Plus de la moitié des 100 000 miliciens anti Al-Qaïda qui ont aidé les Etats-Unis à améliorer la sécurité en Irak sont passés mercredi sous le contrôle du gouvernement irakien, dans le calme malgré les inquiétudes sur l'avenir d'une partie d'entre eux.

Les quelque 54 000 membres des brigades de Sahwas («réveil» en arabe) déployés dans la province de Bagdad sont passés dans la matinée sous pavillon irakien, comme annoncé début septembre par l'armée américaine.

Le reste, répartis dans les provinces du nord et du centre de l'Irak, sera transféré «progressivement», selon l'armée américaine.

Le conseiller à la sécurité nationale du gouvernement irakien, Mowaffak Al-Rubaï, a salué un «important succès pour la réconciliation nationale», en soulignant que Bagdad était «impatient d'assumer (cette) responsabilité».

Les Sahwas de Bagdad «recevront leur premier salaire du gouvernement irakien le 31 octobre», a précisé M. Rubaï. Ces rémunérations étaient jusque là assurées par l'armée américaine, à raison de 300 dollars par homme, soit environ 15 millions de dollars par mois.

Créés en septembre 2006 par des chefs de tribus sunnites de la province occidentale d'Al-Anbar, puis peu à peu généralisés aux autres zones sunnites, les groupes Sahwas ont depuis infligé de sévères revers à Al-Qaïda.

Ces miliciens ont largement contribué, depuis un an, à faire reculer l'organisation islamiste et à la diminution de la violence dans ces régions qui constituaient depuis 2003 les foyers de l'insurrection anti-américaine.

Le gouvernement s'est engagé à en enrôler 20% dans l'armée ou la police, et à garantir aux autres l'accès à des emplois civils, publics ou privés.

Aucun incident majeur n'avait mercredi après-midi émaillé ce passage de témoin, qui semblait même passer inaperçu dans la capitale irakienne, où les Sahwas étaient comme d'habitude en faction sur les axes routiers.

Dans le quartier sunnite d'Adamiyah, Sahwas et soldats irakiens se félicitaient de ce transfert, qui va selon eux renforcer l'Etat.

«On est très content, car nous sommes depuis aujourd'hui de vrais représentants du gouvernement irakien», se félicitait Omar Samir, un Sahwa de 36 ans. «Cela est juste et mérité qu'ils puissent rejoindre les forces de sécurité. Ils ont fait du bon boulot», a de son côté estimé le lieutenant de l'armée irakienne Ammar Hussein, 30 ans, posté à ses côtés.

Le degré d'information semble cependant varier selon les quartiers. «Ah bon, c'est aujourd'hui qu'on est transféré?», demandait mercredi midi Tahssin Saadi, un Sahwa de 36 ans posté dans son quartier, central, d'al-Mansour.

Pour le gouvernement irakien, le plus dur commence: trouver un emploi sûr pour l'ensemble de ces 100.000 hommes, certains observateurs craignant que ceux qui ne trouveront pas d'emplois stables ne rebasculent dans la rébellion.

Cela ne posera pas de problème pour les plus jeunes, qui feront partie des 20% à rejoindre l'armée ou la police, comme Ousman, 22 ans, lui aussi posté à al-Mansour. «On nous a dit qu'on serait policier ou soldats. On a rempli des papiers, et on attend des nouvelles», a-t-il expliqué.

Quant aux 80% restants, «on ne sait pas si ils trouveront tous un emploi», ajoute-t-il, admettant que «cela peut peut-être créer des problèmes».

Dominé par les chiites, le gouvernement reste selon certains responsables méfiant vis-à-vis des Sahwas qui, avant leur ralliement, l'ont combattu les armes à la main, comme ils sont combattu les milices chiites.

«Tous ces volontaires seront traités équitablement» car le gouvernement «s'est engagé à assurer leur futur économique», a assuré mercredi M. Rubaï, sans plus de précisions sur le sujet.

La situation était calme dans l'après-midi à Bagdad, où les habitants célébraient ou se préparaient à célébrer l'Aïd el-Fitr, qui marque la fin du mois de jeûne du ramadan.