Bethléem a célébré mardi la Nativité orthodoxe la plus triste de ses dernières années, avec à peine un millier de fidèles dans une église à moitié vide, qui a éteint ses lumières en solidarité avec les Palestiniens de la bande de Gaza.

«C'est la première fois que nous célébrons dans le noir la Nativité orthodoxe. Nous sommes en guerre et partageons la douleur des habitants de Gaza», suite à l'intervention militaire israélienne, a déclaré à l'AFP Khat Jourdanian, le père supérieur du couvent arménien de Bethléem, en Cisjordanie, où est né Jésus, selon la tradition chrétienne.

Peu après le lancement de l'offensive militaire israélienne à Gaza le 27 décembre, en riposte aux tirs de roquettes du mouvement islamiste Hamas, les patriarches orthodoxes de Bethléem ont décidé de retirer tous les ornements festifs marquant leur traditionnelle fête de la Nativité.

Les boutiques de souvenirs ont été fermées et les illuminations du gigantesques arbre de Noël ont été éteintes. «Nous célébrons seulement la messe de minuit dans l'église et rien de plus», explique le père Khat.

«Gaza, c'est la moitié de notre pays et nous avons besoin de paix. Grâce à Dieu, nous n'avons aucun problème ici entre Chrétiens et Musulmans», ajoute-t-il.

Une habitante de Bethléem, Basma Jaar, mère de quatre enfants, déclare à l'AFP que, peu avant le début de la messe, plusieurs de ses amis ont décidé de ne pas y assister. «Ils ne veulent pas célébrer la Nativité, ils ont peur. Moi, je suis seulement venue prier pour la paix».

Selon elle, «ce qui se passe à Gaza est un massacre d'habitants, d'enfants de femmes. Qui sait si ce ne sera pas notre tour après. C'est déjà arrivé, après avoir attaqué Gaza, ils (les Israéliens) ont attaqué la Cisjordanie».

Autre prêtre orthodoxe, Fazar David, reconnait que les gens ont peur. «Il n'y a pas de joie dans leur coeur et ils craignent de venir à Bethléem. Ici, nous allons tous prier pour Gaza», dit-il.

Habituellement, plus de 5000 personnes viennent assister à la messe de la Nativité, marquant la naissance du Christ, selon le calendrier orthodoxe commun aux Grecs, Coptes et Syriaques.

Cette année, il y en a à peine un millier, en comptant quelques centaines d'habitants de Bethléem avec les pélerins étrangers.

Ainsi, quelque 2500 Russes orthodoxes de nationalité israélienne ont annulé leur visite, «sans doute après une mise en garde officielle» du gouvernement sur les risques qu'ils pouvaient courir, en croyant que le conflit «s'étendait à tous les territoires palestiniens», ont déclaré à l'AFP des sources proches de l'Eglise orthodoxe arménienne.

De plus, sur les 500 pélerins attendus des Etats-Unis, il n'en est venu qu'à peine 50 à Bethléem.

«C'est un triste début d'année. Je suis scout et cette année, toutes les manifestations de Noël ont été annulées», explique Mariam, 14 ans. Pour autant, avec une amie, Mariam a tenu à assister à la messe de minuit, célébrée par le Patriarche de l'Eglise orthodoxe grecque en Terre Sainte, Theopfels III, dont le sermon a porté principalement sur la douleur des Palestiniens et la nécessité de trouver le chemin de la paix.

Il y a un peu plus de 10 jours, lorsque les Catholiques célébraient leur fête de Noël, l'offensive israélienne contre Gaza n'avait pas commencé et Bethléem se réjouissait enfin d'en avoir fini avec la période noire ayant suivi l'éclatement de la seconde Intifada en 2000, avec le retour massif des pélerins.

Plus d'un million de fidèles ont visité Bethléem en 2008, soit le double de l'année précédente. Avec le conflit en cours à Gaza, la peur est revenue pour les 20 000 Chrétiens de la cité natale de Jésus.