(Stockholm) Inquiètes de la réaction de la Russie à leurs probables demandes d’adhésion à l’OTAN, la Suède et la Finlande cherchent des assurances de protection pendant les mois nécessaires à leur entrée formelle dans l’alliance atlantique, à l’image d’accords signés mercredi avec Londres.

Des « arrangements » avec des grands pays de l’OTAN

Ces derniers mois, Stockholm et Helsinki ont multiplié les contacts et les rencontres internationales pour s’assurer le soutien des membres de l’OTAN à leur adhésion.  

Mais selon les dirigeants des deux pays, les discussions ont aussi visé plus récemment à obtenir des assurances, notamment des membres les plus puissants, sur la protection de la Suède et de la Finlande.

Durant la période d’adhésion – qui implique notamment une ratification par tous les membres, ce qui prend plusieurs mois – le candidat reste un non-membre, qui ne peut pas bénéficier du parapluie de l’article 5 de défense mutuelle.

Le secrétaire général de l’alliance, le Norvégien Jens Stoltenberg, a toutefois estimé qu’il serait possible de trouver des « arrangements ». Pour le cas suédois, il a ainsi évoqué une « présence accrue » des forces de l’OTAN en mer Baltique ou dans son proche voisinage.

« Si la Suède était attaquée et se tournait vers nous pour nous demander du soutien, nous le lui apporterions », a promis mercredi Boris Johnson en signant avec son homologue suédoise Magdalena Andersson une « déclaration politique de solidarité », y compris militaire.

Un accord similaire a été signé avec le président finlandais en fin de journée à Helsinki.

« Ce n’est pas aussi solide que l’article 5, mais c’est ce que nous aurons durant la période intermédiaire », explique à l’AFP Joakim Paasikivi, enseignant en stratégie militaire à l’école supérieure de défense de Suède.

Il peut s’agir par exemple d’augmenter sa présence militaire dans le secteur, ou de dire qu’on soutiendra la Suède et la Finlande en cas de besoin, souligne ce lieutenant-colonel.

Membres de l’Union européenne, la Suède et la Finlande bénéficient aussi de la clause d’assistance mutuelle prévue par l’article 42-7.

Côté américain, des responsables interrogés par l’AFP se bornent à assurer que des solutions seront trouvées, mais qu’il est prématuré d’en parler.

Quel calendrier d’adhésion ?

Une fois la décision prise par un pays tiers d’adhérer, les membres de l’OTAN doivent accepter à l’unanimité de l’inviter à les rejoindre, lançant alors des pourparlers d’adhésion.

Le patron de l’OTAN ayant promis d’accueillir la Suède et la Finlande « à bras ouverts » en cas de candidature, cette première phase du processus peut être rapide, de l’ordre de « quelques jours à quelques semaines », estime Charly Salonius-Pasternak, chercheur à l’Institut finlandais des affaires internationales.

De quoi être prêt pour un sommet de l’OTAN prévu fin juin à Madrid, selon les analystes.

Reste alors le processus de ratification par l’ensemble des 30 États membres, généralement parlementaire.

« Pour l’instant il est difficile de voir un pays qui essaierait vraiment de ralentir ou d’arrêter le processus », note M. Salonius-Pasternak.

Un pays pourrait toutefois profiter de l’occasion pour négocier son soutien.  

Le président de la Croatie Zoran Milanovic a ainsi appelé le Parlement de son pays à rejeter l’adhésion tant que la Bosnie voisine ne réformerait pas une loi électorale.

Au total, le processus d’adhésion a pris une année pour le 30e membre, la Macédoine du Nord.

Le ministre finlandais des Affaires étrangères Pekka Haavisto a estimé mardi que la date la plus précoce à ses yeux pour entrer dans l’OTAN serait en octobre.

Quelle réponse russe ?

Avant même la guerre en Ukraine, Moscou a mis en garde la Suède et la Finlande contre les « conséquences politiques et militaires d’une adhésion ».

Joakim Paasikivi, enseignant en stratégie militaire à l’Ecole supérieure de défense de Suède, s’attend à « une rhétorique russe agressive et menaçante », ainsi qu’à des actes « hybrides comme des cyberattaques, plus graves que celles que nous avons connues par le passé », visant le système financier ou les infrastructures énergétiques, ou encore des violations des frontières aériennes ou maritimes.

Les experts interrogés par l’AFP jugent très improbable voire exclu le scénario d’une attaque militaire, notamment parce que l’armée russe est largement mobilisée en Ukraine.

Selon M. Salonius-Pasternak, Moscou pourrait toutefois imaginer de bloquer de facto le processus d’adhésion « en occupant une île ou une portion de territoire », la Russie ayant « récemment pris des décisions ne semblant pas très rationnelles dans notre perspective ».

« Mais je pense que les pays de l’OTAN verraient venir et que cela ne serait pas trop difficile pour la Finlande à gérer militairement ».