(Lisbonne) Le premier ministre socialiste Antonio Costa a remporté haut la main les élections législatives de dimanche au Portugal, obtenant une improbable majorité absolue à l’issue d’un scrutin marqué aussi par une percée de l’extrême droite.

Donné dans les derniers sondages au coude-à-coude avec l’opposition de centre droit, M. Costa a fini par améliorer son score de 2019 et ne dépendra plus de ses anciens alliés de la gauche radicale, qui avaient provoqué ces élections anticipées en rejetant le projet de budget pour 2022.

L’ancien maire de Lisbonne, âgé de 60 ans, est arrivé au pouvoir en 2015 en scellant une union de la gauche sans précédent depuis la Révolution des Œillets de 1974, alors qu’il n’avait même pas gagné ces élections. Dimanche, il a offert au Parti socialiste la deuxième majorité absolue de son histoire.

Selon des résultats partiels portant sur toutes les circonscriptions sauf celles de l’étranger, qui élisent quatre députés, le Parti socialiste (PS) est arrivé en tête avec 41,7 % des voix et au moins 117 sièges sur un total de 230.

« Une majorité absolue ce n’est pas le pouvoir absolu, […] c’est une responsabilité accrue », a déclaré M. Costa devant ses partisans. « C’est la victoire de l’humilité, de la confiance et pour la stabilité », a-t-il ajouté.

Percée de l’extrême droite

« Le PS doit gagner, car il faut de la stabilité, ce n’est pas le moment pour un changement politique », a témoigné Catia Reis, une spécialiste des ressources humaines de 39 ans, après avoir voté à Lisbonne.

« J’ai voté pour les socialistes, car nous avons besoin d’eux en ce moment difficile », a confié Manuel Pinto, un ancien menuisier de 68 ans.

Alors qu’il espérait pouvoir créer la surprise, le principal parti d’opposition, le Parti social-démocrate (PSD, droite) de Rui Rio, arrive en deuxième position avec 29,3 % des voix.

Le parti d’extrême droite Chega (Assez) est pour sa part propulsé au rang de troisième force du pays, avec 7,15 % des voix et 12 élus, alors qu’il ne comptait qu’un seul député dans le Parlement sortant.

Le Portugal a longtemps fait exception en Europe, car depuis la fin de la dictature en 1974 et jusqu’au dernier scrutin de 2019, ce pays de 10 millions d’habitants ne comptait aucun représentant de l’extrême droite au Parlement.

« Les gens ont compris notre message », s’est réjoui le président de Chega, André Ventura, qui a jugé « mauvais pour le pays qu’Antonio Costa continue d’être premier ministre ».

Les libéraux, entrés au Parlement en 2019 avec un seul député, confirment eux aussi la forte progression prévue par les sondages, avec près de 5 % de voix et huit élus.

Plan d’investissements

Ils devancent les deux formations de la gauche radicale, le Bloc de gauche et la coalition communistes-verts, sévèrement sanctionnés après avoir provoqué ce scrutin en rejetant le projet de budget 2022.

Pendant la campagne électorale, Antonio Costa n’a cessé de se targuer d’avoir « tourné la page de l’austérité » budgétaire mise en œuvre par la droite jusqu’en 2015, sous la surveillance de la « Troïka » (BCE-FMI-UE), en pleine crise de la dette.

Mais, alors que son gouvernement minoritaire comptait désormais « tourner la page de la pandémie » grâce à une couverture vaccinale record et au plan européen de relance post-COVID-19, il a été stoppé dans son élan par ses anciens alliés, qui lui réclamaient davantage de concessions en matière sociale.

Ayant désormais les coudées franches, M. Costa pourra mettre en œuvre le plan d’investissements de 16 milliards d’euros financé par l’Union européenne.

Au cours de son premier mandat, conclu avant la crise sanitaire, son gouvernement avait profité d’une conjoncture économique favorable pour supprimer les coupes salariales du temps de la « Troïka », tout en affichant le premier excédent budgétaire de l’histoire récente du Portugal.