(Londres) Avec fanfares, fêtes et parades, les Britanniques célèbrent à partir de jeudi les 70 ans de règne de la reine Elizabeth, qui a invité mercredi ses sujets à se tourner vers l’avenir avec « confiance et enthousiasme ».

Joyeuse parenthèse d’unité patriotique dans un océan de morosité, cet hommage à une souveraine de 96 ans à la santé déclinante, toujours très populaire, doit durer jusqu’à dimanche, à la faveur d’un long week-end férié de quatre jours.

Jamais aucun souverain britannique n’a régné aussi longtemps qu’Élisabeth II, dernière souveraine planétaire, montée sur le trône à 25 ans, le 6 février 1952. Il est probable qu’aucun ne régnera aussi longtemps à l’avenir : le prince Charles a 73 ans, son fils William bientôt 40 ans.

Dans un message publié par le palais de Buckingham mercredi, la reine a remercié tous ceux qui se sont impliqués dans les célébrations de son règne, espérant que les festivités « créent d’heureux souvenirs ».

Alors que se prépare tranquillement en coulisses la succession avec son héritier le prince Charles, la reine a affirmé « être inspirée par la bienveillance » à son égard et a appelé les Britanniques à « se tourner vers l’avenir avec confiance et enthousiasme ».

À Londres, certains inconditionnels n’ont pas hésité à s’installer dès lundi près de Buckingham palace, bravant les averses et la grêle dans l’espoir d’entrevoir la reine.

Venue spécialement du Canada, Angie Hart, 51 ans, explique à l’AFP être autant impressionnée par « la pompe, le cérémonial » des célébrations, que par le « dévouement » de la reine à son pays.

Les rues alentour sont pavoisées de drapeaux anglais avec de grands portraits de la reine. Jusque dans les campagnes anglaises, les façades sont décorées aux couleurs nationales bleu-blanc-rouge.

De quoi oublier pour quelques jours les scandales politiques à répétition et l’inflation au plus haut depuis 40 ans.

Balcon

Les festivités commencent par la traditionnelle parade militaire annuelle du Salut aux couleurs, que le prince Charles devrait inspecter à cheval, comme le faisait jadis sa mère, avant un survol aérien.

La famille royale, limitée aux seuls membres qui ont des fonctions officielles et leurs enfants-histoire d’éviter les tensions-doit alors apparaître au balcon de Buckingham Palace autour de la souveraine, un moment très attendu.

Car la santé d’Élisabeth II inquiète : depuis une nuit à l’hôpital en octobre, elle a annulé quasiment toutes ses apparitions officielles.  

Frêle, elle a du mal à marcher et s’appuie sur une canne. Elle a cependant fait plusieurs apparitions surprise récemment, souriante et détendue, notamment à la célèbre exposition horticole du Chelsea Flower Show à Londres.

Vendredi, une messe d’Action de grâce aura lieu à la cathédrale Saint-Paul de Londres.  

Très impopulaires au Royaume-Uni, le prince Harry et sa femme Meghan, installés depuis deux ans en Californie, doivent y assister, tout comme le prince Andrew, fils cadet de la reine privé de toutes fonctions officielles depuis des accusations d’agressions sexuelles.

« Fêtes locales »

Samedi, un grand concert devrait rassembler quelque 22 000 personnes devant Buckingham palace, avec, parmi les têtes d’affiche, Alicia Keys, Queen + Adam Lambert et Diana Ross.  

Le prince Charles et le prince William doivent y rendre un hommage à leur mère et grand-mère.

Dimanche, des millions de Britanniques participeront à des milliers de déjeuners de quartier et fêtes de rues.  

Pour Robert Lacey, auteur de nombreux ouvrages sur la monarchie, ces fêtes locales « sont aussi importantes que les cérémonies télévisées sur le Mall », la grande artère menant au palais de Buckingham.  

« Elles sont l’exemple de comment la Grande-Bretagne se voit à travers la monarchie, en tant que véhicule de notre histoire, de nos traditions et de nos valeurs », dit-il à l’AFP.

Les pubs ont été autorisés à fermer plus tard et espèrent pouvoir récupérer un peu des pertes dues à la COVID-19. Les ventes de vin pétillant, de Dubonnet (apéritif apprécié de la reine) et de gâteaux Victoria Sponge Cake ont déjà explosé.

En clôture, 10 000 personnes paraderont dans le centre de Londres pour rendre hommage à une souveraine qui a traversé imperturbable les époques et les crises, symbole rassurant de stabilité, dont les Britanniques apprécient le sens du devoir et parfois l’humour.  

Un sondage pour The Sun la situait cette semaine à 91,7 % d’opinions favorables, contre 67,5 % pour le prince Charles.

Que se passera-t-il ensuite ?

« Ne sous-estimez jamais le pouvoir de la monarchie et à quel point elle est imbriquée dans l’histoire britannique. Et à quel point ce sera traumatisant quand tout cela vacillera, comme cela pourrait se produire dans deux, trois ou quatre ans », déclarait récemment l’historien Anthony Seldon, lors d’une conférence à la London School of Economics.