(Berlin) Le chancelier Olaf Scholz s’exprime mercredi devant le Parlement allemand avec, à la clé, une possible annonce sur les livraisons de chars lourds Leopard à l’Ukraine, qui les réclame avec insistance pour se défendre contre l’invasion russe.

Deux médias allemands, le Spiegel et la chaîne d’information NTV, ont assuré que M. Scholz, qui prendra la parole à 7 h (heure de l’Est) devant la chambre basse du Parlement, allait probablement donner son feu vert à cette occasion aux pays, parmi lesquels la Pologne et la Finlande, qui souhaitent livrer à Kyiv des chars Leopard 2 de fabrication allemande.

« L’Allemagne envoie des chars Leopard à l’Ukraine », a tweeté pour sa part le Parti libéral-démocrate (FDP), membre de la coalition gouvernementale de M. Scholz.

« Les discussions doivent se finir par des décisions », a exhorté mardi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky. « Les alliés ont le nombre requis de tanks » nécessaires à l’armée ukrainienne pour renverser les troupes de Moscou, a-t-il déclaré dans son allocution quotidienne.

Les pays ayant acheté pour leurs forces armées des chars Leopard 2 à l’Allemagne doivent obtenir l’autorisation de Berlin pour les réexporter.

Varsovie, qui veut créer une « coalition de pays soutenant l’Ukraine avec des chars Leopard 2 », a officiellement envoyé mardi à Berlin une requête en ce sens. Un porte-parole du gouvernement allemand a promis d’y répondre « avec l’urgence requise ».

Le premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a dit espérer une réponse rapide, regrettant que « les Allemands tardent, tergiversent, agissent d’une manière difficile à comprendre ».

Au cours d’une conférence de presse à Berlin avec Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’OTAN, le nouveau ministre allemand de la Défense Boris Pistorius a déclaré mardi avoir « expressément encouragé les pays partenaires qui ont des chars Leopard prêts à être déployés à entraîner les forces ukrainiennes sur ces chars ».

« Message clair »

Le chef de l’OTAN a salué le « message clair » de M. Pistorius, en poste depuis moins d’une semaine.

« De telles livraisons n’apporteront rien de bon » aux relations russo-allemandes, a en revanche réagi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Lundi, la Pologne avait prévenu qu’elle était prête à se passer de l’autorisation de Berlin. Varsovie, qui se dit disposé à envoyer 14 Leopard 2 à Kyiv, discute avec une quinzaine d’États à ce sujet, de nombreuses armées européennes possédant ces blindés.

La crainte d’une escalade militaire avec Moscou et ses réticences à faire assumer à l’Allemagne un leadership dans le camp occidental expliquent les hésitations du chancelier Scholz, selon des analystes.

Le Royaume-Uni a déjà annoncé la livraison à l’Ukraine de 14 chars lourds Challenger 2. Et selon le Wall Street Journal, qui cite des responsables américains, les États-Unis envisagent finalement de livrer à Kyiv des chars d’assaut Abrams M1, ce qu’ils refusaient jusqu’à présent de faire, évoquant des problèmes de maintenance et de formation.

« Si les États-Unis décident de livrer des chars, il sera impossible de justifier un tel acte par des arguments liés aux “armes défensives”. Il s’agirait d’une nouvelle provocation flagrante à l’encontre de la Fédération de Russie », a averti sur Facebook l’ambassadeur russe à Washington, Anatoly Antonov.

Pour l’Ukraine, le soutien militaire et financier des alliés occidentaux est crucial. Elle dit avoir besoin de centaines de chars modernes et d’autres armements pour contrer une possible nouvelle offensive russe de grande ampleur au printemps.

« Aujourd’hui, cela fait exactement onze mois depuis le début de la guerre à grande échelle. Le 335e jour. Un jour que nous passerons comme le 334e, unissant nos forces pour la victoire », a déclaré mardi soir le président Zelensky.

Corruption

Il a aussi défendu des décisions « nécessaires » pour avoir « un État fort », après qu’une série de hauts responsables ont été démis de leurs fonctions dans la foulée d’une affaire de corruption concernant des approvisionnements de l’armée.

Quatre vice-ministres, dont celui de la Défense Viatcheslav Chapovalov, ainsi que plusieurs gouverneurs et autres responsables ont dû quitter leur poste dans la foulée de cette affaire, la première de cette ampleur depuis le début du conflit.

D’autres limogeages avaient déjà récemment eu lieu en Ukraine, qui était classée à la 122e place sur 180 sur l’indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International en 2021.

Dimanche, le ministre adjoint des Infrastructures Vassyl Lozinsky avait été arrêté, accusé d’avoir reçu un pot-de-vin de 400 000 dollars pour « faciliter » l’achat de générateurs à des prix gonflés, au moment où son pays est confronté à de vastes coupures d’électricité à la suite des frappes russes sur les installations énergétiques.

Sur le front, deux travailleurs humanitaires britanniques, Chris Parry, 28 ans, et Andrew Bagshaw, 47 ans, ont été tués alors qu’ils tentaient d’évacuer des habitants sous les bombardements à Soledar, dans l’est de l’Ukraine, ont annoncé mardi leurs familles.

Le patron du groupe de mercenaires russe Wagner, Evguéni Prigojine, avait publié le 11 janvier sur l’internet des photos d’identité semblant correspondre aux deux Britanniques, affirmant qu’elles avaient été retrouvées sur le corps de l’un d’eux.