(Kyiv) Parfait inconnu pour ses compatriotes lors de sa nomination à la tête de l’armée ukrainienne il y a un an, le général Valery Zaloujny est devenu une icône de la résistance face à l’invasion russe.

Le 49e anniversaire de cet homme massif à l’allure martiale en juillet s’était même transformé en déclaration d’amour collective, les Ukrainiens inondant les réseaux sociaux d’éloges à l’adresse du commandant de leurs forces armées.

Des enfants évoquent désormais son nom dans leurs jeux et l’édition nationale du magazine de mode Vogue a même consacré un article à cette « figure légendaire ».

« Grâce au commandant en chef Zaloujny, notre confiance en nous et en notre victoire est revenue », se félicite sur Facebook l’ex-ministre des Transports Volodymyr Omelian.

Les Ukrainiens créditent Valery Zaloujny pour l’échec du plan initial de la Russie de faire plier Kyiv rapidement au début de son offensive lancée le 24 février.

La farouche résistance des troupes ukrainiennes a poussé Moscou à retirer ses forces des environs de Kyiv pour se concentrer sur l’Est. Ce recul a porté à un niveau record (97 % selon des sondages) la confiance des Ukrainiens dans l’armée, qu’incarne M. Zaloujny.

« Ce n’est pas une confiance dans une personnalité mais dans les forces armées », estime auprès de l’AFP le député Serguiï Rakhmanine, membre de la commission de Défense.  

Le magazine américain Time a nommé cette année Zaloujny parmi les 100 personnes les plus influentes du monde, aux côtés du président ukrainien Volodymyr Zelensky.

« Valery Zaloujny est devenu l’esprit militaire dont son pays avait besoin », écrit le chef d’état-major américain Mark Milley, assurant qu’il « restera dans l’histoire ».

Nouvelle élite militaire

Même s’il n’a donné aucune interview depuis le début de l’invasion russe, cela n’a pas empêché la presse ukrainienne d’être tout acquise à la cause de celui qu’elle a surnommé le « général de fer ».

Les projets russes de « Blitzkrieg, de changement du pouvoir et de l’orientation géopolitique de l’Ukraine ont été ruinés », avait écrit M. Zaloujny sur Facebook deux semaines après le début de l’invasion. « Peu importe à quel point c’est difficile pour nous, [cette guerre] ne sera certainement pas une honte ».

Pour l’analyste du centre ukrainien Democracy House Anatoly Oktysiouk, M. Zaloujny est « compétent et n’a pas cette vieille mentalité soviétique » typique pour l’état-major ukrainien. « Il est patriote, n’est pas corrompu et a reçu une bonne formation, notamment en Occident », relève-t-il.

Valery Zaloujny est né le 8 juillet 1973 dans une garnison militaire soviétique à Novograd-Volynsky, dans le nord-ouest de l’Ukraine.

Il suit une carrière d’officier typique avec 24 années de service militaire à son actif, passé par tous les postes allant de commandant de peloton à la direction des opérations militaires contre les séparatistes prorusses soutenus par Moscou dans l’Est, à partir de 2014.  

Nommé à la tête du commandement nord des troupes terrestres en 2019, il a été promu commandant en chef des forces armées ukrainiennes par le président Zelensky en juillet 2021.

Jalousie politique ?

Le général a alors comme priorité la réforme de l’armée pour s’éloigner des traditions militaires soviétiques et se rapprocher des standards de l’OTAN, l’alliance que l’Ukraine ambitionne de rejoindre, au grand dam de son voisin russe.

Soulignant le rôle clé d’une jeune génération d’officiers ayant acquis une expérience de combat contre les séparatistes dans l’est, il a exhorté le commandement militaire ukrainien à « utiliser tous les moyens » pour « préserver la vie et la santé » de leurs soldats.

Quelques mois après sa nomination, il mettait en garde contre la « menace d’une agression d’envergure » de Moscou dans l’une de ses rares interviews. « Nous devons nous y préparer », prophétisait ce père de deux filles, dont une militaire.

Sa popularité fulgurante lui a même valu, selon plusieurs médias, la jalousie de l’entourage du président, même si M. Zaloujny n’a jamais manifesté d’ambitions politiques et que ses prises de parole restent très limitées.

Début juillet, M. Zelensky a pour la première fois critiqué une décision de son armée, qui avait annoncé des restrictions pour les déplacements des réservistes entre les régions.

Il a toutefois immédiatement minimisé l’impact de cette critique, assurant que c’était « un détail, rien du tout ».

« Il n’y a aucun malentendu entre moi et l’état-major » de l’armée, a encore assuré mercredi le président. « Nous manifestons une grande unité face à la menace russe ».