Le premier ministre irakien sortant Nouri al-Maliki est arrivé en tête aux élections législatives de dimanche, selon les premières estimations, mais il lui sera difficile de trouver une majorité pour se maintenir comme chef du gouvernement futur, estiment les experts.

D'après des résultats obtenus lundi par l'AFP auprès des responsables locaux, l'Alliance de l'État de droit (AED) de M. Maliki arrive en tête dans les neuf provinces chiites du sud alors que le Bloc Irakien de l'ex-premier ministre Iyad Allawi domine très largement dans les quatre provinces majoritairement sunnites (Anbar, Salahedinne, Ninive et Diyala).

Il y a 119 sièges à pourvoir dans les provinces chiites contre 70 dans les régions sunnites.

«Je pense que nous avons obtenu un tiers des votes mais il nous est impossible de former un gouvernement sans l'appui d'autres mouvements», a confié à l'AFP un conseiller du premier ministre, Ali al-Moussawi.

La Commission électorale doit fournir des résultats partiels jeudi, les résultats complets le 18 et les résultats officiels, après examen des plaintes, fin mars.

En tout cas, la participation à ces deuxièmes élections législatives depuis la chute de Saddam Hussein a été très importante, selon les estimations obtenues par l'AFP. Des millions d'Irakiens ont bravé des obus et des bombes qui ont fait 38 morts et infligé un camouflet à Al-Qaeda qui avait menacé de mort quiconque participerait au scrutin.

La liste d'Iyad Allawi est arrivée en deuxième position dans trois gouvernorats chiites (Mouthanna, Babylone et Bassora). La coalition chiite rivale de celle de M. Maliki, l'Alliance Nationale Irakienne (ANI), qui regroupe le Conseil supérieur islamique d'Irak (CSII d'Ammar al-Hakim) et les partisans du chef radical Moqtada Sadr, arrive deuxième dans les six autres provinces chiites.

Chez les sunnites, l'AED arrive en seconde position à Diyala et est largement distancée dans les trois autres gouvernorats.

Dans la province de Kirkouk (12 sièges), que se disputent Kurdes et Arabes, l'Alliance Kurdistania, constituée des deux partis traditionnels, arrive en tête suivie du Bloc irakien, puis de l'AED. Les résultats de Bagdad (68 sièges) ne sont pas encore connus.

Kurdistania arrive également en tête dans les trois provinces kurdes où 41 sièges sont à répartir, suivie des contestataires du Goran (Changement) à Souleimaniyeh et Erbil.

Pour les experts, il serait étonnant que le premier ministre retrouve son poste. «M. Maliki aura du mal à être le prochain premier ministre car il lui manque une majorité suffisante et la plupart des autres partis n'en veulent pas», a commenté Hamid Fadel, professeur de sciences politiques à l'université de Bagdad.

«Ses relations avec les Kurdes ne sont pas bonnes, l'ANI l'accuse d'exercer un pouvoir personnel et les sunnites d'avoir relancé la politique de débassification qui les visent», a-t-il expliqué. Selon lui, le nouveau chef de gouvernement sera soit un autre membre de l'AED soit Iyad Allawi.

Ce sentiment est partagé par Aziz Jabbar, son collègue à l'université de Moustansariya de Bagdad. «Je ne crois pas que M. Maliki sera le nouveau premier ministre car il n'est pas accepté par les groupes politiques importants. Il lui aurait fallu avoir une avance beaucoup plus grande», a-t-il dit.

Les régions sunnites qui avaient boycotté le scrutin en 2005 ont voté d'avantage que les provinces chiites. Ainsi 70% des électeurs se sont rendus aux urnes dans les provinces de Diyala et Salaheddine, 61% dans la province d'Al-Anbar et 67% à Ninive.

Dans les régions chiites, le pourcentage varie entre 48% à Wassit à 64% à Mouthanna et tourne ailleurs autour de 55%. Dans la province de Kirkouk, 70% des électeurs ont voté alors que dans les régions kurdes, le taux est encore plus élevé.