Les États-Unis agissent de concert avec bon nombre de dirigeants européens

(Washington) En annonçant le possible déploiement de milliers de militaires américains pour renforcer les troupes de l’OTAN, Joe Biden a nettement accru la pression sur Moscou lundi, tandis que les États-Unis et les Européens ont affiché leur cohésion face à la menace d’une attaque russe contre l’Ukraine.

Les États-Unis ont placé jusqu’à 8500 militaires en état d’alerte. Cela signifie qu’ils pourraient être prêts en cinq jours à renforcer la Force de réaction rapide de l’alliance militaire, constituée de 40 000 troupes, a annoncé lundi le Pentagone.

« Aucune décision n’a été prise sur un déploiement de forces en dehors des États-Unis pour l’instant », a toutefois précisé son porte-parole.

L’OTAN a pour sa part annoncé placer des forces en attente et envoyer des navires et des avions de combat pour renforcer ses défenses en Europe de l’Est.  

PHOTO MINISTÈRE DE LA DÉFENSE DE L’UKRAINE, ASSOCIATED PRESS

Soldats ukrainiens utilisant un lanceur de missiles américains Javelin lors d'exercices militaires dans la région de Donetsk

Le président américain tente de faire basculer en sa faveur le rapport de force qu’a instauré son homologue russe, Vladimir Poutine, en massant des troupes et des équipements à la frontière de l’Ukraine.

Joe Biden a eu lundi une visioconférence d’un peu moins d’une heure et demie avec plusieurs dirigeants européens, que cette montée en pression des Américains a semblé prendre de court.  

« Unanimité »

Il a vanté la « totale unanimité » entre Américains et Européens peu après la fin de cette réunion, à laquelle ont participé Emmanuel Macron, le chancelier allemand, Olaf Scholz, le premier ministre italien, Mario Draghi, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, le président polonais, Andrzej Duda, le premier ministre britannique, Boris Johnson, le président du Conseil européen, Charles Michel, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Selon un communiqué de la Maison-Blanche, les dirigeants ont « souligné leur désir commun d’une résolution diplomatique », mais ont aussi évoqué leurs « préparatifs en vue d’imposer des conséquences massives et des coûts économiques sévères à la Russie » en cas d’invasion, et leur objectif de « renforcer la sécurité sur le front oriental de l’OTAN ».

Les participants « ont tous été de l’avis qu’il appartient à la Russie d’entreprendre des initiatives visibles de désescalade », a commenté de son côté le chancelier allemand, assurant que Moscou subirait des « conséquences très lourdes » en cas d’invasion.

À l’unisson, Jens Stoltenberg a évoqué dans un tweet « des coûts sévères » en cas de « nouvelle agression » contre l’Ukraine.

« Volatilité »

Les Européens avaient semblé auparavant circonspects face à la rhétorique et aux décisions de plus en plus musclées des États-Unis, qui ont par exemple décidé de faire partir les familles des diplomates en poste à Kiev, initiative suivie par Londres et Canberra.

La France, qui assume actuellement le commandement de la Force de réaction rapide de l’OTAN, a appelé à ne « pas créer d’ambiguïté, de volatilité supplémentaire ».

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a invité à ne pas « dramatiser ».

Les autorités ukrainiennes ont elles aussi jugé la décision de Washington concernant leur représentation diplomatique « prématurée » et « excessive ».

Moscou a dénoncé une « hystérie » et accusé les États-Unis et l’OTAN « d’exacerber les tensions par des annonces et des actions concrètes ».  

Parallèlement à cette montée en pression, les Occidentaux continuent malgré tout d’explorer la voie diplomatique.  

Selon une source européenne, une nouvelle réunion serait ainsi prévue entre le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, et son homologue russe, Sergueï Lavrov.

PHOTO KAY NIETFELD, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Antony Blinken, secrétaire d’État des États-Unis

Les États-Unis ont promis une réponse écrite aux demandes russes. Lors de l’entretien avec Joe Biden, le président français a souligné « l’importance que l’Union européenne puisse prendre toute sa part » dans cette réponse, selon un communiqué de l’Élysée.

Dans ce texte, qui, contrairement à celui des Américains, ne mentionne pas expressément l’OTAN, la France insiste sur la nécessité de poursuivre les efforts diplomatiques.

Le président français, Emmanuel Macron, veut proposer « un chemin de désescalade » à son homologue russe lors d’un entretien « dans les prochains jours ».

La Russie exige un engagement écrit sur le non-élargissement de l’OTAN à l’Ukraine et à la Géorgie et demande un retrait des forces et des armements de l’Alliance atlantique des pays d’Europe de l’Est ayant rejoint l’OTAN après 1997, notamment de Roumanie et de Bulgarie. Des demandes « non négociables » pour les Occidentaux.

Gaz et pétrole

En cas d’invasion, les Occidentaux ont assuré préparer des sanctions d’une sévérité inédite.

La réduction des achats de gaz et de pétrole, qui représentent respectivement 43 % et 20 % de l’approvisionnement de l’UE, et qui financent largement le budget russe, est sur la table, a confié à l’AFP une source européenne, mais le sujet divise l’Union européenne.

Une grande inconnue reste par ailleurs la position du tout jeune gouvernement de coalition allemand en cas d’escalade avec la Russie. Berlin refuse de livrer des armes à l’Ukraine, contrairement aux États-Unis, au grand dam de Kiev.  

Côté américain, Joe Biden envisage d’interdire aux banques russes d’utiliser le dollar, devise reine des échanges internationaux, ce qui porterait un coup très dur à la finance et à l’économie réelle du pays.