(Londres) Une centaine de personnes invitées en plein confinement : des révélations sur une fête à Downing Street replongent dans la tourmente le premier ministre britannique Boris Johnson, déjà englué dans une série de scandales.

« Apportez vos bouteilles », suggérait un courriel, révélé par ITV News et envoyé par le secrétaire particulier en chef de Boris Johnson, Martin Reynolds, le 20 mai 2020, quand les Britanniques ne pouvaient légalement rencontrer qu’une personne à l’extérieur.

Le message invitait à « profiter du beau temps » lors d’un pot « avec distanciation sociale » dans les jardins de la résidence du premier ministre.

Le dirigeant conservateur de 57 ans, élu triomphalement en 2019, voit de nouveau la colère éclater, y compris parmi les députés de sa majorité et dans la presse conservatrice, après un automne de scandales un temps éclipsés par la déferlante du variant Omicron fin décembre au Royaume-Uni.

Une enquête interne se penche déjà sur des fêtes qui auraient été organisées en mai, novembre et décembre 2020 dans les cercles du pouvoir : vin et fromage au soleil, pot de départ ou jeu-questionnaire virtuel…

Selon les médias britanniques,  le chef du gouvernement et son épouse (alors sa fiancée) Carrie auraient eux-mêmes participé à la « garden party » du 20 mai avec une quarantaine de personnes.

Le même jour, le ministre de la Culture Oliver Dowden rappelait pourtant à la population anglaise les strictes règles en vigueur : « vous pouvez rencontrer une personne extérieure à votre foyer dans un lieu public, dehors, à condition que vous restiez à deux mètres l’un de l’autre. »

La police, qui répétait les mêmes consignes, a indiqué être en contact avec le gouvernement sur cette affaire qui pourrait déclencher une enquête pour violation des règles sanitaires.

Cette révélation a provoqué la furie des familles de victimes de la pandémie, qui a fait plus de 150 000 morts au Royaume-Uni.

Hannah Brady, porte-parole de l’association COVID-19 Bereaved Families for Justice, a déclaré dans un communiqué que cela la rendait « malade » de penser que les employés de Downing Street « avaient fait la fête » quelques jours après la mort de son père, alors qu’elle n’avait même pas eu le droit de serrer ses amis dans ses bras.

Jonathan Evans, le chef du Comité indépendant sur les normes dans la vie publique, qui conseille les premiers ministres en matière d’éthique, a déclaré que les dernières allégations reflétaient une certaine « négligence » en matière de respect des normes.

« Arrêtez de mentir »

Interrogé - avant la révélation de l’invitation - sur sa présence à cet évènement, Boris Johnson s’est contenté dans un sourire gêné de se référer à l’enquête en cours, menée par la haute fonctionnaire Sue Gray.

« Arrêtez de mentir aux Britanniques. Il est temps de tout avouer », l’a interpellé sur Twitter le leader du Labour, principal parti d’opposition, Keir Starmer.

Son parti a obtenu de poser une question au Parlement mardi midi, mais Boris Johnson a délégué la tâche d’y répondre à un membre de second rang du gouvernement, Michael Ellis, qui a renvoyé à l’enquête en cours sous les huées des députés.

Pour Angela Rayner, bras droit de Keir Starmer, « son absence en dit long. Le public a déjà tiré ses propres conclusions ».

Le chef du gouvernement devra cependant affronter les foudres des députés mercredi lors de la traditionnelle séance de questions au gouvernement.

Sa réputation a déjà été ternie par des soupçons de mensonge sur le financement de la luxueuse rénovation de son appartement de fonction, d’attribution de contrats entre amis durant la pandémie ou encore d’accusations de favoritisme envers de généreux donateurs du Parti conservateur.

Pour l’instant, le charismatique dirigeant insiste sur le succès de la campagne de vaccination contre la COVID-19 ou la réalisation du Brexit qui avait séduit des classes populaires habituellement acquises aux travaillistes dans le nord de l’Angleterre.  

Mais sa popularité a chuté ses derniers mois, y compris au sein de son parti : près de la moitié des conservateurs sondés (46 %) estiment que le ministre des Finances Rishi Sunak ferait un meilleur premier ministre, selon un sondage YouGov pour SkyNews révélé dimanche.

Pour le renverser, un vote de défiance au sein du Parti conservateur suffirait.