(Washington) Les États-Unis ont demandé mardi une désescalade « vérifiable » à Moscou après l’annonce d’un retrait partiel des forces russes déployées autour de l’Ukraine, qui font craindre depuis des semaines une invasion et une guerre d’ampleur.

À la Maison-Blanche, Joe Biden a réitéré que toute incursion russe en Ukraine signifierait l’application de sanctions très sévères pour la Russie, qui « sont prêtes ».

Mais les « États-Unis restent ouverts à des échanges diplomatiques à haut niveau en étroite coordination avec nos alliés », selon la Maison-Blanche.

Troupes russes « toujours menaçantes »

Un début de retrait des soldats russes à la frontière ukrainienne évoqué mardi par Moscou « serait positif » mais « nous n’avons pas vérifié à ce stade » sa mise en œuvre, a-t-il ajouté, affirmant au contraire que ces troupes, évaluées désormais à « plus de 150 000 », demeuraient dans « une position menaçante ».

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Plus tôt mardi, le ministère russe de la Défense avait annoncé, avant une rencontre à Moscou entre le chancelier allemand Olaf Scholz et Vladimir Poutine, qu’une partie des 100 000 hommes déployés aux frontières ukrainiennes retournaient dès mardi en garnison, diffusant à cet effet des images de blindés chargés sur un train.

Le président russe a confirmé ce « retrait partiel ». La Russie poursuit cependant d’importantes manœuvres en Biélorussie, voisin prorusse de l’Ukraine, jusqu’au 20 février.

Les présidents français Emmanuel Macron et américain Joe Biden ont qualifié cette annonce de « premier signal positif », lors d’un entretien téléphonique, tout en convenant de la nécessité de « vérifier » ce début de retrait, selon Paris. « Les paroles, c’est bien. Nous attendons les actes », a noté le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian.

« Dialogue pragmatique »

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a lui aussi demandé mardi à son homologue russe Sergueï Lavrov une « désescalade vérifiable, crédible et significative » tout en soulignant qu’il reste possible de « résoudre la crise pacifiquement ».

Il a souligné que « toute nouvelle agression russe contre l’Ukraine engendrerait une riposte transatlantique rapide, sévère et unie », a indiqué le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price après un nouvel appel téléphonique entre les deux ministres.

« Un véritable retrait serait le bienvenu, mais nous n’avons pas encore vérifié que c’est bien le cas », a indiqué un responsable du département d’État ayant requis l’anonymat.

Selon la Russie, M. Lavrov a appelé son homologue américain à un « dialogue pragmatique ».

A Moscou, le chancelier allemand qui rencontrait au Kremlin le président russe Vladimir Poutine a salué dans l’annonce de ce retrait partiel « un bon signe », et estimé qu’il y avait « suffisamment de bases de discussion » avec la Russie « pour que les choses évoluent positivement ».

Vladimir Poutine a pour sa part assuré que « bien sûr » il ne voulait pas d’une guerre, tout en martelant que l’expansion de l’OTAN et les ambitions de l’Ukraine de rejoindre l’Alliance constituaient une menace pour la Russie.

MM. Poutine et Scholz ont assuré vouloir un processus de négociations sur les questions de sécurité en Europe.  

Compromis ?

Les Occidentaux et Moscou doivent trouver un compromis « sans abandonner leurs principes », a relevé M. Scholz.  

« Nous sommes prêts à aller sur le chemin de la négociation », a dit le maître du Kremlin.  

PHOTO MIKHAÏL KLIMENTYEV, AGENCE SPOUTNIK, VIA ASSOCIATED PRESS

La présidence russe a diffusé cette photo du rapprochement germano-russe. Le président Vladimir a encore eu recours à la longue table durant sa rencontre avec le chancelier allemand Olaf Scholz.

Il a cependant dénoncé le rejet par les Occidentaux de ses principales exigences, à savoir la fin de la politique d’élargissement de l’Alliance, l’engagement à ne pas déployer d’armes offensives à proximité du territoire russe et le retrait d’infrastructures de l’OTAN d’Europe de l’Est.

Les Occidentaux ont proposé en échange des pourparlers sur des sujets comme le contrôle des armements, les visites d’installations sensibles ou des discussions sur les craintes russes en matière de sécurité.

Pour M. Poutine, ces questions et ses exigences doivent faire partie d’un même « ensemble » de négociations.  

Dans la soirée, l’Ukraine a annoncé que des sites internet du ministère de la Défense et ceux de deux banques publiques avaient été visés par une cyberattaque, les autorités ukrainiennes pointant du doigt « l’agresseur », une expression généralement employée pour désigner la Russie.

Une attaque informatique d’ampleur visant les infrastructures stratégiques ukrainiennes afin de désorganiser les autorités est un des scénarios évoqués comme pouvant être le signe avant-coureur d’une offensive militaire classique.

« Hystérie sans fondement »

Les États-Unis affirment que la Russie a déployé plus de 150 000 militaires à la frontière ukrainienne et qu’elle peut lancer une invasion d’un jour à l’autre si elle le décide. Moscou dément en avoir l’intention, mais demande notamment la garantie que l’Ukraine n’adhérera pas à l’OTAN.

Le Parlement russe a demandé à M. Poutine de reconnaître l’indépendance des territoires sécessionnistes dans l’est de l’Ukraine.  

« Cette reconnaissance serait une claire violation des accords de Minsk », signés sous médiation franco-allemande et prévoyant à terme le retour de ces territoires sous le contrôle de Kiev, a aussitôt averti le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.

Kiev a salué l’union de l’Ukraine et de ses alliés occidentaux qui a « empêché toute nouvelle escalade de la part de la Russie ».

Lundi, les États-Unis, jugeant toujours le risque à son maximum, avaient abandonné leur ambassade à Kiev pour l’installer à Lviv, plus à l’ouest.

Des dizaines de pays ont exhorté leurs ressortissants à partir d’Ukraine, en dépit d’appels du président ukrainien Volodymyr Zelensky à garder le calme.

Le porte-parole du Kremlin a lui dénoncé une « hystérie sans fondement ».