(Moscou) La Russie va limiter pendant six mois la navigation de navires militaires et officiels étrangers dans trois zones au large de la Crimée, péninsule ukrainienne annexée par Moscou, des mesures dénoncées par l’UE vendredi.

Les tensions russo-ukrainiennes vont crescendo depuis plusieurs semaines, l’Ukraine accusant Moscou de chercher un casus belli pour l’envahir et la Russie accusant Kiev de préparer une offensive contre les séparatistes prorusses de l’Est ukrainien.

La Russie a notamment massé des troupes en Crimée et lancé des manœuvres maritimes en mer Noire.

PHOTO MARINE RUSSE

La Russie a notamment massé des troupes en Crimée et lancé des manœuvres maritimes en mer Noire.

« Du 24 avril à 21 h (14 h HAE) jusqu’au 31 octobre 21 h 00, le passage à travers les eaux territoriales de la fédération de Russie pour les navires militaires et autres bâtiments étatiques sera suspendu », a indiqué la direction de la navigation du ministère russe de la Défense citée vendredi par l’agence publique Ria Novosti.  

Trois zones sont concernées, la pointe occidentale de Crimée, celle du sud de Sébastopol à Hourzouf et enfin un « rectangle » au large de la presqu’île de Kertch près du parc naturel Opoukski.

Cette dernière zone est la plus controversée, car proche du détroit de Kertch reliant la mer Noire à la mer d’Azov et qui est d’une importance cruciale pour les exportations de céréales ou d’acier produits en Ukraine.

PHOTO MURAD SEZER, ARCHIVES REUTERS

Le navire de débarquement russe Novocherkassk croisant dans le Bosphore le 12 avril 2021.

L’OTAN et l’UE protestent

Les alliés de l’OTAN ont aussitôt exprimé leur « inquiétude » à propos des manoeuvres navales russes : « Nous demandons à la Russie de garantir le libre accès aux ports ukrainiens de la mer d’Azov et de permettre la liberté de navigation », a écrit dans un communiqué une porte-parole de l’Alliance atlantique.

Restreindre l’accès à certaines zones de la mer Noire et au détroit de Kertch (qui la relie à la mer d’Azov) constituerait « une action injustifiée » relevant d’« un comportement déstabilisateur de la part de la Russie », poursuit le communiqué.

Un haut responsable de l’Union européenne a dénoncé vendredi ces restrictions, décidées « sous prétexte d’exercices militaires », y voyant « une évolution hautement préoccupante » qui s’ajoute au déploiement de troupes en Crimée et près de la frontière ukrainienne ces dernières semaines.

« C’est un geste supplémentaire du gouvernement de la Russie qui va dans la mauvaise direction, dans le mesure où cela augmente les tensions », a-t-il ajouté.  

Accrochages en 2018

Des accrochages dans la zone de Kertch ont déjà eu lieu par le passé, comme lorsque la Russie a saisi en 2018 trois navires militaires ukrainiens.  

Kiev et les Occidentaux ont alors aussi accusé la Russie d’« entraver » délibérément la navigation des navires commerciaux par le détroit de Kertch, dont Moscou revendique le contrôle à la suite de l’annexion de la Crimée.  

La Russie a bâti à grands frais au-dessus du détroit un pont pour relier son territoire à la péninsule annexée.

Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a dénoncé dès jeudi les restrictions de navigation décidées par la Russie, avant que les zones concernées soient connues, y voyant « une usurpation des droits souverains de l’Ukraine ».

Il a aussi souligné qu’en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer « la Russie ne doit ni entraver ni gêner le transport à travers le détroit en direction des ports en mer d’Azov ».