(Moscou) La Russie a annoncé samedi avoir détecté le premier cas de transmission à l’être humain de la souche H5N8 de la grippe aviaire, ajoutant avoir informé l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de cette « découverte importante ».

« Le laboratoire a confirmé le premier cas d’infection d’une personne par le virus de groupe A, la grippe aviaire AH5N8 », a déclaré à la télévision Anna Popova, à la tête de l’agence sanitaire russe Rospotrebnadzor.  

Ce virus a été détecté chez sept personnes contaminées dans une usine de volailles du Sud de la Russie, où une épidémie de grippe aviaire a touché les animaux en décembre 2020, a précisé Mme Popova, ajoutant que les malades « se sentent bien » et n’ont pas de complications.

« Des mesures ont été rapidement prises pour contrôler la situation » dans ce foyer d’infection, a-t-elle indiqué.

Si la souche H5N8 a « franchi la barrière interespèce » en se transmettant de l’oiseau à l’homme, « ce variant du virus ne se transmet pas d’une personne à l’autre à l’heure actuelle », a-t-elle encore déclaré.

Elle a estimé que cette détection « donne au monde entier le temps de se préparer » en créant des tests et un vaccin, « dans le cas où ce virus deviendrait plus pathogène et plus dangereux pour l’homme et acquiert la capacité d’être transmis de personne à personne ».  

« Nous serions alors pleinement armés et pleinement préparés », a-t-elle poursuivi.

Le laboratoire d’État russe Vektor, à l’origine de la découverte, a également estimé qu’il faut « aujourd’hui commencer à développer un système de test qui permettra de détecter rapidement les cas de cette maladie chez l’homme » et de « commencer le travail » en vue d’un vaccin.

La Russie a une longue tradition de recherche dans le domaine des virus et des vaccins et a notamment développé un vaccin contre la COVID-19, le Spoutnik V, efficace à plus de 91 % selon des résultats scientifiques confirmés par des experts indépendants.

Mme Popova a indiqué que la Russie avait « d’ores et déjà envoyé ces informations à l’Organisation mondiale de la santé ».

« À surveiller »

L’OMS a de son côté confirmé à l’AFP avoir été informée par la Russie de cette découverte, qui « si confirmée, serait la première fois que le H5N8 infecte des humains ».

« Nous sommes en discussion avec les autorités (russes) pour recueillir plus d’informations et évaluer l’impact de cet évènement sur la santé publique », a ajouté l’organisation.

La souche H5N8 de la grippe aviaire sévit actuellement dans plusieurs pays européens, dont la France, où des millions d’animaux ont été abattus pour arrêter sa progression.

Le gouvernement français a assuré samedi que le virus de la grippe aviaire H5N8 présent sur des volailles en France ne présentait, à ce jour, « pas de risque de transmission à l’Homme », mais des comparaisons sont en cours avec le virus ayant contaminé des personnes en Russie.

« À ce jour, 130 séquences virales complètes ont ainsi été obtenues. Aucune des analyses réalisées par l’Anses (NDLR : agence de sécurité sanitaire) n’a montré de propriétés laissant craindre un risque de transmission à l’Homme du virus de l’influenza aviaire présent sur des volailles en France », selon un communiqué des ministères français de l’Agriculture et de la Santé.

Selon l’OMS, la transmission de la grippe aviaire à l’homme est un fait rare et nécessite « un contact direct ou étroit avec des oiseaux infectés ou avec leur environnement ». Cependant, ce virus « doit être surveillé », car il a un potentiel de mutation.

La circulation de certains variants de la grippe aviaire chez les volailles dans le monde est « préoccupante pour la santé publique », car ils sont en mesure de « provoquer des maladies graves chez les humains » qui ont « peu ou pas d’immunité contre le virus », ajoute l’OMS.

Selon l’organisation, l’homme peut notamment déjà être infecté par les virus de la grippe aviaire des sous-types H5N1, H7N9 et H9N2.

Une experte interrogée par l’AFP, Gwenaël Vourc’h, directrice de recherche à l’INRAE, a précisé que ce type de virus « sont connus pour évoluer assez rapidement ».

« Pour le H5N8, il n’y avait pas à ce jour de transmission à l’homme, mais c’est dans l’ordre du possible de l’évolution virale », a-t-elle ajouté.

« Il y a peut-être eu d’autres cas que l’on n’a pas vus, surtout s’il fait peu de symptômes », a précisé l’experte, selon qui les sept cas découverts en Russie ne pourraient être que « la pointe de l’iceberg ».