On les a rencontrés dans les trains, dans la rue, dans les marchés, dans leur boutique, à la plage et même dans les marais salants. Ils ont de 22 à 89 ans. Ils habitent à Lille, Roubaix, Paris, Bordeaux, Guérande, Rosult ou Ghétary. À tous et toutes, les mêmes questions : pour qui allez-vous voter ? Pourquoi ? De quoi avez-vous envie qu’on vous parle ? À 15 jours de la présidentielle, 24 Français et Françaises dévoilent leur vision de la politique, de leur pays et nous disent ce qu’ils pensent des candidats à l’élection.

Nouvelle-Aquitaine

Pascale Roger, 60 ans, Angoulême

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Pascale Roger

« Macron a beaucoup promis, mais il n’a rien fait. Rien à redire sur sa gestion de la crise de la COVID. Les entreprises ont eu de l’aide, les salariés ont touché leurs salaires. Mais je ne voterai pas pour lui. Il a baissé l’aide au logement des étudiants de 5 euros par mois. C’est mesquin. De toute façon, je suis très déçue par la politique. Ils ont tous des casseroles. Je crois que je vais voter blanc. Par dépit. »

Lorisse Saget, 53 ans, Bordeaux

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Lorisse Saget

« On est tellement dans la merde que je pourrais bien voter pour Zemmour, juste pour voir ce qui va se passer. Ça ne peut pas être pire que celui qu’on a. Au moins, Zemmour a un parcours différent. Et il a raison, la France, c’était mieux avant. Virer les étrangers ? Il tient le discours qui se vend, c’est tout. On peut dire ce qu’on veut quand on n’est pas au pouvoir. Mais je ne me fais pas d’illusions. On va remanger du Macron pendant cinq ans… »

Micaela Petit, 22 ans, Bordeaux

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Micaela Petit

« C’est ma première élection présidentielle, je veux que mon vote ait du sens. Alors je vote vert. J’ai encore un espoir qu’on mette au pouvoir quelqu’un qui a ces préoccupations-là. Ça va permettre de limiter les dégâts… même si c’est déjà trop tard. Il faut que la planète soit une priorité. Il ne faut pas seulement que les candidats en parlent. Il faut que ce soit leur idée principale. »

Éric Lebeau, 64 ans, Bordeaux

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Éric Lebeau

« Le gouvernement donne trop d’aide, ça nous coûte cher. Il y a des gens qui ne travaillent pas assez et d’autres qui travaillent beaucoup. Il y en a qui profitent du système. Le filet social français, c’est une bonne chose. Mais on n’a pas les moyens. Macron n’a pas fait les réformes nécessaires. Moi, ce sera à droite, forcément. Mais je ne sais pas trop qui. Pécresse est trop au centre… et le centre ne prend pas de décisions. J’aime bien Zemmour. Il répond à tout le monde et ne rechigne pas devant les interviews difficiles. »

Dilili Jacquard, 26 ans, Bordeaux

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Dilili Jacquard

« Je sais qu’il n’a aucune chance, mais Philippe Poutou, c’est pour moi le plus pertinent. J’aime ses réflexions sur les conditions de travail, son gros ancrage dans l’anticapitalisme. Par contre, il ne parle pas assez de la précarisation des personnes racisées et des violences faites aux femmes. Il ne répond pas à tous mes idéaux, mais c’est le moins pire. »

Jérôme Nivelle, 56 ans, Bordeaux

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Jérôme Nivelle

« Avant, je votais utile. Mais c’est terminé. Cette fois, c’est Vert au premier tour. Yannick Jadot est capable d’être écolo et de faire face aux défis d’un monde militarisé. Ça me va. Rien contre Macron, cela dit. Il a été critiqué, il peut être agaçant. Mais il est jeune, moderne, intelligent. Il a du bon sens. Moi, je veux un ou une présidente avec des valeurs de justice, d’équité, de culture. Et surtout qu’il apporte la paix et l’espoir, ne serait-ce que le temps de nos courtes vies. Avec cette guerre en Ukraine, je finis par ne penser qu’à travers ce prisme. »

