(Paris) Le bombardement le 16 mars du théâtre de Marioupol, en Ukraine, dans lequel de nombreux civils s’étaient réfugiés, est « clairement un crime de guerre » russe, affirme jeudi un rapport d’Amnistie internationale, pour qui le nombre de victimes est toutefois largement inférieur à ce qui était craint.

« Jusqu’à présent, nous parlions d’un crime de guerre présumé. Maintenant, nous pouvons clairement dire que c’en était un, commis par les forces armées russes », a affirmé Oksana Pokaltchouk, la directrice d’AI en Ukraine, lors d’un entretien à Paris.

Deux explosions ont détruit une grande partie du théâtre, causées par « quelque chose de très gros : deux bombes de 500 kilos » issues d’une « frappe aérienne », a-t-elle poursuivi, la nature des dégâts invalidant selon des experts consultés par l’ONG l’hypothèse avancée par Moscou d’une explosion à l’intérieur du site provoquée les forces ukrainiennes.

Or à ce moment, le ciel de Marioupol était « sous contrôle russe » et il n’y avait « pas d’avions ukrainiens », a expliqué Mme Pokaltchouk.

Des images satellites prises avant et après l’attaque montrent qu’il n’y avait « pas de présence militaire ukrainienne autour du théâtre », a-t-elle souligné. « Alors qu’il y avait tellement de cibles militaires, [les Russes] en ont choisi une civile », a-t-elle déploré.

Amnistie dénonce une attaque « délibérée » contre un site accueillant des centaines d’innocents, devant lequel le mot « enfant » était écrit en grandes lettres blanches, ce qui en fait « clairement un crime de guerre ».

Seule bonne nouvelle du rapport, le nombre de tués serait bien moins important qu’estimé, quand la municipalité de Marioupol avait fait état d’environ 300 morts.

« Amnistie internationale pense qu’au moins une douzaine de personnes sont mortes dans l’attaque, et sûrement bien davantage, et que beaucoup d’autres ont été sérieusement blessées », peut-on lire dans ce rapport, élaboré à partir des témoignages d’une cinquantaine de témoins et de nombreux experts.

« Cette estimation est inférieure aux précédents décomptes », reconnaît l’ONG. Elle est basée sur le fait que de nombreux réfugiés du théâtre avaient réussi à fuir Marioupol « les deux jours précédant l’attaque », et que « la plupart de ceux qui y étaient restés se trouvaient dans les sous-sols et dans d’autres zones protégées de l’explosion », détaille-t-elle.

« C’est une bonne nouvelle que moins de personnes aient été tuées. Mais ça ne change rien » sur le fond, souligne Oksana Pokaltchouk. Et d’insister : peu importe le nombre de victimes, l’attaque du théâtre de Marioupol est « clairement un crime de guerre ».