(Paris) Une gauche plus que jamais dans l’impasse et une extrême droite à couteaux tirés entre Marine Le Pen et Éric Zemmour : le désordre était palpable lundi chez les opposants d’Emmanuel Macron dans une campagne présidentielle stable dans les intentions de vote.

Remportée par Christiane Taubira, la Primaire populaire, initiative citoyenne inédite en France rassemblant près de 400 000 votants, avait l’ambition de rassembler une gauche scotchée à un score historiquement bas dans les sondages, avec seulement un quart des intentions de vote.  

Mais elle n’a au bout du compte qu’ajouté de la confusion à la division.

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La candidate Christiane Taubira a remporté une « primaire de la gauche » inédite, mais qui n’a fait qu’ajouter à la confusion et à la division.

Les vibrants appels pour une « gauche unie et debout » de Christiane Taubira, après sa victoire dimanche soir, se sont fracassés sans surprise sur un mur de refus de ses rivaux : l’Insoumis Jean-Luc Mélenchon, l’écologiste Yannick Jadot, la socialiste Anne Hidalgo et le communiste Fabien Roussel.

Mme Taubira a contacté lundi tous ses concurrents, selon son entourage. Elle « leur a indiqué que le vote à la primaire populaire indiquait une aspiration puissante à l’union », et qu’on ne pouvait pas s’asseoir sur le vote de 400 000 personnes « .

Mais ils ont décliné l’offre de l’ancienne ministre de la Justice et déjà candidate en 2002 (2,32 % au premier tour).  

Le candidat du parti La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a notamment répondu par un texto rendu public, dans lequel il a dit avoir « un souvenir attristé de nos contacts précédents. Je t’avais crue quand tu regrettais le nombre de candidatures. Tu y rajoutes dorénavant la tienne. Mais je n’en veux qu’à ma confiance », regrette-t-il.

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Le candidat du parti La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.

« Une candidature de plus », a aussi répondu la candidate socialiste Anne Hidalgo, également par texto.

Le Parti socialiste menacé de disparaître

En prenant des points à Yannick Jadot et surtout à Anne Hidalgo, Mme Taubira, a de facto affaibli ses rivaux les plus proches, notamment le Parti socialiste (PS), ancien parti de gouvernement ayant donné deux chefs d’État — François Mitterand et François Hollande — au pays et menacé aujourd’hui de disparition en étant tombé sous la barre des 5 % dans les sondages.

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Lw Parti socialiste, qui a fait élire deux présidents, dont François Mitterand, est menacé aujourd’hui de disparition en étant tombé sous la barre des 5 % dans les sondages.

Pour le PS, l’heure des comptes semble même approcher : « Si elle prend encore quelques voix à Anne Hidalgo, soit le PS débranche Anne Hidalgo et se rallie à Christiane Taubira, soit le PS risque tout simplement de disparaître », a estimé lundi le politologue Brice Teinturier sur France Inter.

Mme Hidalgo pouvait cependant se targuer du ralliement lundi d’une partie de l’équipe de campagne de l’ex-candidat Arnaud Montebourg, qui avait jeté l’éponge mi-janvier.

 « Espèce de panique » 

Au sein de l’extrême droite, dont le poids électoral est plus conséquent avec environ 30 % des intentions de vote, les « trahisons », petites phrases assassines et autres querelles familiales rythment désormais chaque jour de campagne.  

« Mensonge », « parjure », « sabotage », Marine Le Pen n’avait pas de mots assez durs lundi soir pour ceux qui entendent rejoindre la campagne de son rival dans le sillage de plusieurs récentes défections au Rassemblement national et des atermoiements de sa nièce Marion Maréchal.

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La nièce de Marine Le Pen, l’ancienne députée Marion Maréchal (à gauche), envisage de rallier le parti Reconquête ! d’Éric Zemmour.

« Le mensonge qui consiste à faire croire qu’on est dans une équipe, la saboter de l’intérieur, et jouer pour l’équipe adverse, cela dégoute les Français », a-t-elle affirmé sur Europe 1.

Ciblant en particulier Nicolas Bay, elle a estimé « que le mieux pour tout le monde est que maintenant il s’explique clairement ».

Mme Le Pen a accusé Éric Zemmour d’offrir « beaucoup de choses. Des investitures, des postes, des promesses ». « Des moyens, en tout cas, et des moyens financiers, oui ça, c’est une évidence », a-t-elle dit.

De son côté, Éric Zemmour avait raillé plus tôt lundi une « espèce de panique » au RN, et réfuté les allégations d’avoir donné « un sou à quiconque ».

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Éric Zemmour lors d’une assemblée électorale le 22 janvier à Cannes.

Pour l’ex-chroniqueur politique, qui se félicitait vendredi d’avoir passé « une belle semaine », celle-ci a plutôt mal commencé avec l’annonce de l’ouverture par le parquet de Paris d’une enquête pour viols visant son directeur des évènements Olivier Ubéda.

Macron va bientôt officialiser sa candidature

Pendant ce temps, la majorité présidentielle prépare l’entrée en campagne du président Emmanuel Macron, donné en tête au premier tour depuis plusieurs mois avec 24-25 % des intentions de vote.

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Le président Emmanuel Macron devrait officialiser sa candidature entre le 10 et le 20 février, dit-on dans son entourage.

Il a « une fenêtre de tir pour se déclarer candidat entre le 10 et le 20 février », dit son entourage, qui souligne toutefois qu’il faut que « la question sanitaire soit passée et qu’on ne soit ni dans une crise internationale ni en pleine séquence européenne » comme le sommet international Union européenne-Union africaine des 17 et 18 février.

Le site de campagne, avecvous2022.fr, a été déjà lancé la semaine dernière, invitant les internautes à « faire entendre leur voix ».

Et les « Jeunes avec Macron » ont présenté leurs propositions en début de soirée au siège parisien du parti La République en Marche.

Un sondage IFOP-Fiducial publié lundi montre une remarquable stabilité dans les intentions de vote pour la présidentielle d’avril, aucun candidat n’ayant bénéficié de dynamique depuis le début de l’année.