Un missile russe a soufflé d’un coup une école rurale de l’est de l’Ukraine, tuant 60 civils qui s’y étaient réfugiés. Un bilan de guerre toujours plus lourd à la veille du 9 mai, « jour de la Victoire » en Russie.

« Pas plus tard [que samedi], dans le village de Bilogorivka, dans la région de Louhansk, une bombe russe a tué 60 civils », a affirmé le président Volodymyr Zelensky lors d’une intervention en visioconférence à une réunion du G7, dimanche. « Ils essayaient de trouver refuge dans le bâtiment d’une école ordinaire qui a été visée par une frappe aérienne russe. »

Des 90 personnes sur place au moment de la frappe, 27 ont pu être sauvées, a annoncé le gouverneur de la région, Serguiï Gaïdaï, à la télévision de langue russe Current Time TV.

Sur des images, un bâtiment en ruine, envahi par les flammes. Des équipes de secours s’activent parmi les décombres. Une vision qui n’est pas sans rappeler celle du théâtre de Marioupol, où on estime que 600 civils ont perdu la vie dans des frappes russes le 16 mars dernier.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, s’est dit « horrifié » par le bombardement, selon son porte-parole.

« Comme la Russie ne parvient pas à détruire l’armée ukrainienne sur le terrain, elle s’en prend à des civils, estime Dominique Arel, titulaire de la Chaire d’études ukrainiennes à l’Université d’Ottawa. C’est ce qui vient de se produire dans le Donbass, dans cette école, dans un tout petit village. »

Pas de capitulation en vue à Marioupol

À Marioupol, ville du sud-est de l’Ukraine désormais quasi entièrement sous contrôle russe, les militaires ukrainiens qui résistent toujours dans l’immense aciérie Azovstal ont exclu de se rendre.

« Capituler n’est pas une option, car notre vie n’intéresse pas la Russie. Nous laisser en vie ne lui importe pas », a déclaré Ilya Samoïlenko, un officier du renseignement.

La veille, l’opération d’évacuation des centaines de civils réfugiés dans les tunnels du complexe métallurgique avait été complétée avec succès.

Marioupol pourrait être le théâtre d’une cérémonie en l’honneur du jour de la Victoire du 9 mai, où les Russes célèbrent la victoire soviétique sur l’Allemagne nazie, selon M. Arel.

Commémorer le 8 ou le 9 mai ?

La commémoration de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe et en Russie n’a pas lieu le même jour. En Europe, les cérémonies ont lieu le 8 mai, jour de la capitulation de l’Allemagne nazie. Le lendemain, l’acte de capitulation a été signé à Berlin, ce qui est devenu le jour de la Victoire pour les Soviétiques. Le 9 mai est souligné depuis par un défilé à Moscou.

Or, le choix de célébrer à l’une ou l’autre de ces dates n’a rien d’anodin pour les anciennes républiques soviétiques, remarque Yann Breault, spécialiste de la Russie et des États postsoviétiques. « D’un côté, pour les pays baltes, pour l’Ukraine, la grande victoire de Staline sur Hitler ne peut pas être célébrée, parce que Staline est un monstre comme Hitler, explique-t-il. Mais pour les Russes, qui ont fait le sacrifice de 25 millions de morts, c’est quelque chose de sacré qui a été instrumentalisé par [Vladimir] Poutine, ajoute-t-il. On a instauré une fierté nationale autour de la mémoire de ce combat-là. »

Selon Dominique Arel, la célébration de la victoire militaire est moins présente en Europe qu’en Russie. « L’accent [des commémorations] en Occident et en Ukraine n’est pas mis sur l’État, mais sur les gens, sur le peuple. Alors que l’accent en Russie est mis sur l’État, sur la force », observe-t-il.

L’offensive se poursuit dans l’Est

« L’ennemi [russe] ne cesse pas ses opérations offensives […] afin d’établir un contrôle total sur les régions de Donetsk, de Louhansk et de Kherson et de maintenir le couloir terrestre entre ces territoires et la Crimée occupée », a averti l’état-major de l’armée ukrainienne dimanche.

Un hôpital a notamment été touché à Severodonetsk, tandis que des offensives se sont poursuivies à Lyman, Popasniansky, Severodonetsk et Avdiivka.

La ville de Popasna est désormais en ruine et les militaires ukrainiens s’en sont retirés pour occuper de « meilleures positions », selon la même source. Côté russe, le ministère de la Défense a revendiqué dimanche la destruction du « poste de commandement d’une brigade mécanisée » ukrainienne, dans la région de Kharkiv (nord-est), de même que du « centre de communication de l’aérodrome militaire de Chervonoglinskoye », dans le sud-ouest du pays.

Mais toutes ces villes tiennent encore, rappelle Dominique Arel. « C’est difficile de savoir ce qui se passe sur le terrain, mais il n’y a pas d’autres villes [que Marioupol] qui sont tombées dans l’Est. »

Avec l’Agence France-Presse

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