(Kyiv) La Russie a mené vendredi une attaque « massive » avec des dizaines de missiles contre des sites énergétiques en Ukraine, selon Kyiv qui affirme que deux projectiles ont traversé l’espace aérien de la Roumanie et donc de l’OTAN, ce que Bucarest dément.

« L’Ukraine a perdu temporairement 44 % de ses capacités de génération d’énergie nucléaire, 75 % des capacités de ses centrales thermiques et 33 % de celles de ses centrales de cogénération », a détaillé vendredi le premier ministre ukrainien Denys Chmygal.

« La grande majorité des Ukrainiens ont toujours accès au chauffage, à l’eau et l’électricité […] il y a assez de ressources pour passer l’hiver », a-t-il ajouté.

L’Agence internationale de l’énergie atomique (IAEA) a précisé dans un communiqué qu’un réacteur de la centrale atomique de Khmelnytskyi (NPP), dans l’ouest du pays, était à l’arrêt à cause des instabilités sur le réseau électrique.

À quelques jours du premier anniversaire de l’invasion russe, le 24 février, la Maison-Blanche a par ailleurs fait savoir que le président Joe Biden comptait se rendre en Pologne voisine du 20 au 22 février.

Sa porte-parole, Karine Jean-Pierre, a précisé qu’il y rencontrera le président polonais Andrzej Duda « pour parler de notre coopération bilatérale et de nos efforts collectifs pour soutenir l’Ukraine et renforcer les capacités de dissuasion de l’OTAN ».

À Bucarest, le ministère roumain de la Défense a affirmé « qu’aucun missile » n’avait violé l’espace aérien de la Roumanie, contrairement à ce qu’avait assuré le chef de l’armée ukrainienne. Selon Bucarest, un missile est cependant passé à 35 kilomètres du territoire roumain, ce qui a justifié l’envoi de deux avions de chasse.

Le président ukrainien Volodmyr Zelensky a cependant continué d’insister sur le fait que « plusieurs missiles ont traversé l’espace aérien de la Moldavie et de la Roumanie », évoquant un « défi à l’OTAN » de la part de la Russie.

Plus d’armes

La Moldavie, une ex-république soviétique située entre la Roumanie et l’Ukraine, qui avait dénoncé jeudi des activités russes de « déstabilisation » à son encontre, a de son côté convoqué l’ambassadeur de la Russie pour dénoncer une « violation inacceptable » de son espace aérien.

Cette nouvelle salve de missiles russes contre l’Ukraine intervient après une tournée européenne de M. Zelensky qui, à Londres, Paris et Bruxelles, a exhorté ses alliés à fournir des missiles de longue portée et des avions de chasse, ce que ni les Européens ni les Américains n’ont à ce stade accepté, de crainte d’une escalade avec Moscou.

Les Britanniques ont ouvert la porte à de possibles livraisons « à long terme ».

Kyiv dit depuis plusieurs jours s’attendre à une offensive importante de l’armée russe, qui a accru la pression le long de la ligne de front dans l’Est, où ses forces grignotent du terrain.

Un responsable prorusse, Denis Pouchiline, a ainsi revendiqué vendredi des progrès au nord de Bakhmout, épicentre des combats, où les troupes de Moscou auraient coupé une route d’approvisionnement ukrainienne, et à Vougledar, également cible d’une offensive.

Selon les autorités ukrainiennes, l’armée russe a tiré vendredi 71 projectiles dont 61 ont été abattus. Il s’agissait de missiles de croisière Kh-101, Kh-555, Kalibr, ainsi que de drones explosifs Shahed de conception iranienne.

« En sécurité » dans le métro

Plusieurs explosions ont notamment été entendues à Kyiv, selon des journalistes de l’AFP. Après que les sirènes antiaériennes ont retenti dans la matinée, des habitants sont descendus dans le métro pour s’abriter.

PHOTO VIACHESLAV RATYNSKYI, REUTERS

Des étudiants assistent à un cours dans le métro de Kyiv.

« Nous devons continuer à travailler », peste Iryna, qui admet néanmoins être « en sécurité » dans les sous-sols du métro. D’autres habitants expriment leur lassitude face à ces fréquents allers-retours entre les sous-sols et l’air libre.

Depuis octobre et après plusieurs revers sur le terrain, Moscou vise fréquemment des sites d’infrastructures énergétiques en Ukraine, plongeant des millions d’habitants dans le froid et le noir en pleine période hivernale.

Au-dessus de Kyiv, « 10 missiles ont été abattus », a affirmé le maire Vitali Klitschko, indiquant qu’il n’y avait « pas de victimes », mais « des dégâts au réseau électrique ».

PHOTO ANDRIY ANDRIYENKO, ASSOCIATED PRESS

Une maison détruite par une frappe russe à Kamychevakha, dans la région de Zaporijjia

Selon le ministère de l’Énergie, des sites énergétiques ont été touchés dans six régions d’Ukraine, avec une situation particulièrement « difficile » dans celles de Zaporijjia (Sud), Kharkiv (Nord-Est) en plus de Khmelnytskyï (Ouest).

À Zaporijjia, « une partie de la ville est sans électricité », a indiqué sur Telegram le secrétaire du conseil municipal, Anatoly Kourtev.

Les dernières frappes russes d’ampleur remontaient à fin janvier, au lendemain de la décision des Occidentaux de livrer des chars lourds, essentiellement des Leopards allemands, à l’armée ukrainienne.

PHOTO INTS KALNINS, REUTERS

Un canon antiaérien Bofors L70 de l’armée lituanienne est chargé dans un camion pour être livré à l’Ukraine depuis une base militaire de la région de Radviliskis, en Lituanie, le 10 février.

En Russie, où les livraisons d’armes occidentales sont suivies de près, le Kremlin a annoncé vendredi que le président Vladimir Poutine prononcerait le 21 février son discours sur l’état de la Nation, trois jours avant l’anniversaire de l’invasion.

Pour punir Moscou, les pays occidentaux ont imposé une pluie de sanctions économiques, notamment un plafonnement du prix du pétrole russe pour frapper la Russie au portefeuille.