Les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique du régime iranien, ont organisé l'enlèvement en 2007 en Irak d'un consultant informatique britannique, libéré mercredi, et de ses quatre gardes du corps, tués ou présumés morts, a affirmé jeudi le Guardian.

Une organisation radicale chiite irakienne, la Ligue des Vertueux, avait revendiqué l'enlèvement, mené lors d'un raid spectaculaire le 29 mai 2007 au ministère des Finances à Bagdad par une quarantaine d'hommes portant des uniformes de police.

Mais le Guardian, qui dit s'appuyer sur des «sources haut placées en Irak et en Iran», affirme avoir «découvert après une enquête approfondie» longue d'un an que les Gardiens de la Révolution avaient dirigé l'opération et emmené les cinq otages en Iran dans les 24 heures ayant suivi l'enlèvement.

«C'était un enlèvement iranien, dirigé par les Gardiens de la Révolution et mené par la Brigade Al-Qods», l'unité d'élite des Gardiens chargée des opérations à l'étranger, a affirmé au quotidien britannique un ex-Gardien de la Révolution, qui a requis l'anonymat.

Selon l'enquête du quotidien, M. Moore avait été enlevé parce qu'il était en train d'installer au ministère un système informatique de suivi qui aurait montré comment de vastes sommes d'aide internationale versées aux institutions irakiennes étaient détournées vers des milices irakiennes soutenues par l'Iran.

L'ex-Gardien a aussi indiqué au journal que les cinq hommes avaient été détenus dans deux camps, dont l'un connu sous le nom de Qasser Shiereen, proche de la frontière irakienne.

«Mon contact travaille pour Al-Qods. Il a pris part aux préparatifs du rapt et il a assisté à l'opération. Il m'a dit qu'ils avaient passé deux jours au camp Qasser Shiereen. Ensuite, ils les ont emmenés loin à l'intérieur du territoire iranien», a-t-il déclaré au Guardian.

Un ministre irakien a confirmé sous le couvert de l'anonymat ces assertions. «C'était une opération des Gardiens de la Révolution», a-t-il assuré, excluant que les milices chiites irakiennes soient capables d'organiser une telle opération.

Le commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan, le général David Petraeus, a pour sa part déclaré à la BBC être «certain à 90%» que les Britanniques avaient à un moment ou un autre été détenus en Iran.

Le correspondant de la BBC en charge des questions de sécurité, Frank Gardner, a indiqué jeudi sur la BBC radio Four, avoir posé la question en décembre à Bahreïn au général Petraeus, qui à l'époque de l'enlèvement était le commandant des forces de la coalition en Irak.

«Il n'a pas hésité», a-t-il rapporté. «Il a dit: +Je suis absolument certain. Je suis certain à 90%+.»

«Je lui ai demandé si c'était un point de vue personnel ou s'il avait vu des preuves, et il a réfléchi une minute puis dit: +Je suis assez sûr d'avoir vu des preuves de ça», a poursuivi le journaliste.

Le ministère britannique des Affaires étrangères a cependant indiqué au Guardian n'avoir «aucune preuve que les otages britanniques, dont Peter Moore, aient été détenus en Iran». «Nous ne pouvons dire avec certitude où ils ont été détenus durant chaque jour de leur captivité», a ajouté le Foreign Office.

L'armée américaine a remis au gouvernement irakien des membres détenus de la Ligue des Vertueux, a indiqué mercredi un porte-parole du gouvernement irakien, relançant les hypothèses sur un possible accord ayant abouti à la libération de M. Moore.

Les corps de deux des gardes du corps britanniques de M. Moore avaient été remis à la Grande-Bretagne en juin, suivi de celui d'un troisième en septembre. Le sort du quatrième est inconnu, mais Londres le tient pour mort.