(Kiev) Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a promis une « réponse forte » après une tentative d’assassinat à l’arme automatique contre son premier conseiller, une attaque liée selon les autorités à la lutte contre des oligarques.

Serguï Chefir, 57 ans, un ami et associé de longue date de M. Zelensky, en est sorti indemne, mais son chauffeur a été blessé dans cet attentat.  

« La réponse sera forte », a lancé Volodymyr Zelensky dans une vidéo enregistrée à New York où il assiste à l’Assemblée générale des Nations unies, tout en soulignant ne pas savoir qui a commandité l’opération.

« Tirer depuis une forêt sur la voiture d’un ami pour me passer le bonjour est une marque de faiblesse », a ajouté le dirigeant ukrainien, promettant de ne pas céder à « l’intimidation » et de poursuivre la « lutte contre la criminalité et contre des groupes financiers influents ».  

PHOTO SERHII NUZHNENKO, REUTERS

Piste russe ?

La police a indiqué étudier trois hypothèses principales. Selon son chef, Igor Klymenko, il pourrait s’agir d’une attaque  liée aux « fonctions officielles » de M. Chefir, d’une tentative de « faire pression sur les dirigeants » ou d’une volonté de « déstabiliser » le pays.  

Dans ce dernier cas, la « participation de services spéciaux étrangers » à l’attentat serait une possibilité, a estimé M. Klymenko, faisant probablement référence à la Russie, adversaire géopolitique de Kiev.

Moscou a aussitôt nié tout rôle. Selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, l’idée d’une piste russe « n’a rien à voir avec l’état réel des choses ».

Apparaissant au ministère de l’Intérieur, M. Chefir a dénoncé une tentative « d’intimider » le président ukrainien.

« Volodymyr Zelensky est une personne avec une forte volonté et il n’est pas intimidé. Il a choisi le droit chemin et il le suivra », a-t-il poursuivi.

Washington et Londres ont condamné l’attaque.

« La violence criminelle, y compris à des fins politiques, n’est jamais justifiée », a déclaré l’ambassade américaine sur Twitter.  

L’ambassadrice britannique en Ukraine, Melinda Simmons, s’est pour sa part dite « très inquiète » sur Twitter.

L’attentat s’est déroulé aux alentours de 10 h (3 h HAE) mercredi, quand des inconnus ont ouvert le feu sur la berline noire du haut fonctionnaire près du village de Lisnyky, dans la région de Kiev.

PHOTO BRENDAN SMIALOWSKI, AGENCE FRANCE-PRESSE

Volodymyr Zelensky

Au total, « 18 tirs ont été effectués sur la voiture à l’arme automatique », a indiqué le chef du parquet régional de Kiev, Oleksiï Khomenko, cité par l’agence Interfax-Ukraine.

Le chauffeur a été hospitalisé et opéré, mais ses jours ne sont pas en danger.

« Oligarques de l’ombre »

Un conseiller de la présidence, Mikhaïlo Podoliak, a affirmé à Interfax-Ukraine qu’il « associait clairement » l’attentat aux efforts de M. Zelensky visant à « réduire l’influence des oligarques de l’ombre » et à « la destruction des groupes politico-financiers qui travaillent pour nos adversaires étrangers ».  

M. Zelensky a annoncé cette année une campagne de lutte contre certains oligarques, de richissimes hommes d’affaires accusés d’exploiter l’économie de cette ex-république soviétique et d’acheter les voix des médias et de la classe politique.  

Avant d’accéder à la présidence de ce pays parmi les plus pauvres d’Europe en 2019, Volodymyr Zelensky était un acteur et comédien célèbre jouant justement le rôle du président ukrainien dans une série télévisée. M. Chefir était alors son proche associé au sein de sa société de production.

M. Zelensky a été élu en promettant le changement et une lutte féroce contre la corruption qui gangrène l’Ukraine. Mais jusqu’ici ses résultats ont été très limités.  

Plusieurs tentatives d’assassinats, réussies ou non, ont visé des hommes politiques et des journalistes ces dernières années en Ukraine, pays en guerre depuis 2014 avec des séparatistes prorusses et engagé dans une grave crise avec Moscou.  

L’accès aux armes à feu y est facilité par ce conflit dans l’Est.

Parmi les attaques retentissantes figurent les meurtres de l’ancien député russe Denis Voronenkov, abattu dans la rue en plein jour en 2017, et celui du journaliste d’investigation originaire de Minsk Pavel Cheremet l’année précédente, tué dans l’explosion de sa voiture à Kiev.