(Washington) Les États-Unis ont tendu vendredi la main à la Russie mais ont aussi prévenu qu’ils ne se laisseraient pas « distraire » par ses exigences, à l’orée d’une semaine de pourparlers qui risquent selon l’OTAN de déboucher, en cas d’échec, sur un « nouveau conflit » en Ukraine.

« Le renforcement militaire de la Russie se poursuit autour de l’Ukraine et est accompagné d’un discours menaçant de Moscou si ses exigences ne sont pas acceptées. Or elles sont inacceptables et le risque d’un nouveau conflit est réel », a prévenu le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg à l’issue d’une visioconférence avec les ministres des Affaires étrangères des pays de l’Alliance.

« Nous devons nous préparer à la perspective que la consultation échoue », a-t-il estimé.

Les Occidentaux et l’Ukraine accusent depuis plusieurs semaines les Russes d’amasser des dizaines de milliers de soldats à la frontière ukrainienne en vue d’une potentielle invasion, et ont clairement menacé le président russe Vladimir Poutine de sanctions « massives » et sans précédent s’il attaquait à nouveau le pays voisin.

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Des soldats russes regardent un char T-72-B3 lors d’exercices militaires, le 24 septembre 2020.

Moscou exige de son côté des traités excluant toute future adhésion de l’Ukraine à l’OTAN et engageant l’alliance transatlantique à réduire ses forces aux portes de la Russie.

Pour tenter de surmonter cette nouvelle crise par le dialogue, les diplomates américains et russes se retrouvent lundi à Genève, avant une réunion OTAN-Russie mercredi à Bruxelles puis une rencontre jeudi à Vienne de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dont Kiev est également membre.

Exigences « irrecevables »

« Nous sommes prêts à répondre avec force à une nouvelle agression russe. Mais une solution diplomatique est encore possible, et préférable, si la Russie choisit cette voie », a lancé le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken devant la presse à Washington, après avoir participé à la réunion virtuelle de l’OTAN.

Jens Stoltenberg a également estimé que la réunion du Conseil OTAN-Russie, la première depuis l’été 2019, était « un signal positif, car les tensions sont élevées ».

Mais les ministres occidentaux ont aussi appelé à la « désescalade » russe pour favoriser la diplomatie, en renouvelant leurs lignes rouges.

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Des troupes russes participant à des manœuvres militaires dans la région de Rostov, dans le sud de la Russie, le 14 décembre 2021. Le secrétaire d’État américain Anthony Blinken a déclaré vendredi que la Russie a amassé « près de 100 000 soldats à la frontière ukrainienne avec des plans pour mobiliser très rapidement le double de ces effectifs ».

« Il est hors de question que l’OTAN négocie sur le principe du droit de chaque nation à choisir sa propre voie, y compris le type d’accord de sécurité dont elle veut faire partie », a soutenu le patron de l’Alliance.

Discours très offensif de Blinken

La Russie « veut nous entraîner dans un débat sur l’OTAN plutôt que de nous laisser nous concentrer sur le sujet brûlant qui est son agression contre l’Ukraine. Nous ne nous laisserons pas distraire par cela », a prévenu pour sa part le secrétaire d’État américain Antony Blinken, dans un discours très offensif à l’égard de Moscou.

Je pense que cela fait certainement partie de leur stratégie de présenter une liste d’exigences absolument irrecevables et ensuite prétendre que l’autre camp ne joue pas le jeu et utiliser cela comme une justification pour une agression.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken

Il a aussi mis en garde contre la possibilité que Moscou « ourdisse une provocation ou un incident pour ensuite l’utiliser afin de justifier une intervention militaire, dans l’espoir que, quand le monde se rendra compte de sa ruse, il soit trop tard ».

« L’idée que l’Ukraine puisse être l’agresseur dans cette situation est absurde », a-t-il ajouté, rappelant que les Russes avaient annexé la Crimée en 2014 en violation du droit international, et avaient récemment amassé « près de 100 000 soldats à la frontière ukrainienne avec des plans pour mobiliser très rapidement le double de ces effectifs ».

Face à la volonté apparente du Kremlin de privilégier un face-à-face avec les Américains, les Européens ont tous réclamé à nouveau leur siège à la table des négociations.

« Quelle que soit la solution, elle doit passer par l’Europe », a martelé à Paris la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, au côté du président français Emmanuel Macron.

Antony Blinken, qui s’est déjà engagé à impliquer pleinement les Européens, a aussi promis à son homologue ukrainien Dmytro Kouleba qu’il n’y aurait « pas de discussions sur l’Ukraine sans l’Ukraine ».