Lino Theillon et Hugo Lemanseau, 25 ans, Ghétary

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Lino Theillon et Hugo Lemanseau

Lino : « Moi, c’est Macron. Il se contredit un peu, mais il est sincère. Il dit ce qu’il pense. Pour les jeunes, c’est pas mal. Je ne sais pas s’il a les meilleures idées, mais à mes yeux, c’est le plus crédible. Personne n’aurait fait mieux que lui dans la crise sanitaire. On peut le critiquer, mais il essaie d’améliorer les choses. On le sent impliqué. »

Hugo : « Après, les gens s’en foutent un peu ici. Ghétary, c’est la belle vie. On ne pense pas au malheur. On bosse fort, mais on est plus intéressés par le surf que par les problèmes. On vit dans une bulle. Peut-être que j’irai voter, mais je ne sais pas pour qui. J’ai cette application qui t’aide à mieux connaître tes préférences électorales. Ça peut aider… attends, je vous montre… ah merde, je l’ai supprimée ! »

Nicole Ourcade, 89 ans, Ghétary

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Nicole Ourcade

« Je vote depuis le début des années 1950 et j’ai toujours voté dans la même direction : à droite, monsieur ! De Gaulle, Pompidou, Giscard, Sarkozy, Chirac… Donc cette année, ce sera Valérie Pécresse. Ça correspond à ce que je pense. Elle me semble équilibrée en ce qui concerne les frontières, l’immigration. Elle ne veut pas que ce soit une passoire, mais elle n’est pas aussi piquante que Zemmour. Je préfère rester dans des choses plus apaisées. Je m’ennuie de Chirac. C’était pas le meilleur, mais c’était le plus sympa ! »

Hauts-de-France

Guillaume Havet, 47 ans, Rosult

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Guillaume Havet

« Macron nous avait promis une rente d’invalidité de 1000 euros et je suis toujours bloqué à 850 euros. Je me dis qu’il n’a pas eu de bol avec les gilets jaunes et la COVID. Sans ça, est-ce qu’il l’aurait fait ? Je ne sais pas. Mais il y a un truc qui m’insupporte, ce sont tous ces migrants. J’en ai ras le bol qu’ils viennent mettre leur famille ici à l’abri. On leur donne 600 euros par mois en plus de la sécu [assurance maladie]. Ils ont tout. Qu’ils viennent, à la limite, mais ils ne font rien ! Ils veulent aller en Angleterre ? Qu’on leur donne un bateau ! Ça ne veut pas dire que suis pour Zemmour, hein ? Il est bon à rien. Il n’a jamais fait de politique. Je voterais Marine Le Pen à la rigueur, si elle me promet 1000 euros par mois. Faut comprendre. Ici, on ne fait que survivre. Heureusement qu’on a cinq enfants : il y a les allocations familiales… »

Glenn Edeling, 57 ans, Roubaix

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Glenn Edeling

« Il n’y a rien qui change. Ils sont tous pareils. Ils sont dirigés par le système de la mondialisation. Macron va dans le même sens. Il y a cinq ans, je pensais qu’il ferait mieux. Mais il ne peut rien changer. Le problème, c’est que les autres candidats sont nuls. Zemmour est nul. Son élection serait une catastrophe pour la France. Son discours sur les immigrants, je ne comprends pas. Lui-même vient de l’immigration ! »

Lousshaine El-Ansary, 33 ans, Roubaix

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Lousshaine El-Ansary

« Moi, je ne vote jamais. Ils ne tiennent pas leurs promesses. Ils font mine de nous écouter et après, ils font ce qu’ils veulent. Le problème en France, c’est la division. Les immigrants comme moi, on est mal vus. Les étrangers ont été isolés au lieu d’être mélangés. J’ai acheté un terrain dans un petit village à 30 km d’ici. Les habitants ont tout fait pour empêcher la vente. Ils ont dit qu’ils ne voulaient pas voir quelqu’un comme moi. Il a fallu que je passe par la justice pour que le vendeur accepte de finaliser la vente… »

Émilie Heras, 38 ans, et Delahia Saoudi, 47 ans, Roubaix

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Émilie Heras et Delahia Saoudi

« Quelle déception, ce Macron ! Il s’est foutu de notre gueule. Il ne respecte pas les pauvres et enrichit les riches.

