L’Ukraine veut « essayer » de négocier avec la Russie même si elle ne « croit pas trop » que des pourparlers prévus dimanche puissent mettre fin à l’invasion russe, a déclaré dimanche le président ukrainien Volodymyr Zelensky alors que Vladimir Poutine a annoncé mettre en alerte la force de dissuasion nucléaire de l’armée russe.

« Je dis les choses comme toujours franchement : je ne crois pas trop à un résultat », mais « il faut qu’on essaie », a déclaré M. Zelensky dans une déclaration vidéo, alors que des pourparlers sont prévus dimanche entre Ukrainiens et Russes à la frontière entre l’Ukraine et la Biélorussie.

Il a ajouté ne pas vouloir que les Ukrainiens pensent à l’avenir qu’il n’avait « pas essayé d’arrêter la guerre alors qu’il y avait une chance, même petite, de le faire ».

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky

De son côté, le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, a estimé que la Russie a entrouvert la porte des négociations car « son blitzkrieg a échoué ». Avant l’invasion, l’Ukraine avait appelé à des pourparlers avec Moscou, qui avait rejeté la proposition.

« La délégation ukrainienne rencontrera la [délégation] russe sans fixer de conditions préalables sur la frontière ukraino-biélorusse, dans la région de la rivière Pripiat », a déclaré un peu plus tôt la présidence sur les réseaux sociaux.

La ville la plus proche dans ce secteur, côté ukrainien, est Pripiat, mondialement célèbre depuis l’accident de la centrale nucléaire voisine de Tchernobyl en 1986. Cette localité, qui n’est plus habitée, est devenue ces dernières années un lieu touristique.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov a lui affirmé que la rencontre aura lieu dans la région de Gomel en Biélorussie sans plus de précisions. Cette région est frontalière notamment de la zone de Pripiat.

La présidence ukrainienne n’a pas précisé la date de ces pourparlers, mais la Russie a indiqué qu’ils auraient lieu dimanche. Selon Vladimir Poutine, une délégation russe est déjà présente à Gomel.

M. Poutine, qui a lancé jeudi ses forces sur l’Ukraine et appelé l’armée ukrainienne à renverser le pouvoir à Kiev, a plusieurs fois assuré qu’il était favorable à des discussions, à condition qu’elles se tiennent en Biélorussie, pays allié de Moscou qui sert de base arrière à l’invasion russe.

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Le président Vladimir Poutine

Le gouvernement ukrainien, de son côté, s’était jusqu’alors dit disposé à négocier dans n’importe quel pays en dehors de la Biélorussie qui est clairement dans le camp de la Russie.

M. Loukachenko a assuré au président ukrainien Volodymyr Zelensky que « les avions, hélicoptères et missiles [russes] déployés sur le territoire de la Biélorussie resteraient au sol pendant l’arrivée, les négociations et le départ de la délégation ukrainienne », a déclaré la présidence ukrainienne dimanche.

La « force de dissuasion » russe en alerte

Le président russe Vladimir Poutine a annoncé dimanche mettre en alerte la « force de dissuasion » de l’armée russe, qui peut comprendre une composante nucléaire, au quatrième jour de l’invasion de l’Ukraine par Moscou.

« J’ordonne au ministre de la Défense et au chef d’état-major de mettre les forces de dissuasion de l’armée russe en régime spécial d’alerte au combat », a déclaré M. Poutine lors d’un entretien avec ses chefs militaires retransmis à la télévision.

« C’est compris », a acquiescé le ministre de la Défense, Sergueï Choïgou.

M. Poutine a justifié cette décision par les « déclarations belliqueuses de l’OTAN » envers la Russie. Il a également critiqué les sanctions économiques prises à l’encontre de la Russie pour son invasion de l’Ukraine, selon lui « illégitimes ».

Les forces de dissuasion russes sont un ensemble d’unités dont le but est de décourager une attaque contre la Russie, « y compris en cas de guerre impliquant l’utilisation d’armes nucléaires », selon le ministère de la Défense.

Ces forces sont équipées de missiles, de bombardiers stratégiques, de sous-marins et de navires de surface. Sur le plan défensif, elles comprennent un bouclier antimissile, des systèmes de contrôle spatiaux, de défense antiaérienne et antisatellite.

Le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg a dénoncé dimanche la conduite « irresponsable » de Moscou après la mise en alerte par Vladimir Poutine de la « force de dissuasion » nucléaire de l’armée russe.

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Le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg

« C’est une rhétorique dangereuse. C’est une conduite qui est irresponsable », a déclaré Jens Stoltenberg sur la chaîne CNN.

Selon le secrétaire général de l’organisation, la nouvelle déclaration de Vladimir Poutine vient s’ajouter au discours « très agressif » venant de la Russie « depuis plusieurs mois et particulièrement ces deux dernières semaines ».

Ils ne menacent pas simplement l’Ukraine, mais également les pays alliés de l’OTAN, et demandent à ce que nous retirions toutes nos forces armées du flanc est de l’alliance.

Le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg

Poutine « fabrique des menaces », dénonce Washington

Les États-Unis ont dénoncé dimanche une escalade « inacceptable » par Moscou, qui a annoncé la mise en alerte de la « force de dissuasion » nucléaire de son armée, Washington accusant Vladimir Poutine de « fabriquer des menaces qui n’existent pas ».

Cette annonce de Moscou « signifie que le président Poutine continue l’escalade dans cette guerre, d’une manière qui est totalement inacceptable », a déclaré sur CBS l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield. « Nous devons continuer à dénoncer ses actions de la façon la plus sévère qu’il soit », a-t-elle ajouté.

M. Poutine « fabrique des menaces qui n’existent pas », a pour sa part dénoncé dimanche la porte-parole de la Maison-Blanche Jen Psaki, interrogée sur la question sur ABC.

Il s’agit d’un schéma répété que nous avons observé de la part du président Poutine durant ce conflit, qui est de fabriquer des menaces qui n’existent pas afin de justifier la poursuite d’une agression.

la porte-parole de la Maison-Blanche Jen Psaki

« À aucun moment la Russie n’a été menacée par l’OTAN ou l’Ukraine […] Nous allons résister à cela. Nous avons la capacité de nous défendre », a-t-elle ajouté.

L’Ukraine ne « capitulera pas » face à Moscou

Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a assuré dimanche que son pays ne « capitulera pas » face à Moscou, dénonçant la mise en alerte des forces de dissuasion nucléaires russes comme une tentative de « pression ».

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Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba

« Nous ne nous rendrons pas, nous ne capitulerons pas, nous ne céderons pas un seul centimètre de notre territoire », a lancé M. Kouleba lors d’une conférence de presse vidéo.

Évoquant des pourparlers prévus avec Moscou à la frontière ukraino-biélorusse, M. Kouleba a assuré que les Ukrainiens y allaient « pour écouter ce que la Russie va dire ».

Ce dont nous sommes prêts à discuter est la manière d’arrêter la guerre et de mettre fin à l’occupation de nos territoires.

Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba

Selon lui, la décision de Vladimir Poutine de placer les forces de dissuasion nucléaire russes en état d’alerte dimanche est « une tentative de faire monter les enchères et mettre la pression sur la délégation ukrainienne ».

En cas de guerre nucléaire, « ce sera une catastrophe pour le monde », mais cette menace « ne nous brisera pas », a conclu M. Kouleba.