(Paris) L’accusation a requis mercredi 10 000 euros d’amende, avec possibilité d’emprisonnement en cas de non-paiement, à l’encontre du polémiste français d’extrême droite Éric Zemmour, jugé à Paris pour ses propos controversés sur les migrants mineurs isolés.

« Au vu de la violence des propos et du contexte dans lequel ils ont été prononcés », et du fait que M. Zemmour a « déjà un passé judiciaire », la procureure a demandé « cent jours, amende à cent euros ».  

Le procès du candidat putatif à la présidentielle s’est ouvert mercredi matin en son absence. L’ancien journaliste de 63 ans est cité à comparaître pour complicité de provocation à la haine raciale et d’injure raciale.  

En septembre 2020 sur la chaîne télévisée CNews, le chroniqueur avait déclaré à propos des mineurs isolés étrangers : « Ils n’ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu’ils viennent ».

Mercredi, il ne s’est pas présenté à l’audience pour « éviter que l’enceinte judiciaire ne se transforme en studio de télé d’information en continu », avait indiqué la veille son avocat, Me Olivier Pardo.

De nombreuses associations, dont SOS Racisme et la Ligue des droits de l’Homme (LDH), ainsi qu’une vingtaine de conseils départementaux, les mineurs non accompagnés étant pris en charge indirectement par ces derniers, se sont constitués parties civiles.

« On essaie de faire croire que ces audiences sont liées au statut de candidat putatif de M. Zemmour », dit à la barre le président de SOS Racisme, Dominique Sopo.  

Mais les associations antiracistes ont « assez peu » l’habitude de poursuivre les candidats à la présidentielle. « Ce qui motive c’est la nature de propos d’une grande violence d’une personne qui teste la République » et qui a « une influence », insiste-t-il.

« Le discours d’Éric Zemmour est dangereux parce qu’il y a des abrutis […] prêts à passer à l’acte », abonde le président de La Maison des potes, Samuel Thomas, également partie civile au procès.  

« Nous sommes aujourd’hui objectivement dans un moment d’hégémonie de la pensée raciste », dit Me Arié Alimi, premier parmi les parties civiles à plaider pour la LDH. M. Zemmour « a vocation à se présenter à la présidentielle, et il y a une possibilité qu’il devienne président de la République », insiste-t-il.  

Les prises de position du pamphlétaire d’extrême droite Éric Zemmour lui ont valu depuis une dizaine d’années une quinzaine de poursuites en justice. Plusieurs fois relaxé, il a été condamné à deux reprises pour provocation à la haine.

L’ancien journaliste ne s’est encore pas déclaré candidat, mais, selon des sources proches, il devrait le faire avant une première assemblée électorale envisagée début décembre.

Sa conférence à Londres annulée

Plus tôt dans la journée, une conférence que devait tenir Éric Zemmour à la Royal Institution à Londres vendredi a été annulée par cette dernière après « examen approfondi » de l’évènement, mais le polémiste a indiqué qu’il se rendrait malgré tout dans la capitale britannique.

M. Zemmour a entamé mi-octobre une tournée en France pour promouvoir son livre La France n’a pas dit son dernier mot, se présentant à des « conférences littéraires » aux allures d’assemblées électorales.

Cette fois, il est attendu vendredi à Londres.

Mais, « après un examen approfondi du dossier, nous avons pris la décision d’annuler cet évènement privé », a indiqué mercredi à l’AFP un porte-parole de la Royal Institution. Il ne s’agit pas d’un problème de financement, a-t-on précisé.

Le parrain de la Royal Institution est le Prince de Galles.

Selon l’entourage du candidat non déclaré à la présidentielle, la Royal Institution, « société commerciale de location d’espaces pour évènements de tous types, a décidé à 48 heures de la conférence d’Éric Zemmour d’annuler, par courriel, la réservation que nous avions contractualisée ensemble depuis deux semaines ».

« Nous avions payé l’ensemble de la facture, vu les détails techniques, […] envoyé les invitations à la communauté française de Londres, accrédité les médias » détaille l’entourage du polémiste dans un message aux journalistes.

Cette décision « est incompréhensible sur le plan du droit commercial, c’est une faute majeure. Et surtout scandaleux en termes de méthode. Sauf à vouloir sciemment saboter le moment », a-t-on ajouté.  

« Dans le pays du “freedom of speech” (liberté d’expression, NDLR), la situation est assez cocasse », selon la même source.

Pour autant Éric Zemmour « tiendra sa conférence à la communauté française à 18 h », vendredi à Londres, dans un autre lieu qui sera précisé ultérieurement.

M. Zemmour avait déjà essuyé plusieurs déboires, en France, lors de sa tournée promotionnelle pour son livre, lorsque plusieurs séances de dédicaces ou conférences avaient été annulées.