L’Ukraine doit se préparer à « tous les scénarios » à la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par les troupes russes et visée par des bombardements répétés, a averti mercredi le ministre ukrainien de l’Intérieur.

Moscou et Kyiv se sont accusés mutuellement de ces bombardements, qui ont ciblé la plus grande centrale nucléaire d’Europe, sous contrôle de l’armée russe depuis mars, faisant resurgir le spectre d’une catastrophe majeure en Europe.

« Personne ne pouvait prévoir que les troupes russes allaient tirer sur des réacteurs nucléaires à l’aide de chars. C’était du jamais vu », a accusé Denys Monastyrsky lors d’un déplacement à Zaporijjia, ville du Sud située à une cinquantaine de kilomètres à vol d’oiseau de cette installation.

Après avoir assisté à des exercices de premiers secours en cas d’accident nucléaire, il a déclaré : « nous devons nous préparer à tous les scénarios possibles », accusant la Russie d’être un « État terroriste […] Tant que la Russie contrôle la centrale nucléaire de Zaporijjia, il y a de gros risques ».

Des dizaines de secouristes ukrainiens ont participé à cet exercice sous une chaleur de plomb, ont constaté des journalistes de l’AFP mercredi. Équipés de masques à gaz et de vêtements protecteurs avec des dosimètres, ils se sont entraînés à évacuer des blessés et nettoyer des véhicules contaminés.

Le patron l’opérateur nucléaire ukrainien Energoatom, Petro Kotine, a estimé que jusqu’à 500 soldats russes, ainsi qu’une cinquantaine de véhicules militaires dont des blindés et des chars se trouvent à la centrale.

« Le pire, c’est que ces deux ou trois dernières semaines, ils ont placé ces véhicules dans la salle des machines des unités 1 et 2 », où l’électricité est produite, a affirmé M. Kotine, qui est l’ex-directeur de cette installation.

L’Ukraine accuse depuis des semaines Moscou de stocker des armes lourdes dans la centrale de Zaporijjia et de l’utiliser comme base de frappes sur les positions ukrainiennes. Elle assure aussi que les forces russes tirent sur la centrale qu’ils occupent dans le but d’accuser Kyiv de ces bombardements.

La Russie affirme pour sa part que Kyiv a visé à plusieurs reprises, y compris à l’aide de drones, la centrale nucléaire, provoquant des incendies.

Il était impossible de vérifier ces informations de façon indépendante.

Une frappe sur Kharkiv fait six morts et 16 blessés

Au moins six personnes ont été tuées et seize blessées mercredi dans un bombardement russe sur Kharkiv, la deuxième ville d’Ukraine, ont annoncé les autorités locales.

Le maire de Kharkiv, Igor Terekhov, avait dans un premier temps évoqué sur Telegram un bilan de trois morts et dix blessés, avant que le gouverneur régional Oleg Sinegoubov ne le revoie à la hausse.

« Malheureusement, le nombre de morts et de blessés à la suite du bombardement […] a augmenté : six personnes sont mortes, seize ont été blessées », a indiqué M. Sinegoubov sur Telegram.

« Il y a un puissant incendie sur les lieux de la frappe dans un immeuble d’habitation », a ajouté Igor Terekhov.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lui évoqué un immeuble d’habitation « totalement détruit » dans la frappe. « Une attaque ignoble et cynique sur les civils qui n’a aucune justification et démontre l’impuissance de l’agresseur », a-t-il écrit sur Telegram. « Nous ne pardonnerons pas, nous nous vengerons ».

Située à une quarantaine de kilomètres de la frontière russe dans le nord-est de l’Ukraine, la ville de Kharkiv est régulièrement pilonnée par l’armée russe depuis le début de l’invasion fin février, mais les troupes de Moscou n’ont jamais réussi à prendre la cité.

Des centaines de civils ont été tués dans la région de Kharkiv depuis le début de la guerre, selon le décompte des autorités.

Les forces russes concentrent actuellement leur offensive sur l’est et le sud de l’Ukraine.

L’Ukraine menace de démanteler un pont reliant la Russie continentale à la Crimée

L’Ukraine a menacé mercredi de démanteler le pont de Kertch, construit à grands frais par Moscou pour connecter la Russie à la péninsule annexée de Crimée, où ont eu lieu plusieurs explosions sur des bases militaires russes.

« Ce pont est une structure illégale et l’Ukraine n’a pas donné sa permission pour sa construction. Il porte préjudice à l’écologie de la péninsule et doit donc être démantelé. Peu importe comment : volontairement ou non », a écrit sur Telegram le conseiller de la présidence ukrainienne Mikhaïlo Podoliak.

Le pont de Kertch, qui avait été inauguré par le président russe Vladimir Poutine en mai 2018, a représenté un chantier colossal de deux ans coûteux pour bâtir les 19 kilomètres reliant la Russie continentale à la Crimée et désenclaver la péninsule quatre ans après son annexion par Moscou.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER @BIZ_UKRAINE_MAG

Le pont de Kertch, qui avait été inauguré par le président russe Vladimir Poutine en mai 2018, a représenté un chantier colossal de deux ans coûteux pour bâtir les 19 kilomètres reliant la Russie continentale à la Crimée et désenclaver la péninsule quatre ans après son annexion par Moscou.

Cette menace voilée de M. Podoliak intervient après une série d’explosions survenues en Crimée, que la Russie utilise comme base arrière logistique pour son invasion de l’Ukraine lancée le 24 février.

Mardi, une attaque a visé un dépôt de munition sur une base militaire située près de Djankoï, dans le nord de la Crimée, Moscou évoquant un « acte de sabotage » sans pour autant en désigner les responsables.

Une semaine auparavant, des explosions étaient survenues sur l’aérodrome militaire russe de Saki, dans l’ouest de la péninsule, faisant un mort et plusieurs blessés.

Si l’Ukraine n’a pas reconnu sa responsabilité dans ces attaques, ses responsables n’ont pas manqué d’ironiser en suggérant que ces incidents étaient dus à des cigarettes mal éteintes ou à un piètre respect des normes anti-incendies.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait lui assuré que Kyiv « n’abandonnera jamais » son intention de reprendre la Crimée à la Russie.