Un vidéo-journaliste américain a été tué sous les tirs russes dimanche à Irpin, a confirmé le service de police de la région de Kyiv. C’est le premier journaliste étranger mort en Ukraine depuis le début de la guerre.

Brent Renaud, 50 ans, était un vidéo-journaliste et documentariste qui avait collaboré avec plusieurs grands médias américains, dont le New York Times. Un autre journaliste a été blessé lors de l’attaque survenue dans la banlieue nord-ouest de la capitale, cible des forces russes depuis plusieurs jours.

« La profession de journaliste est un risque, mais le citoyen américain Brent Renaud a payé sa vie pour avoir tenté de montrer la cruauté et l’impitoyabilité de l’agresseur [russe] », a indiqué le chef de police de la région de Kyiv, Andriy Nebytov, sur Facebook.

Le New York Times s’est dit « profondément attristé » par la mort d’un de ses anciens collaborateurs, soulignant qu’il n’était pas en Ukraine sous son assignation, comme le rapportait dimanche le Kyiv Post. La carte de presse qu’il portait lui avait été remise pour un reportage datant de plusieurs années.

« La mort de Brent est une perte terrible. Des journalistes courageux comme Brent prennent d’énormes risques pour témoigner et dire au monde la dévastation et la souffrance causées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie », a déploré le directeur adjoint de la rédaction Cliff Levy sur Twitter.

C’est le premier journaliste étranger mort en sol ukrainien depuis le début de l’invasion russe, selon l’Agence France-Presse. Début mars, cinq journalistes du média britannique Sky News ont été la cible de tirs russes, alors qu’ils prenaient la route de Kyiv. La journaliste Stuart Ramsay et un caméraman, désormais hors de danger, avaient été blessés par balle.

« Ils ont continué à tirer »

Blessé, l’autre journaliste américain, Juan Arredondo, a de son côté raconté ce qui leur était arrivé dans une vidéo filmée depuis l’hôpital où il a été transporté, publiée sur les réseaux sociaux.

« Nous étions partis filmer des réfugiés en train de quitter la zone. On est montés dans une voiture, quelqu’un a proposé de nous emmener de l’autre côté du pont », a-t-il déclaré.

« On a passé un point de contrôle et ils se sont mis à nous tirer dessus. Le conducteur a fait demi-tour et ils ont continué à tirer », a-t-il ajouté, sans préciser de quel camp pouvaient venir les tirs.

Les autorités ukrainiennes ont rapidement accusé leurs ennemis russes d’avoir tiré sur les journalistes américains, mais l’origine des tirs était difficile à établir dans l’immédiat. Les combats sont intenses dans la région d’Irpin, et des journalistes de l’AFP y ont entendu dimanche des tirs d’artillerie et d’armes plus légères.

« Nous consultons les Ukrainiens pour déterminer comment cela est arrivé », a déclaré sur la chaîne américaine CBS Jake Sullivan, conseiller national à la sécurité du président américain Joe Biden, en dénonçant un meurtre « choquant et horrifiant ».

« Les forces russes en Ukraine doivent cesser immédiatement toutes les violences contre les journalistes et les civils, et celui qui a tué Renaud, quel qu’il soit, devra rendre des comptes », a réagi dans un tweet le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York.

Brent Renaud, également écrivain, était originaire de Little Rock, dans l’État de l’Arkansas, selon le site internet de la Fondation Nieman pour le journalisme, liée notamment à l’université de Harvard, qui lui avait accordé une bourse en 2019.

Il avait travaillé sur de nombreux projets de films documentaires avec son frère Craig, et couvert des sujets aussi divers que la crise des réfugiés en Amérique centrale, les soubresauts politiques en Égypte et la lutte contre l’extrémisme en Afrique et au Moyen-Orient.

Ensemble, ils avaient notamment remporté en 2015 le prix Peabody pour une série documentaire sur une école pour enfants en difficulté à Chicago.

Plus récemment, Brent Renaud avait travaillé sur une manifestation du mouvement Black Lives Matter à Harrison, dans l’Arkansas, connue comme un sanctuaire pour suprémacistes blancs. Ses travaux avaient été publiés par le Boston Globe.

Avec l’Agence France-Presse