L'Irak prenait mardi le contrôle total de ses villes et agglomérations six ans après l'invasion conduite par les Etats-Unis et les forces américaines se cantonneront désormais dans un rôle d'appui et de formation jusqu'à leur départ prévu fin 2011.

Mais cette passation de pouvoir a été endeuillée par la mort des suites de leurs blessures de quatre soldats américains lundi, à la veille du retrait des troupes américaines des villes conformément à l'accord bilatéral entre Bagdad et Washington.

Désormais ce sont les 500 000 policiers et 250 000 militaires irakiens qui prennent en charge la sécurité dans les localités.

A l'occasion de ce retrait, le Premier ministre Nouri al-Maliki a critiqué «l'offense faite aux Irakiens par les sceptiques qui ne croyaient pas en leur capacité de prendre en charge leur sécurité et par ceux qui martelaient que les forces étrangères ne se retireraient pas et garderaient des bases permanentes dans le pays».

 «Ces derniers prenaient ces faux prétextes pour justifier leur soit-disant opposition (au processus politique) et ont donné le feu vert aux terroristes pour tuer des civils», a-t-il dit lors d'une intervention télévisée.

Il a réitéré sa «demande à tous les pays arabes et islamiques d'avoir une position commune contre les fatwas (édits religieux) destructrices», dans une claire allusion au cheikh Adel al-Gilbani, mufti de la Mecque, qui avait déclaré début juin à la BBC: «les religieux chiites sont sans aucun doute des renégats».

Selon l'islam, il est permis de tuer un renégat et l'auteur du meurtre ne peut être poursuivi. Gouverné pendant 80 ans par les sunnites, l'Irak est dirigé par les chiites depuis la chute de Saddam Hussein en 2003.

Pour sa part, le président Jalal Talabani a rendu hommage aux forces américaines pour avoir renversé l'ancien dictateur.

«Ils ont bravé le danger pour combattre le plus cruel des régimes et notre ennemi mutuel: la terreur», a-t-il affirmé à la télévision. Une coalition militaire conduite par les Etats-Unis était intervenue au printemps 2003, renversant le régime du Baas au pouvoir depuis 1968.

Le gouvernement a décrété un jour férié pour l'occasion et dans les rues désertes des chars et des véhicules blindés de l'armée et de la police décorés de fleurs et de drapeaux ont pris position. Des hauts-parleurs diffusaient des chants patriotiques.

«Nous sommes heureux de prendre en charge la sécurité de la ville et nous sommes tout à fait capables de le faire», a affirmé un officier de police Ibrahim al-Machhadani. Il a toutefois estimé que les rues sont désertes car les gens ont peur d'attaques.

Ces dernières semaines ont été marquées par des attentats qui ont fait au moins 200 morts et M. al-Maliki a accusé les Takfiri (sunnites extrémistes) et les baassistes d'en être les auteurs.

 «J'aurais préféré un retrait total des troupes américaines mais ce n'est pas encore possible car il y a encore des attentats terroristes (...) Les forces américaines pourront partir quand notre armée sera totalement opérationnelle», a estimé Abou Muhanad, un chauffeur de minibus. 131 000 militaires américains sont toujours présents en Irak.

Lundi, des dizaines de milliers d'Irakiens s'étaient pressés dans l'immense parc Zawra de Bagdad, pour fêter l'événement. Dans une atmosphère bon enfant, ils se prêtaient volontiers à trois fouilles de la police avant de gagner le jardin où ils ont écouté les plus célèbres chanteurs et groupes de musique irakiens.

L'invasion conduite par les Etats-unis en 2003 s'est transformée rapidement en chaos puis en guerre confessionnelle avant que l'armée et la police irakiennes, largement épaulées par les forces américaines reprennent le dessus sur les insurgés de tous bords.