(Moscou) Les autorités russes ont sommé mercredi le média Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL), financé par Washington, de s’acquitter de lourdes amendes pour non-respect des obligations de son statut d’« agent de l’étranger », sous peine d’un possible blocage.

Ce média, qui couvre notamment les activités de l’opposition russe et comporte une antenne et un site en langue russe, a été condamné à payer 71,5 millions de roubles (environ 1,2 million de dollars canadiens), selon de multiples décisions de justice initiées par le gendarme russe des télécoms, Roskomnadzor.

Un tribunal moscovite a confirmé en appel une partie de ces amendes, à hauteur de quelque 90 000 dollars canadiens, a indiqué mercredi Roskomnadzor dans un communiqué.  

Les émissions pourraient être bloquées

Le média a désormais 60 jours pour verser cette somme, sous peine de blocage en Russie.

« Selon la loi russe, l’agence peut restreindre l’accès à une ressource internet d’un média étranger et déclaré agent de l’étranger si celui-ci a été condamné par un tribunal russe pour violation de la procédure », a souligné Roskomnadzor.

Le président de RFE/RL, Jamie Fly, a déclaré à l’AFP que son média était dans le collimateur des autorités car il publie des « nouvelles objectives au moment où le Kremlin tente de limiter l’accès du peuple russe à l’information ».

« Nous n’abandonnerons pas notre audience, quel que soit le nombre d’amendes illégitimes que les autorités russes nous imposent. Nous continuerons de lutter contre ces attaques envers notre indépendance journalistique par tous les moyens possibles », a-t-il ajouté.

Au total, RFE/RL a été condamné pour 260 signalements sur les 390 émis par le gendarme russe, qui lui reproche de ne pas avoir affiché son statut d’« agent de l’étranger » sur ses neuf sites internet ou de l’avoir fait de manière inappropriée.

En Russie, les organisations ou individus « agents de l’étranger » doivent, selon une loi de 2012, s’enregistrer auprès des autorités, remplir de fastidieuses obligations administratives et indiquer clairement ce statut dans leurs publications.

Depuis fin décembre, Roskomnadzor a entamé une offensive juridique contre plusieurs médias accusés de ne pas respecter les conditions drastiques qu’elle impose.

Les procédures visant RFE/RL ont été dénoncées par le secrétaire d’État américain Antony Blinken, qui s’est dit « inquiet » mardi sur Twitter des « efforts de la Russie pour fermer Radio Free Europe/Radio Liberty et faire taire cette précieuse source de reportages indépendants ».

L’un des responsables du média, Kirill Soukhotski, avait dénoncé début février des poursuites visant un projet connu en Russie comme « une alternative fiable à la désinformation et aux mensonges ».

L’ONG Reporters sans frontières (RSF) avait de son côté condamné les « amendes exorbitantes », décrétées sous le couvert d’une « loi absurde » qui est « conçue pour faire taire la presse indépendante et d’opposition » en Russie.

Radio Free Europe/Radio Liberty est une station de radio et un groupe de communication privés financés par le Congrès des États-Unis. L’organisation existe en Europe et au Moyen-Orient. Elle diffuse dans 21 pays en 28 langues par ondes courtes, ondes moyennes, FM et internet.