(Zakitne) Pour Ludmila Omelchenko, une retraitée de 62 ans habitant un petit village dévasté par les bombes, la reconquête par l’armée ukrainienne de la ville proche de Lyman signifie qu’elle pourra dormir hors de sa cave pour la première fois en sept mois.

« J’ai dormi dans le sous-sol depuis le premier jour de cette guerre infernale (le 24 février), mais hier, les bombardements ont cessé », a raconté l’habitante de Zakitne, à 10 km de Lyman.

« J’ai osé dormir de nouveau dans mon propre lit la nuit dernière », a-t-elle ajouté, tressaillant au bruit des tirs d’artillerie qui résonnent encore en provenance de la ligne de front de la région de Donetsk.

L’armée ukrainienne a annoncé samedi être entrée dans Lyman, nœud ferroviaire régional stratégique. Le ministère russe de la Défense a indiqué que ses troupes se retiraient « vers des lignes plus favorables ».

La reconquête de la ville marque la première victoire des forces ukrainiennes dans un territoire que la Russie considère comme sien après l’avoir annexé.

Après des mois de bombardements, tous les bâtiments de Zakitne, situé sur une hauteur et séparé par une rivière du territoire qui était contrôlé par les Russes jusqu’à samedi, ont été détruits ou endommagés.

Le village a été vidé de ses 200 habitants, et les quelque personnes qui y sont restées hésitaient dimanche à s’aventurer dans les rues.

« Je sortais toujours pour m’occuper de mes fleurs, pendant les répits dans les bombardements, rien ne pouvait m’empêcher de le faire », confie Mme Omelchenko, les larmes aux yeux.

Les roses rouges, le lilas et les pétunias blancs de son jardin sont la seule touche de couleur dans le village en ruine, avec l’éclatant espace de jeux pour les enfants.

Huit ans de guerre

Zakitne avait également été lourdement pilonné au cours des combats de 2014, lorsque des séparatistes prorusses soutenus par Moscou s’étaient emparés de la moitié de la région de Donetsk.

« Mon fils n’a achevé les travaux pour réparer les dégâts subis par notre maison en 2014 que cette année, en février », quelques semaines avant l’invasion russe, souligne Mme Omelchenko.   

Autre témoignage de longues années d’affrontements, une plaque sur les murs d’une école ravagée, marquée par des éclats d’obus, indique : « Réparé avec l’aide de l’UNESCO et du gouvernement japonais ».

À l’intérieur de l’école se trouvent des chèvres gardées par Ludmila Mykolayivna, une villageoise de 58 ans.   

« Au moins ici, il y a un toit », dit-elle à l’AFP dans sa maison dont la plupart des vitres sont brisées. L’étable qui abritait les chèvres a été détruite il y a plusieurs mois.

« Je regrette d’avoir déménagé à Zakitne il y a 15 ans, dont huit ont été des années de guerre ininterrompue », lâche-t-elle d’une voix frémissante, expliquant qu’elle vit dans son sous-sol depuis avril.

Une autre villageoise, Nadiya, indique qu’il n’y a plus ni eau, ni gaz, ni électricité à Zakitne depuis le printemps.

« Cinq personnes dorment dans mon garage, car les toits de leur maison se sont effondrés », soupire-t-elle.

Un sac de pain sec suspendu dans un coin du garage constitue les réserves de secours pour le groupe, au cas où les premières chutes de neige hivernales les empêcheraient de se rendre au marché le plus proche, dans la ville de Sloviansk.

« Je ne sais pas comment nous allons faire pour affronter l’hiver, pour être franche, mais au moins les bombardements ont cessé », murmure Nadiya.