(La Haye) La justice internationale a confirmé mardi la condamnation à perpétuité, désormais définitive, de l’ancien chef militaire serbe de Bosnie Ratko Mladic pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis pendant la guerre de Bosnie de 1992 à 1995.

À la majorité, les magistrats ont rejeté en intégralité l’appel de l’ex-général, reconnu coupable notamment de génocide pour son rôle dans le massacre de Srebrenica, le pire en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Autrefois soldat massif et surnommé le « Boucher des Balkans », Ratko Mladic, aujourd’hui âgé de près de 80 ans, a très brièvement fermé les yeux et secoué la tête à l’écoute du verdict du Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), basé à La Haye.

La condamnation, dont l’ancien chef militaire ne peut plus faire appel, a notamment été saluée par l’ONU et par le président américain Joe Biden.

« La chambre d’appel confirme la peine de réclusion à perpétuité prononcée contre M. Mladic », a déclaré Prisca Nyambe, juge présidente du MTPI, qui a pris le relais du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), fermé en 2017.

Ratko Mladic restera en détention à La Haye en attendant la finalisation des modalités de son transfert vers l’État où il purgera sa peine, ont ordonné les juges, sans préciser lequel.

Les magistrats ont par ailleurs rejeté l’appel de l’accusation, qui souhaitait que l’ex-général soit également condamné pour génocide dans plusieurs autres municipalités.

« Jour historique »

Les proches de certains des 8000 hommes et garçons musulmans tués par les forces serbes de Bosnie à Srebrenica en 1995 avaient fait le déplacement à La Haye.

« C’est un jour historique, non seulement pour nous les mères, mais aussi pour l’ensemble des Balkans, de l’Europe et du monde », a déclaré à l’AFP Munira Subasic, présidente de l’une des associations des « mères de Srebrenica ».

Ratko Mladic « est un monstre qui ne s’est pas repenti de ce qu’il a fait, même après 26 ans », a-t-elle poursuivi devant le MTPI, en amont du verdict.

« Partout où leur armée est venue, partout où ils ont mis les pieds, ils ont commis un génocide », a-t-elle ajouté.

Ratko Mladic est l’un des principaux dirigeants jugés par la justice internationale pour les crimes commis pendant les guerres en ex-Yougoslavie, outre l’ancien chef politique des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic, condamné à la prison à vie en 2019, et l’ex-président yougoslave Slobodan Milosevic, mort dans sa cellule à La Haye d’une crise cardiaque en 2006, avant l’achèvement de son procès.

La guerre en Bosnie (1992-1995) a fait quelque 100 000 morts et 2,2 millions de déplacés.

Près de Srebrenica, au Centre mémorial du génocide, un écran géant diffusait mardi les témoignages de survivants et de familles, tout près des stèles blanches parfaitement alignées où reposent les corps de plus de 6600 victimes identifiées.

« Au lieu de me réjouir avec mes petits-enfants, je suis venue pleurer ici », a déclaré Munevera Kabeljic, 69 ans, près des tombes de son mari et de ses fils, tués à l’âge de 17 et 20 ans.

« Ce qui fait le plus mal, c’est qu’ils nient le génocide », a-t-elle ajouté. « Ils disent que cela ne s’est pas produit, mais ces pierres tombales le prouvent ».

« Rendre des comptes »

« Ce jugement historique montre que ceux qui commettent des crimes horribles en seront bien tenus responsables », s’est félicité le président américain.

Le verdict « souligne la détermination de la justice internationale à faire rendre des comptes quel que soit le temps qu’il faut. Et dans le cas de Mladic, c’était presque trois décennies après ses crimes abominables », a déclaré dans un communiqué la Haute-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Michelle Bachelet.

Arrêté en 2011 après 16 ans de cavale, Ratko Mladic est aujourd’hui un vieil homme qui souffre de problèmes de santé, selon ses avocats.  

L’âge exact de l’ex-général fait débat, lui affirmant être né le 12 mars 1943 alors que le MTPI retient le 12 mars 1942.

Des images de l’époque le montrent en train de distribuer à Srebrenica des bonbons à des enfants, embarqués ensuite dans des bus avec les femmes, tandis que les hommes et adolescents de la ville étaient conduits dans une forêt et exécutés.

Mladic a également été reconnu coupable d’avoir orchestré une campagne plus large de « nettoyage ethnique » pour chasser les musulmans des zones clés de Bosnie pour créer une Grande Serbie en ex-Yougoslavie, déchirée après la chute du communisme.

Selon ses avocats, il n’y a pas de lien entre l’ancien général et les tueries commises à Srebrenica et les charges de génocide qui lui ont valu une peine de détention à vie sont dénuées de fondement.

En août 2020, lors du procès en appel, Ratko Mladic a déclaré que le tribunal était un « rejeton des puissances occidentales » et affirmé être toujours « une cible de l’alliance de l’OTAN ».