— Même diagnostic pour moi. Tout ce qui nous arrive, c’est à cause de lui. On n’est plus comme on vivait avant. Tu paies le loyer, l’électricité, le gaz et après, il ne te reste plus rien pour aller au ciné.

— Et on ne parle même pas de réparer sa voiture ! Ou la laveuse si elle tombe en panne… On n’a pas les moyens.

— Moi, je ne prends plus ma voiture !

— Ils nous ont donné un “chèque énergie” pour compenser la hausse des prix de l’énergie. Cent euros pour un an !

— Ridicule ! »

Nathalie Yergé, 69 ans, Lille

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Nathalie Yergé

« Je sais que je veux voter à gauche, mais pour qui ? Hidalgo n’a pas assez d’étoffe. Elle veut augmenter le salaire des profs, mais pas des soignants. Pourquoi ? Mélenchon, c’est un tribun, mais il est trop autoritaire. Il me reste qui ? Le communiste ? Certainement pas ! C’est vieux, le communisme ! C’est une drôle de campagne, en fait. Les gens sont préoccupés par autre chose. Personnellement, moi, c’est le pouvoir d’achat. Quand je fais mes courses, j’achète toujours la même chose. Je vois bien que les prix ont augmenté. »

François Carpentier, 42 ans, Lille

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François Carpentier

« Ce sera ma troisième élection comme abstentionniste. Je suis trop déçu par les politiques. Ils n’ont pas de vraie conscience politique pour le peuple. Ils ne pensent qu’à leur carrière. C’est une élite qui est très loin de la réalité. Avant, j’avais cette idée qu’ils avaient une vocation. Mais pas du tout. Il y a tellement de promesses non tenues. Je suis désabusé. Je suis même dégoûté ! »

Île-de-France

Rafik Djallali, 34 ans, Paris

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Rafik Djallali

« Moi, c’est Zemmour. Un choix par défaut. Je ne partage pas du tout ses idées. Mais s’il est élu, il va se discréditer, les gens vont comprendre que les extrêmes ne fonctionnent pas plus que la droite et la gauche. Après, on pourra commencer à repenser notre système politique. »

Emma Bazire et Jean Reglart, 24 ans, Paris

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Emma Bazire et Jean Reglart

Jean : « Mélenchon a le programme le plus ambitieux, le plus sérieux. Économique. Environnemental. C’est basé sur des mesures concrètes, pas en l’air. Son idée d’une VIRépublique me plaît aussi. Si on veut que la gauche ait une chance face à la droite, il faut voter pour lui. »

Emma : « Les gens ont besoin de candidats plus tranchés, avec des idées radicales. Le problème avec Macron, c’est qu’il n’a aucune radicalité, pas d’idées. Mélenchon, beaucoup plus. Il est notre seule chance d’une élection réjouissante. Sinon, après, on ne peut plus croire à grand-chose… »

Élise Deneuville, 73 ans, et Fernande Noiaim, 63 ans, Paris

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Élise Deneuville et Fernande Noiaim

Élise : « J’étais sur les barricades en mai 68, jeune homme ! Mon cœur à gauche est inébranlable ! J’aime bien Anne Hidalgo et le Parti socialiste. Mais une femme à la tête du pays, c’est impossible. Nous sommes trop méditerranéens, trop machistes. »

Fernande : « Moi, je pense que tous les candidats sont à côté de la plaque. Ils parlent d’immigration, mais ça n’intéresse les Français que moyennement. On veut entendre parler de pouvoir d’achat, du système de santé. Pas du Grand Remplacement ! »

