(Hambourg) Le roi Charles III a achevé vendredi sa visite historique en Allemagne par une étape mémorielle à Hambourg, un geste d’une haute portée symbolique 80 ans après des raids meurtriers menés par les Alliés.

Pour le dernier jour de sa première visite à l’étranger en tant que roi, Charles III a embarqué, avec la reine consort Camilla, dans un train à grande vitesse ICE aux couleurs de l’Allemagne.  

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Charles III discute avec la reine consort Camilla à bord de train les menant à Hambourg.

Destination Hambourg, deuxième ville du pays, en compagnie du président allemand Frank-Walter Steinmeier.

À l’issue d’un trajet de près de deux heures en train, rarissime dans le cadre d’une visite d’État, le souverain a déposé, sous la pluie, à la gare Dammtor une gerbe au pied d’un monument à la mémoire d’enfants juifs envoyés en Grande-Bretagne pour échapper au nazisme.

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Charles III devant le Kindertransport, monument à la mémoire d’enfants juifs envoyés en Grande-Bretagne pour échapper au nazisme.

Il s’est ensuite rendu à l’église Saint-Nicolas, détruite par les bombardements aériens britanniques et américains en 1943, pour un moment de recueillement au côté du président allemand, une autorité morale dans le pays.

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Le roi Charles III (au centre) était accompagné du président Frank-Walter Steinmeier (à droite) lors de sa visite de l’église Saint-Nicolas.

« Signal important »

La visite de cette église, laissée en ruine et qui sert de mémorial, est vue en Allemagne comme un signe de responsabilité et de réconciliation d’« une grande importance », plus significatif que « n’importe quel discours », selon le quotidien populaire Bild.

« Le signe de réconciliation entre deux ennemis de guerre et la commémoration commune des victimes sont un signal important », abonde l’évêque de Hambourg, Kirsten Fehrs, qui a prononcé la litanie de réconciliation de Coventry vendredi.

Aborder les souffrances endurées par les civils allemands durant la Seconde Guerre mondiale reste un sujet très délicat et souvent tabou dans un pays responsable de la mort de six millions de juifs sous le nazisme.

Il s’agit de trouver un « équilibre difficile entre le passé et l’avenir », a estimé Rainald Erbacher, interrogé parmi les nombreux curieux qui ont attendu Charles sous la pluie de Hambourg.

L’hommage du souverain vendredi « envoie un signal positif », a commenté cet ingénieur de 54 ans.

Le 24 juillet 1943, la Grande-Bretagne et les États-Unis lancent l’opération « Gomorrhe », qui a coûté la vie à plus de 30 000 personnes à Hambourg.  

Elle fut l’une des attaques aériennes les plus meurtrières avec le bombardement de Dresde, à l’est.

Élisabeth II, morte l’an passé, s’était rendue en 1992 à l’église Notre-Dame de Dresde, symbole de la destruction de la guerre et reconstruite depuis. Mais elle avait été reçue à l’époque par des jets d’œufs.

« Fléau »

Ces bombardements aériens restent parmi les actions de guerre les plus controversées entreprises par les Alliés, car ils étaient destinés à terroriser la population et contraindre le régime d’Hitler à se rendre, au prix de dizaines de milliers de victimes civiles.

L’extrême droite allemande cite souvent les souffrances endurées lors de ces bombardements pour s’exonérer de la culpabilité liée au nazisme, qui marque le pays depuis les années 1970.

Le rapprochement germano-britannique et l’avenir des relations entre les deux pays ont fait partie des grands thèmes de la visite de trois jours de Charles III.  

Le souverain a également consacré plusieurs moments de son séjour, entamé mardi, à la découverte de projets environnementaux, à l’image des technologies vertes utilisées par le port de Hambourg pour réduire son empreinte carbone.

Le déplacement de Charles III a constitué un geste européen important après la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

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Charles III (C) a prononcé un discours au Bundestag, jeudi.

Premier monarque à s’exprimer, jeudi, dans l’enceinte du Bundestag, il avait déploré le retour du « fléau » de la guerre en Europe en évoquant l’invasion russe de l’Ukraine, assurant que les alliés peuvent « puiser courage dans leur unité ».