Les talibans ont revendiqué l'assassinat lundi à Kaboul d'une Britannico-Sud-Africaine employée par une association spécialisée dans l'aide aux handicapés, accusée de «prêcher le christianisme», alors que les attaques se multiplient contre les humanitaires en Afghanistan.

Gayle Williams, 34 ans, employée d'une organisation non-gouvernementale britannique, Serve Afghanistan, a été abattue lundi matin par deux hommes armés, qui circulaient à moto dans l'ouest de Kaboul.Un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a revendiqué cet assassinat, dans une conversation téléphonique avec l'AFP.

«Nous avons assassiné cette femme étrangère à Kaboul, nous en assumons la responsabilité. Nous l'avons tuée car elle travaillait pour une organisation qui prêchait le christianisme en Afghanistan», a-t-il déclaré.

Cette accusation a été rejetée par Mike Lyth, directeur de Serve Afghanistan.

«Nous sommes une organisation chrétienne, nous ne nous en cachons pas, mais nous sommes opposés à tout prosélytisme», a-t-il déclaré à l'AFP.

«Gayle Williams était en Afghanistan depuis deux ans et demi. Elle aidait les infirmes. Elle travaillait à Kandahar (un bastion des talibans dans le sud du pays, ndlr) mais nous l'avions fait venir à Kaboul il y a six mois car la situation devenait dangereuse là-bas», a précisé Mike Lyth.

«Elle était née en Rhodésie et elle possédait la double nationalité britannique et sud-africaine», a-t-il ajouté.

Une quinzaine d'expatriés et 200 Afghans sont employés par Serve en Afghanistan, selon lui.

Le président Hamid Karzaï a vigoureusement condamné l'assassinat de Gayle Williams.

«Tuer une femme qui est venue dans notre pays pour aider le peuple afghan est un acte lâche et contraire à notre culture et à nos principes religieux. Ceux qui l'ont tuée sont les ennemis jurés de l'Afghanistan, mais de tels actes montrent qu'ils ne pourront jamais parvenir à leurs fins», a-t-il déclaré dans un communiqué.

Selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Zalmay Bashary, «la victime a été atteinte à la poitrine et à la jambe. Elle était morte à l'arrivée de la police».

«J'ai entendu sept coups de feu et j'ai vu le corps d'une femme étendu sur la chaussée», a témoigné Daulad, un ouvrier présent sur les lieux.

D'après des témoins, la victime se rendait tous les matins à pied de son domicile aux locaux de son organisation, un trajet d'une vingtaine de minutes.

Serve Afghanistan est une ONG enregistrée en Grande-Bretagne, spécialisée dans l'aide aux infirmes, présente auprès des réfugiés afghans au Pakistan depuis 1980, qui a installé ses locaux à Kaboul en 2001

Les attaques contre les ressortissants étrangers sont très rares à Kaboul, mais les violences visant les ONG se multiplient depuis le début de l'année.

De janvier à septembre, 146 actes de violence contre des ONG, impliquant des groupes criminels ou insurgés, ont été recensés, contre 135 pour l'ensemble de l'année 2007, selon un rapport d'Anso (Afghanistan NGO Safety Office), un groupe spécialisé dans la sécurité des ONG.

Vingt-huit membres d'ONG, dont cinq expatriés, ont perdu la vie en 2008 et 72 ont été enlevés, selon ce rapport.

Les attaques ne sont plus limitées au sud et à l'est du pays, bastions traditionnels des talibans.

Le 13 août, trois femmes occidentales employées par une ONG et leur chauffeur afghan ont ainsi été tuées dans une embuscade revendiquée par les talibans à moins de 50 km de Kaboul.

Les talibans ont lancé une insurrection meurtrière depuis qu'ils ont été chassés du pouvoir en novembre 2001 par une coalition internationale emmenée par les Etats-Unis. Les violences ont redoublé d'intensité depuis près de deux ans, malgré la présence en Afghanistan de 70 000 soldats étrangers.