Pays de la Loire

Christian Lefeuvre, 71 ans, Saillé

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Christian Lefeuvre

« Macron a une carrure internationale. S’il y a un gros truc comme la guerre en Ukraine, il se montre présent. Il marque des points avec cette guerre. Il y en a qui sont déçus, mais il n’a pas été gâté depuis cinq ans. Il a eu les gilets jaunes, la COVID et maintenant la guerre, c’est le pompon ! Il est jeune, il n’a peur de rien. Ses idées ? Pourquoi pas. Il y a un peu de droite, un peu de gauche. Finalement, c’est mieux comme ça. Il prend le meilleur des deux côtés. »

Théo Bertrand, 26 ans, Guérande

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Théo Bertrand

« La politique, c’est un peu du flanc. Ils sont tous pareils. Mais je suis plus sensible aux idées de gauche. Les valeurs d’entraide. De solidarité. À droite, c’est trop individualiste. Regardez ce qu’ils disent sur l’immigration. Zemmour a dit que les réfugiés ukrainiens ne devraient pas venir en France. Et Marine Le Pen qui dit oui aux Ukrainiens, mais non aux Afghans. C’est débile ! Tous ces gens fuient la guerre pareil ! Ça fait peur, ces discours d’extrême droite… »

Jérôme Murat, 50 ans, Mesquer

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Jérôme Murat

« Mon quatrième arrière-grand-père était un maréchal de Napoléon… et moi, je reste dans la veine centre droit. Je trouve que Macron est à la hauteur. Il dirige un peu seul, parce qu’il s’est entouré de gens qui ne lui feront pas d’ombre. Il n’a pas une structure très forte derrière lui. Il a eu beaucoup de crises qui ont limité le champ de ses réformes. Et il a eu des maladresses dans ses façons de communiquer. Mais c’est un type intelligent. Il est dans une dimension européenne qui m’intéresse. De toute façon, il n’y a personne d’autre. »

Qui sont les candidats ?

Emmanuel Macron (La République en marche)

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Emmanuel Macron

Le président sortant est largement en tête dans les sondages. Sa réélection est probable. 27,5 % des intentions de vote*.

Marine Le Pen (Rassemblement national)

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Marine Le Pen

La challenger numéro 1. Accédera-t-elle au second tour comme en 2017 ? Les sondages semblent l’indiquer. 20 % des intentions de vote.

Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise)

PHOTO THOMAS PADILLA, ASSOCIATED PRESS

Jean-Luc Mélenchon

Il fait une belle remontée. Mais il faudrait que les électeurs de gauche fassent front uni pour qu’il passe le premier tour. Rien n’est impossible. 15 % des intentions de vote.

Éric Zemmour (Reconquête)

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Éric Zemmour

L’ancien chroniqueur devenu candidat devrait voler quelques votes à Marine Le Pen, à cause de son discours sans compromis contre l’immigration. Mais il ne parvient pas à faire oublier qu’il était un admirateur de Poutine. 10 % des intentions de vote.

Valérie Pécresse (Les Républicains)

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Valérie Pécresse

Elle a bien essayé, mais le courant ne passe pas. Et elle ne parvient pas à trouver son espace entre Macron et Le Pen. 10 % des intentions de vote.

Yannick Jadot (Europe Écologie les Verts)

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Yannick Jadot

Il pensait que c’était son année. Il faut croire que son discours écologique n’est pas assez convaincant. En baisse constante dans les sondages. 4,5 % des intentions de vote.

Fabien Roussel (Parti communiste)

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Fabien Roussel

Le candidat communiste a fait une belle campagne. Pour la première fois depuis très longtemps, son parti dépasse même le Parti socialiste. 3,5 % des intentions de vote.

Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France)

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Nicolas Dupont-Aignan

Le candidat souverainiste de droite dure parvient encore à tirer son épingle du jeu. Sans plus. 3 % des intentions de vote

Et aussi…

  • Jean Lassalle (Résistons) 3 %
  • Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste) 1,5 %
  • Anne Hidalgo (Parti socialiste) 1,5 %
  • Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière) 0,5 %

* Sondage Elabe pour L’Express et BFM TV, en partenariat avec SFR, en date du 22 mars.