(Paris) La France a franchi mardi la barre des 80 000 morts liés à la COVID-19, avec plus de 700 nouveaux décès à l’hôpital ainsi que dans les établissements pour personnes âgées dépendantes, selon les données officielles publiées sur le site du gouvernement.

Entre lundi et mardi, 439 malades de la COVID-19 sont décédés à l’hôpital, selon l’agence sanitaire Santé publique France qui publie, elle aussi chaque soir, des données liées à l’évolution de la maladie.

Au moins 3,3 millions de cas de contaminations ont été enregistrés depuis le début de l’épidémie, dont environ 18 000 dans les dernières 24 heures.

Le nombre d’hospitalisations liées à la COVID-19 reste élevé, avec un total de 27 634, dont 1931 hospitalisations en 24 heures, contre 1893 lundi, selon les chiffres de Santé publique France. Au moins 334 personnes ont été nouvellement admises en réanimation, contre 356 la veille.

D’après les chiffres officiels, plus de 2,353 millions vaccinations ont été réalisées en France depuis le début de la campagne fin décembre : 1,9 million ont reçu une première dose (3,1 % de la population) et 366 733 ont reçu la deuxième.

L’état d’urgence sanitaire prolongé

Créé en mars 2020 face à l’épidémie de COVID-19, l’état d’urgence sanitaire est la base notamment du couvre-feu national à 18 h.

PHOTO LUDOVIC MARIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le premier ministre français Jean Castex durant la période des questions à l’Assemblée nationale de France, à Paris.

À ce sujet, le Parlement avait donné plus tôt mardi son feu vert à une prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin, malgré l’opposition de la droite comme de la gauche.

La loi permet aussi les mesures de restriction ou d’interdiction de déplacements, des rassemblements ou des ouvertures des établissements, sur tout ou partie du territoire, ainsi que des confinements partiels ou complets de la population.

L’exécutif n’hésitera « pas à prendre (ses) responsabilités » en cas de « dégradation forte et rapide » des indicateurs sanitaires, affirme le premier ministre Jean Castex. Notamment face aux variants, « les prorogations successives sont une nécessité, pas un échec, pas un gadget », a insisté le secrétaire d’État Adrien Taquet devant les députés.

L’urgence sanitaire a été en vigueur du 23  mars au 10  juillet 2020, puis réinstaurée le 17 octobre. Le Parlement l’a prorogée une première fois jusqu’au 16 février, puis mardi jusqu’au 1er juin.

Sous le feu des critiques

Quasiment tous les députés hors majorité ont voté contre. Les parlementaires relayent la lassitude de la population et le ras-le-bol des restaurateurs, stations de ski ou encore des étudiants, voire les menaces de désobéissance.

Au-delà, droite comme gauche dénoncent une « banalisation » de ce régime particulier. Le gouvernement « ne doit pas nous entraîner dans des tunnels où le Parlement ne peut se réunir et évaluer l’action publique », fait valoir le député LR Philippe Gosselin. Le Sénat dominé par la droite avait donné son accord, en première lecture, pour une prorogation jusqu’au 3 mai… et prévu un vote du Parlement au bout d’un mois en cas de reconfinement, en vain.

Le communiste Stéphane Peu est « inquiet de l’accoutumance du gouvernement au régime dérogatoire à l’État de droit », dans lequel « la France se sera trouvée le plus clair de son temps depuis 2015 » avec alors l’état d’urgence post-attentats.

Comme d’autres associations de défense des libertés publiques, la Ligue des droits de l’Homme s’élève contre une « dérive autoritaire et la prédominance donnée à l’exécutif avec l’affaiblissement des contrepouvoirs institutionnels et citoyens ».

En attendant l'effet de la vaccination

Le ministre de la Santé Olivier Véran assure comprendre la « lassitude », sa collègue Brigitte Bourguignon la « partage pleinement ». Mais M. Véran juge l’échéance du 1er juin « cohérente au regard de la dynamique de l’épidémie », le temps que « la campagne de vaccination produise pleinement ses effets ».

Le ministre martèle aussi que seules les « mesures nécessaires et proportionnées à la catastrophe sanitaire » sont prises. Et le rapporteur Jean-Pierre Pont (LREM) de juger que ceux votant contre la prolongation « s’opposent à la lutte contre ce virus et à la protection de la population contre ce virus » -un « chantage à la responsabilité » épinglé à gauche comme à droite. « Si nous discutons, on nous accuse d’être des démagogues ou des traîtres sanitaires à la Nation », dénonce Jean-Christophe Lagarde (UDI).  

Au sein même de la majorité, quelques nuances se font entendre. Le groupe MoDem, dont deux députés se sont abstenus, réclame « la transparence dans les réponses et les chiffres ».  

« Nous ne pouvons pas donner tous les trois ou quatre mois de chèque en blanc au gouvernement », tonne Olivier Becht, patron du groupe allié Agir, qui ne voit pas la France « traverser toute l’année 2021 uniquement avec des mesures de confinement, de déconfinement, de reconfinement ou de couvre-feu ».

L’Assemblée nationale s’apprête à modifier le 1er mars son propre règlement intérieur pour prévoir durablement comment organiser ses travaux « en période de crise » de tout type.