Le président Zelensky lance un appel aux citoyens du monde entier

« Un mois, déjà. C’est long. Ça me brise le cœur, comme celui de tous les Ukrainiens, et de chaque personne qui vit librement sur cette planète. »

Debout dans la nuit de Kyiv, devant les hautes colonnes qui ornent la façade de la Rada, le parlement ukrainien, le président Volodymyr Zelensky livre son message à la caméra en ukrainien et en anglais. Après s’être adressé ces derniers jours aux élus canadiens, américains, français et japonais, entre autres, M. Zelensky s’est tourné vers les citoyens du monde entier qui ont les yeux rivés sur son pays depuis quatre semaines.

« Le monde doit arrêter la guerre », dit-il dans cette vidéo publiée mercredi soir, un mois après le début des premières frappes russes. C’est pourquoi, enchaîne-t-il, il demande aux citoyens de descendre dans les rues des villes du monde entier pour protester contre l’invasion de son pays par la Russie.

« Manifestez votre appui. Manifestez de vos bureaux, vos maisons, vos écoles et vos universités. Manifestez au nom de la paix ! »

« Allez-y avec des symboles ukrainiens pour défendre l’Ukraine, pour défendre la liberté, pour défendre la vie ! », implore le président.

Retrouvez-vous sur les places, dans la rue, montrez-vous et faites-vous entendre ! Dites que les gens comptent, que la liberté compte, que la paix compte, que l’Ukraine compte.

Le président Volodymyr Zelensky

Quatre semaines après le début de l’invasion russe, on dresse un bilan aux chiffres ahurissants. Celui du nombre de victimes civiles, encore inconnu, mais qui se compte certainement en « milliers de morts et de blessés », selon les États-Unis. Celui du nombre de réfugiés – 10 millions de personnes ont fui leur foyer, dont plus de 3,6 millions qui ont quitté le pays, selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Et celui des soldats morts au combat, soit au moins 1300 militaires ukrainiens, et de 7000 à 15 000 soldats russes, selon les estimations dévoilées mercredi par l’OTAN.

L’appel du président Zelensky survient alors que trois grands sommets se tiendront ce jeudi à Bruxelles : la réunion du G7, le sommet du Conseil européen ainsi que celui de l’OTAN. Volodymyr Zelensky s’adressera d’ailleurs par visioconférence aux délégations présentes à ce dernier sommet.

Mercredi, plusieurs gouvernements ont annoncé de nouvelles livraisons d’armes à l’Ukraine. Le Royaume-Uni enverra 6000 missiles antichars supplémentaires à Kyiv, en plus des 4000 déjà livrés. La Suède et l’Allemagne ont annoncé l’envoi de 5000 et 2000 armes antichars respectivement. Les forces ukrainiennes ont déjà reçu 1000 armes antichars et 500 lance-missiles sol-air de type Stinger pris dans les réserves de la Bundeswehr, l’armée allemande.

Des crimes de guerre, selon les États-Unis

Après les déclarations du président des États-Unis, Joe Biden, la semaine dernière, qui avait qualifié le président de la Russie, Vladimir Poutine, de « criminel de guerre », son secrétaire d’État, Antony Blinken, a révélé que son pays détenait des informations détaillées confirmant que « des membres des forces russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine ».

PHOTO KEVIN LAMARQUE, ARCHIVES REUTERS

Antony Blinken, secrétaire d’État des États-Unis

Nous avons vu de nombreux rapports crédibles d’attaques sans distinction et d’attaques visant délibérément des civils, ainsi que d’autres atrocités.

Antony Blinken, secrétaire d’État des États-Unis

Le chef de la diplomatie américaine a notamment cité la destruction « d’immeubles résidentiels, d’écoles, d’hôpitaux, d’installations essentielles, de véhicules civils, de centres commerciaux et d’ambulances », qui a fait « des milliers de morts et de blessés ».

M. Blinken précise qu’il reviendra aux tribunaux de déterminer les responsabilités juridiques de la Russie. L’une de ces instances sera vraisemblablement la Cour pénale internationale (CPI), note Bruno Gélinas-Faucher, professeur de droit à l’Université de Moncton. Le 3 mars dernier, le procureur de la CPI, Karim Khan, a annoncé l’ouverture d’une enquête sur la situation en Ukraine.

« Le procureur de la CPI fait sa propre enquête et il devra en arriver à ses propres conclusions au sujet de la commission des crimes de guerre avant de déposer des accusations », dit-il. Mais la déclaration de M. Blinken laisse entendre que les États-Unis accepteront de transmettre des éléments de preuve au procureur de la CPI. « C’est d’ailleurs un engagement que le Royaume-Uni a déjà pris », dit M. Gélinas-Faucher. Les États-Unis, souligne-t-il, disposent de plus grandes ressources d’enquête et de renseignement que le procureur de la CPI.

Les États-Unis, comme la Russie d’ailleurs, ne reconnaissent pas l’autorité de la Cour pénale internationale, établie à La Haye, aux Pays-Bas. Dans ce contexte, la transmission d’informations des Américains à la CPI « serait en soi assez remarquable », estime M. Gélinas-Faucher.

Bombes à Kyiv, siège à Marioupol

Depuis mardi, l’armée russe a reculé de plus 30 km à l’est de Kyiv et a commencé à établir des positions défensives sur plusieurs fronts en Ukraine, a indiqué mercredi un haut responsable du Pentagone.

À Marioupol, « près de 100 000 personnes dans des conditions inhumaines » sont toujours piégées dans les ruines de la ville, « en état de siège total, sans nourriture, sans eau, sans médicaments, sous des bombardements constants », a alerté mercredi Volodymyr Zelensky.

PHOTO ALEXANDER ERMOCHENKO, REUTERS

Des résidants de la ville assiégée de Marioupol transportent de l’aide humanitaire livrée par des soldats russes.

Au premier hôpital en importance de Marioupol, les patients sont soignés dans les sous-sols, a indiqué le conseil municipal sur sa page Telegram.

« Les chandelles restent la principale source de lumière. Ils essaient d’économiser le carburant le plus possible, donc les générateurs diésel ne sont utilisés que pour les opérations complexes », a raconté le conseil, ajoutant que de 600 à 700 habitants des environs se sont également réfugiés dans cet hôpital.

Avec l’Agence France-Presse et l’Associated Press