, il est préférable d'avoir un processus minutieux», a-t-il dit.

Dès l'ouverture, une polémique a éclaté entre la liste de l'État de droit du premier ministre Nouri al-Maliki et la commission électorale.

Cette liste estime qu'il y a eu des bourrages d'urnes lors des législatives du 7 mars. «Nous voulons d'abord comparer les listes des votants et le nombre de bulletins dans les urnes», a affirmé le ministre du Pétrole Hussein Chahristani. «Nous possédons des informations faisant état de l'introduction de faux bulletins dans les urnes», a-t-il souligné.

En revanche, le président de la commission électorale Faraj al-Haïdari a estimé que la requête de l'État de droit «prendrait trop de temps» et a souhaité que ce rapprochement ne se fasse que dans les cas litigieux. Il a indiqué attendre la décision de trois magistrats pour savoir s'il devait changer la manière de procéder.

Ce sont ces trois juges qui, le 19 avril à la demande de M. Maliki, avaient accepté un nouveau décompte manuel dans la province de Bagdad, la plus importante du pays puisqu'elle doit répartir 70 sièges sur les 325 que compte le Parlement.

La liste du chef du gouvernement a obtenu 26 sièges et le Bloc irakien de son rival laïque Iyad Allawi 24. L'Alliance nationale irakienne (ANI), qui regroupe deux formations chiites conservatrices, a recueilli 17 sièges et un siège est revenu au Front de la Concorde (sunnite). Les deux derniers sièges reviennent aux minorités religieuses.

En plus de ce décompte controversé, la commission juridique doit se prononcer cette semaine sur le cas de neuf élus, dont sept du Bloc Irakien, soupçonnés d'avoir appartenu au parti de l'ex-président Saddam Hussein, ce qui est un vice rédhibitoire pour tout postulant au Parlement.

Déjà, la semaine dernière, ces magistrats avaient invalidé 52 candidats, dont 22 appartenant au Bloc irakien et parmi eux un seul élu.

Cette élimination politique est menée par le Comité Responsabilité et Justice, mis en place en 2006 et chargé d'identifier les candidats liés à l'ancien parti Baas. Or, son président Ahmad Chalabi et son directeur général Ali al-Lami ont été candidats sur la liste de l'ANI.

Ces invalidations peuvent priver le Bloc irakien de sa victoire, les voix obtenues par des candidats éliminés étant annulées, ce qui peut entraîner une redistribution des sièges car il s'agit d'un scrutin proportionnel.

La liste d'Iyad Allawi est arrivée en tête avec 91 sièges, contre 89 pour celle du premier ministre Nouri al-Maliki et 70 à l'ANI et 43 à l'Alliance kurde.