(Kyiv) L’Ukraine a reçu lundi de nouveaux systèmes occidentaux de défense antiaérienne destinés à contrer les missiles russes qui pleuvent régulièrement sur les villes et infrastructures du pays, tandis que la Corée du Nord a nié fournir des armes à Moscou.

Le ministère de la Défense nord-coréen a qualifié d’« infondées » les accusations américaines selon lesquelles Pyongyang fournissait des obus d’artillerie à la Russie pour sa guerre en Ukraine, selon l’agence d’État nord-coréenne KCNA.  

La semaine dernière, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche John Kirby avait affirmé que la Corée du Nord envoyait un « nombre important » d’obus à la Russie « de manière dissimulée », ajoutant que Washington cherchait à savoir si cette aide nord-coréenne avait bien été réceptionnée par les Russes.

« Les États-Unis persistent à répandre une rumeur infondée de “contrats d’armements” entre la RPDC (République populaire démocratique de Corée, Corée du Nord) et la Russie », indique un communiqué du vice-directeur des affaires étrangères militaires du ministère de la Défense nationale nord-coréenne, cité par KCNA. « Une fois de plus nous voulons dire clairement qu’il n’y a jamais eu de “contrats d’armements” avec la Russie et que nous n’en prévoyons pas à l’avenir ».

John Kirby avait estimé la semaine dernière que la présumée aide nord-coréenne était révélatrice des « pénuries et besoins » de la Russie.

La Maison-Blanche a assuré lundi que « le soutien des États-Unis à l’Ukraine sera infaillible et inébranlable » quel que soit le résultat des élections américaines mardi, qui risquent de faire perdre au président Joe Biden sa majorité dans une, voire les deux chambres du Congrès.  

Alors que les États-Unis sont le principal soutien de l’Ukraine (quelque 18,2 milliards de dollars), l’opposition républicaine a souligné sa volonté de « ne pas faire de chèque en blanc » à Kyiv si elle remportait le scrutin.

De son côté, le ministère ukrainien de la Défense a annoncé que l’État ukrainien allait prendre le contrôle de plusieurs entreprises « d’importance stratégique » afin d’aider à l’effort de guerre, dont le producteur d’hydrocarbures Ukrnafta et le constructeur aéronautique Motor Sich.

Bouclier antiaérien

Après plusieurs séries de frappes russes ces dernières semaines qui ont laissé des centaines de milliers de personnes sans courant, les autorités de la région de Kyiv, la capitale ukrainienne, ont évoqué une situation « tendue » pour l’approvisionnement en énergie.  

L’administration militaire régionale a appelé les habitants à « utiliser l’électricité avec parcimonie ». L’opérateur Ukrenergo a dû procéder à des « arrêts d’urgence ».

Une attaque russe aux drones-suicides et missiles avait laissé le 31 octobre près de 80 % des habitants de la capitale sans eau et 350 000 foyers sans électricité, avant qu’une partie des dégâts soit réparée.

Le président Volodymyr Zelensky a réclamé aux Occidentaux la création d’un « bouclier » à même de protéger les infrastructures critiques ciblées par Moscou.

Selon le ministre de la Défense Oleksiï Reznikov, Kyiv a reçu lundi des systèmes de défense antiaérienne NASAMS et Aspide, fournis par les États-Unis, l’Espagne et la Norvège.

Ces livraisons suivent celles, notamment, du système allemand de dernière génération « Iris-T » ou encore des missiles sol-air français « Crotale ». Le Royaume-Uni a annoncé l’envoi de missiles AMRAAM.

Les Occidentaux espèrent doter l’Ukraine d’une défense antiaérienne « patchwork » composée d’équipements modernes et plus anciens.

PHOTO BULENT KILIC, AGENCE FRANCE-PRESSE

Une femme ukrainienne pleure alors qu’elle quitte la région de Kherson avec sa famille, le 5 novembre à Zaporijjia.

Selon les autorités ukrainiennes, la Russie a détruit environ 40 % des infrastructures énergétiques ukrainiennes depuis début octobre, utilisant notamment des drones-suicides de fabrication iranienne.

« Pression psychologique »

Côté russe, les autorités d’occupation de la ville de Kherson, dans le Sud de l’Ukraine, ont annoncé la « stabilisation » de l’approvisionnement en eau et électricité, au lendemain de deux frappes dont Russes et Ukrainiens s’accusent mutuellement.

Ces frappes ont également endommagé le barrage hydroélectrique de Kakhovka, occupé par les forces russes et qui alimente la Crimée annexée en 2014 par la Russie, dans une région où les troupes ukrainiennes sont à l’offensive depuis des semaines.

Kherson est la principale ville ukrainienne prise par les forces russes depuis le début de l’invasion. Face à la bataille à venir, Moscou a organisé des évacuations d’habitants dénoncées comme des « déportations » par Kyiv.

Lioudmila et Oleksandr Chevchouk ont réussi à fuir la zone pour repasser en territoire sous contrôle ukrainien. Selon eux, les soldats russes exerçaient une forte « pression psychologique » sur les habitants pour évacuer vers la Crimée.

PHOTO OLEKSANDR RATUSHNIAK, REUTERS

Un immeuble d’Avdiivka détruit par une frappe russe

« Ils passaient de maison en maison avec leurs armes. Puis ils jetaient tous les téléphones dans un seau et repartaient », a raconté Mme Chevchouk.

« Paranoïa » russe

Si les quatre derniers débuts de semaine ont été marqués par des bombardements russes massifs sur les villes ukrainiennes, la journée de lundi semble avoir été relativement calme, avec un ciel gris et brumeux à Kyiv peu propice aux raids aériens.

« Cela fait huit mois que nous savons que cela peut arriver tous les jours et nous nous sommes adaptés, je ne change pas ma routine pour cela, je vais travailler comme tous les jours », a lancé une habitante, Aliona Plekh, 21 ans.

Selon l’armée ukrainienne, les forces russes ont lancé quatre missiles et 24 bombardements aériens ces dernières 24 heures dans l’ensemble du pays.

Au moins une personne a été tuée dans les bombardements dans la région de Zaporijjia, dans le Sud, une blessée dans celle voisine de Kherson et une autre tuée dans celle de Soumy, dans le Nord, selon les autorités régionales respectives.

L’armée russe a accusé une nouvelle fois les forces ukrainiennes d’avoir tiré « sept obus de gros calibre » sur la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d’Europe, occupée par Moscou depuis mars, sans provoquer de hausse des radiations.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a répété lundi que Moscou était « ouvert » à la possibilité de négociations avec Kyiv, dénonçant une nouvelle fois le refus de Volodymyr Zelensky de dialoguer.

À Zaporijjia, les habitants ayant fui l’occupation russe ont raconté aux journalistes de l’AFP une atmosphère de paranoïa.

« Dieu nous garde si nous disions quelque chose contre la Russie. Personne ne se sentait en sécurité », a raconté Irina Mykhaïlena, originaire de la ville occupée de Berdiansk.